Gagnon c. Intervet Canada Corp. |
2020 QCCS 3972 |
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(Action collective) |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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N° : |
500-06-001003-199 |
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DATE : |
26 novembre 2020 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE : |
L’HONORABLE |
PIERRE-C. GAGNON, J.C.S. |
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Défenderesses |
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JUGEMENT SUR UNE DEMANDE D’AUTORISATION D’INSTITUER UNE ACTION COLLECTIVE |
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A. APERÇU
[1] Les « demanderesses », Mme Jessica Gagnon et Mme Alla Olenitch, sollicitent l’autorisation d’instituer une action collective contre « Intervet »[1], à savoir les défenderesses Intervet Canada Corp. ( « Intervet Canada » ) et Intervet GesmbH ( « Intervet Autriche » ), respectivement distributeur canadien et fabricant du Bravecto, un médicament vétérinaire.
[2] Prescrit par des vétérinaires, le Bravecto est un parasiticide destiné à tuer les puces et les tiques infestant des animaux domestiques, principalement des chiens et des chats.
[3] Le Bravecto contient un ingrédient actif, le fluralaner, que les demanderesses considèrent nocif au point d’avoir causé la mort de Snoopy, le chien de Mme Gagnon et d’avoir causé l’alopécie (perte de poils) de Willy, le chien de Mme Olenitch.
[4] Durant l’audience, il a été précisé que l’action collective ne regrouperait que les propriétaires de chiens, étant donné que le Bravecto est commercialisé sous différentes formes mais que les comprimés oraux de 112,5 mg à 1400 mg ne sont administrés qu’à des chiens (et non pas à des chats, par exemple).
[5] Après remplacement du mot « animal » par le mot « chien », la description recherchée du groupe de membres serait la suivante :
Toutes les personnes (…) ayant administré au Canada (subsidiairement au Québec) entre l’année 2014 et le 17 mai 2019, le produit commercialisé par Intervet Canada Corp., faisant affaires sous le nom de « Merck Santé animale », sous le nom de Bravecto, en comprimé oral de 112.5 mg à 1400 mg, à un chien leur appartenant et dont le chien a développé une des conditions suivantes suivant l’administration du produit :
Troubles du tractus digestif : diarrhée, hypersalivation, diarrhée hémorragique
Troubles systémiques : léthargie, anorexie
Troubles de la peau et annexes : prurit, alopécie
Troubles neurologiques : convulsions, ataxie, tremblements musculaires
Ou dont le chien est décédé
Et qui n’ont pas reçu de dédommagement monétaire de Merck, suite à l’administration de ce produit à leur chien.
[6] Il faut trancher une objection par Intervet à la modification de la description recherchée, formulée durant l’audience de la demande d’autorisation.
[7] Intervet demande le rejet de la demande d’autorisation soulevant plusieurs moyens dont les principaux sont les suivants :
· la Cour supérieure du Québec n’a pas compétence sur Intervet Autriche quant à un groupe englobant des membres résidant hors du Québec;
· la demande d’autorisation est rédigée de telle sorte que le droit civil québécois s’appliquerait à l’ensemble des membres, alors que pour ceux résidant hors-Québec, il faudrait plutôt appliquer la common law des autres provinces et territoires du Canada.
· dans ce contexte, si jamais une action collective était autorisée contre Intervet Canada et Intervet Autriche, le groupe devrait être restreint à des membres résidant au Québec;
· la demande d’autorisation n’identifie pas de « questions communes » que le jugement au fond pourrait trancher au bénéfice de tous les membres du groupe. Les questions individuelles prédominent excessivement, contrairement à ce qu’exige le paragraphe 575 (1o) du Code de procédure civile ( « C.p.c. » );
· compte tenu du droit canadien et québécois régissant la vente de médicaments vétérinaires, les demanderesses échouent à démontrer l’un ou l’autre des divers éléments de la théorie de la cause qui engagerait la responsabilité de l’une ou l’autre des défenderesses. De la sorte, le critère du paragraphe 575 (2o) n’est pas rempli.
· l’action collective ne doit pas être autorisée en fonction d’une identification floue et démesurée des effets secondaires indésirables reprochés au Bravecto;
· il ne faut pas englober dans le groupe des propriétaires dont les chiens n’ont subi aucun préjudice découlant de l’administration de Bravecto;
· la demande personnelle de Mme Gagnon et celle de Mme Olenitch sont toutes deux irrecevables, ce qui les élimine à titre de possibles représentantes des membres, au sens du paragraphe 575 (4o) C.p.c.;
· la preuve déficiente ne permet pas d’identifier d’autres personnes que Mmes Gagnon et Olenitch qui feraient partie des membres du groupe, tel qu’exigé par le paragraphe 575 (3o) C.p;.c.;
· la Loi sur la protection du consommateur est inapplicable à la mise en marché de médicaments, ce qui, notamment, élimine la possibilité d’octroyer des dommages punitifs en faveur des membres;
[8] Par ailleurs, Intervet avait produit une demande de disjonction, pour que le cas de Snoopy et celui de Willy fassent l’objet de deux actions collectives distinctes, si autorisées. Intervet a retiré cette demande le 18 septembre 2020[2].
B. ANALYSE SOMMAIRE DE LA DEMANDE D’AUTORISATION
[9] Les demanderesses ont produit successivement trois versions de la demande d’autorisation :
· la « requête » originale du 17 mai 2019;
· la « requête » modifiée du 19 juin 2019;
· la « requête » modifiée du 24 février 2020.
[10] Il s’agit ici d’identifier le syllogisme essentiel de la version du 24 février 2020. Celle-ci invoque plusieurs pièces (pièces R-1 à R-43)[3], dont l’analyse doit aussi tenir compte.
B.1 Le cas de Snoopy
[11] Snoopy, le chien de Mme Gagnon, était bien portant jusqu’au 7 septembre 2018, alors qu’un vétérinaire a prescrit, à titre préventif, un comprimé de Bravecto 250 mg par voie orale.
[12] Snoopy est décédé le lendemain soir 8 septembre 2018.
[13] Une première nécropsie de Snoopy n’a révélé aucune trace du Bravecto dans le foie du chien[4].
[14] Étonnée, Mme Gagnon a entamé des démarches (avec l’aide de Mme Olenitch) résultant le 9 novembre 2018 dans un rapport d’analyse du vétérinaire John Buchweitz, de Michigan State University, indiquant la découverte de traces du fluralaner dans le foie de Snoopy[5].
[15] Ensuite, une équipe vétérinaire de l’University of Guelph a procédé à sa propre analyse de spécimens nécrologiques, datée du 23 janvier 2019, éliminant la possibilité d’ « anticoagulant rodenticide toxicity » mais énonçant la possibilité d’ « idiopathic thymic hemorrahage /thymic hematome of young dogs »[6].
[16] Une vétérinaire établie en Californie, la Dre W. Jean Dodds a passé en revue le dossier constitué et transmis une lettre, datée du 19 février 2019, concluant que « this dog died as a result of a severe fatal adverse reaction to the fluralaner product »[7].
B.2 Le cas de Willy
[17] Le 1er juin 2015, observant les conseils du vétérinaire, Mme Olenitch a administré à son chien Willy, un comprimé de Bravecto 112 mg, à titre purement préventif. Willy n’avait alors aucun problème de puces ou de tiques.
[18] Dans les semaines et les mois qui ont suivi (en 2015, 2016, 2017 et 2018), Willy a manifesté divers problèmes de santé, incluant du prurit, des squames et de l’alopécie[8].
[19] Plusieurs traitements ont été tentés, et divers tests administrés, mais sans vraiment éliminer les problèmes. Notamment, des vétérinaires ont soupçonné un désordre des systèmes endocrinien et immunitaire[9].
[20] Mme Olenitch en est venue, vers octobre 2017, à établir un lien de cause à effet entre l’administration du Bravecto le 1er juin 2015 et les ennuis de santé subséquents de Willy.
[21] Le 21 novembre 2017, Mme Olenitch a transmis à Santé Canada une déclaration de pharmacovigilance rapportant la chronologie des problèmes éprouvés par Willy à partir du 1er juin 2015[10].
[22] Depuis 2018, Willy a repris du « poil de la bête », pour ainsi dire.
B.3 Reproches factuels des demanderesses
[23] Tant Mme Gagnon que Mme Olenitch se plaignent d’un manque d’information concernant les effets secondaires indésirables du Bravecto.
[24] Toutes deux allèguent avoir été induites en erreur quant à la prétendue innocuité du Bravecto, alors que les vétérinaires traitant Snoopy et Willy n’ont jamais divulgué que ce médicament pouvait causer des effets secondaires, légers ou sévères.
[25] Santé Canada a autorisé la mise en marché du Bravecto sur le territoire canadien le 2 juillet 2014[11].
[26] Cependant, en février 2017, l’Agence européenne des médicaments ou European Medecines Agency ( « EMA » ) a diffusé un bulletin public de pharmacovigilance concernant divers produits vétérinaires dont le Bravecto. Malgré que l’étude restait non-concluante à cette époque, demande était faite (au distributeur ou « MAH » ) de faire rapport en ciblant les incidences de « neurological disorders, skin and appendages disorders, hypersensitivity/immune mediatric reactions and hepatopathy »[12].
[27] À ce jour, Intervet n’a pas publié de tel rapport.
[28] Aussi, le 23 janvier 2019, l’EMA rapportait 10 349 déclarations d’effets indésirables graves du Bravecto[13].
[29] De son côté, la U.S. Food and Drug Administration ( « FDA » ) rapportait le 10 janvier 2018 un nombre élevé de déclarations d’effets indésirables :
· 22 626 pour des chiens;
· 2 222 pour des chats;
· 282 pour des humains exposés accidentellement au Bravecto[14].
[30] Le 20 septembre 2018, la FDA lançait une alerte aux vétérinaires et aux propriétaires d’animaux domestiques concernant le potentiel de troubles neurologiques pour les chats et les chiens traités avec des médicaments de la classe des isoxazolines, dont le Bravecto[15].
[31] À son tour, le 2 novembre 2018, Santé Canada exigeait que le prospectus canadien autorisé pour le Bravecto soit mis à jour en ajoutant notamment cette mise en garde :
Les réactions indésirables suivantes ont été signalées rarement (signalées chez au moins 1, mais pas plus de 10 animaux sur 10 000 animaux exposés) et très rarement (signalées chez moins de 1 sur 10 000 animaux exposés) et sont regroupées par système de l’organisme, par ordre décroissant de fréquent :
Troubles du tractus digestif : vomissements, diarrhée, hypersalivation, diarrhée hémorragique
Troubles systémiques : manque d’efficacité soupçonné, léthargie, anorexie
Troubles de la peau et annexes : prurit, alopécie
Troubles neurologiques : convulsions, ataxie, tremblements musculaires[16].
[32] Cependant, malgré ces interventions des organismes étatiques ou supraétatiques, Intervet continue une campagne publicitaire agressive, par exemple sur le site internet us.bravectofacts.com, où elle dénonce le « mythe » d’effets secondaires sévères et affirme plutôt que la réalité est celle-ci :
Fact- Clinical research data and analysis of adverse events to date do not demonstrate a causal relationship between Bravecto and liver or kidney issues or cancer.
Further, the most common reported events are mild and transient gastrointestinal upset, such as vomiting or diarrhea, and these are noted on the product label[17].
[33] De la sorte, Intervet tenterait de dissimuler les résultats d’une étude publiée en juillet 1999 dans le Journal of Medicinal Chemistry par DuPont Pharmaceuticals Company qui analysait les effets anticoagulants des dérivés isoxazolines[18] (dont le fluralaner fait partie).
[34] Cette étude portait sur le potentiel des dérivés isoxazolines en tant qu’inhibiteurs de la coagulation du sang pour prévenir certaines thromboses affectant les vaisseaux sanguins.
[35] Dans sa lettre du 19 février 2019, la Dre Dodds retient de cette étude que les dérivés isoxazolines, utilisés pour prévenir la coagulation sanguine, pourraient causer des saignements excessifs.
[36] Or, les rapports de pharmacovigilance de Santé Canada indiquent que ce ministère a reçu 3 913 déclarations d’effets indésirables entre 2014 et 2019[19].
[37] Mme Olenitch rapporte avoir été en contact direct avec 30 Québécois et 14 autres Canadiens affirmant que leur animal a subi des effets indésirables du Bravecto[20].
[38] Finalement, en octobre 2019, l’EMA a reçu une pétition de quelque 102 000 personnes, dont des Canadiens, réclamant que le Bravecto soit retiré du marché[21].
B.4 Manquements reprochés à Intervet
[39] Les demanderesses plaident :
· manquement au devoir général de prudence (art. 1457 du Code civil du Québec ( « C.c.Q. » );
· manquement au devoir d’information du fabricant (art. 1469 C.c.Q.);
· fausses représentations, fausse publicité, dissimulation d’information pertinente (art. 1400-1401 C.c.Q.);
· manquement par des commerçants aux obligations additionnelles que leur impose la Loi sur la protection du consommateur.
B.5 Conclusions recherchées
[40] Les demanderesses réclamant des dommages-intérêts compensatoires, d’une quotité variable d’un membre à l’autre en fonction de l’importance des effets secondaires subis par chaque chien.
C. RÈGLES DE DROIT APPLICABLES
C.1 Règles applicables à l’ensemble des demandes d’autorisation
[41] Le juge d’autorisation doit accorder telle autorisation s’il est démontré que toutes et chacune des quatre conditions de l’article 575 C.p.c. sont respectées :
575. Le tribunal autorise l’exercice de l’action collective et attribue le statut de représentant au membre qu’il désigne s’il est d’avis que:
1° les demandes des membres soulèvent des questions de droit ou de fait identiques, similaires ou connexes;
2° les faits allégués paraissent justifier les conclusions recherchées;
3° la composition du groupe rend difficile ou peu pratique l’application des règles sur le mandat d’ester en justice pour le compte d’autrui ou sur la jonction d’instance;
4° le membre auquel il entend attribuer le statut de représentant est en mesure d’assurer une représentation adéquate des membres.
[42] Au Québec, l’autorisation est un processus de filtrage souple qui ne doit servir qu’à écarter les demandes frivoles ou insoutenables[22].
[43] Le demandeur n’est pas tenu de démontrer la probabilité que sa demande sera accueillie au fond. Il n’a qu’à proposer un syllogisme soutenable et défendable, auquel seul un obstacle évident et insurmontable pourra faire échec[23].
[44] Les allégations de la demande et les pièces invoquées à leur soutien sont tenues pour avérées, à moins de contradiction par une preuve sommaire et évidente[24]. Il est trop tôt pour tenir compte des éventuels moyens de défense.
[45] Les critères de l’article 575 C.p.c. sont exhaustifs. Le principe directeur de la proportionnalité (article 18 C.p.c.) imprègne l’analyse de ces critères mais ne constitue pas un cinquième critère autonome[25].
[46] Si un doute persiste au terme de l’analyse des quatre critères de l’article 575 C.p.c., le doute doit bénéficier à la demande. Il incombera au juge du fond de trancher définitivement[26].
[47] Par contre, l’échec d’un seul des quatre critères suffit à entraîner le refus de l’autorisation[27].
[48] La norme de « preferability » ne s’applique pas au Québec[28]. Le juge d’autorisation n’a pas à vérifier si l’action collective est le véhicule procédural le plus adéquat pour solutionner le litige (par opposition à une multitude d’actions individuelles).
[49] Dans l’arrêt L’Oratoire Saint-Joseph[29], rendu le 7 juin 2019, la Cour suprême réitère que le juge d’autorisation doit se confiner à un rôle de filtrage[30] et doit écarter uniquement les actions collectives qui sont frivoles et celles qui ne présentent aucune chance de succès, ou autrement dit qui sont manifestement mal fondées en fait ou en droit[31].
[50] Dans Desjardins Cabinet de services financiers inc. c. Asselin[32], arrêt rendu le 30 octobre 2020, la Cour suprême s’abstient de modifier les règles mises de l’avant dans L’Oratoire Saint-Joseph.
[51] La Cour suprême ajoute que le juge d’autorisation ne doit pas faire excès de littéralisme et de rigorisme. Il doit veiller à discerner la théorie de la cause énoncée dans la demande d’autorisation (et ses pièces), sans toutefois aller jusqu’à identifier dans le néant des allégations qui n’y sont tout simplement pas.
[52] La Cour suprême réitère que le juge de l’autorisation peut, au stade de l’autorisation, trancher une pure question de droit si le sort de l’action collective en dépend. Mais toute détermination qui requiert une analyse factuelle n’est pas une pure question de droit. Cette détermination doit être déférée au juge du fond.
[53] Il convient de citer au même effet l’arrêt Godin c. Aréna des Canadiens inc.[33], rendu par la Cour d’appel le 7 octobre 2020.
[54] La Cour d’appel statue que le juge d’autorisation commet une erreur de droit quand il tranche une question qui relève uniquement du juge du fond. C’est le cas quand la vérification d’une théorie de la cause nécessite une analyse factuelle, de sorte qu’il ne s’agit plus d’une pure question de droit.
[55] La Cour d’appel rappelle que le juge d’autorisation doit se contenter d’une preuve documentaire sobre et limitée. Le juge d’autorisation ne reçoit pas la preuve exhaustive de tous les faits pertinents, ce qui relève de l’étape du fond.
[56] Il se soulève des questions identiques, similaires ou connexes (dites « communes » ), dès qu’il en existe, ne serait-ce qu’une seule[34], à laquelle la réponse ferait progresser le règlement du litige pour l’ensemble des membres du groupe, à moins que telle réponse ne joue qu’un rôle négligeable quant au sort du litige[35].
[57] Une question sera commune même si la réponse diffère d’un membre à l’autre au sein du groupe. La réponse peut être favorable à certains membres du groupe et défavorable à d’autres, en autant que le succès d’un membre ne provoque pas l’échec d’un autre membre[36].
[58] Il suffit que la réponse fasse progresser le règlement de la réclamation de chaque membre du groupe, de façon non négligeable. À cet égard, ce critère est plus souple que celui de la « commonality » utilisé par les tribunaux des provinces de common law[37].
[59] Le représentant proposé doit démontrer qu’il est membre du groupe, soit que sa situation juridique est identique, similaire ou connexe à celle des membres[38]. Le représentant doit démontrer un syllogisme indiquant qu’il détient un recours personnel contre l’un des défendeurs[39]. Le recours personnel du représentant sert à déterminer si le critère du paragraphe 575 (2o) C.p.c. est rempli[40].
[60] La Cour d’appel demande d’analyser chaque critère distinctement, en débutant par le deuxième critère autant que possible.
C.2 Règles applicables aux demandes reprochant transgression du devoir d’information et du devoir de sécurité par le fabricant et le distributeur d’un médicament
[61] La demande d’autorisation reproche aux défenderesses un manquement au devoir général de prudence. S’agissant du régime général de la responsabilité civile (article 1457 C.c.Q.), il faut trouver dans la demande d’autorisation des allégations suffisantes d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre les deux.
[62] Cela dit, cette section traite de l’autre manquement reproché à Intervet, celui d’une transgression du devoir d’information occasionnant un défaut de sécurité.
[63] Voici le libellé de l’article 1469 C.c.Q. :
Art. 1469. Il y a défaut de sécurité du bien lorsque, compte tenu de toutes les circonstances, le bien n’offre pas la sécurité à laquelle on est normalement en droit de s’attendre, notamment en raison d’un vice de conception ou de fabrication du bien, d’une mauvaise conservation ou présentation du bien ou, encore, de l’absence d’indications suffisantes quant aux risques et dangers qu’il comporte ou quant aux moyens de s’en prémunir. [soulignements ajoutés] |
Art. 1469. A thing has a safety defect where, having regard to all the circumstances, it does not afford the safety which a person is normally entitled to expect, particularly by reason of a defect in design or manufacture, poor preservation or presentation, or the lack of sufficient indications as to the risks and dangers it involves or as to the means to avoid them. |
[64] Dans le présent cas, la théorie de la cause en demande porte notamment sur le dernier volet de cette disposition, soit « l’absence d’indications suffisantes quant aux risques et dangers qu’il comporte ou quant aux moyens de s’en prémunir ».
[65] Intervet plaide que les demanderesses échouent à démontrer que le Bravecto peut causer des effets secondaires indésirables qui n’auraient pas été divulgués en temps utile[41].
[66] Intervet invoque en sa faveur le régime d’approbation par Santé Canada d’un nouveau médicament et le régime de mise à jour par Santé Canada du prospectus ajoutant certains effets secondaires indésirables à ceux préalablement divulgués.
[67] Intervet s’appuie sur ce qu’elle considère un processus méthodique, réglé par la loi, qui n’oblige pas le fabricant et le distributeur d’un médicament à réagir dès la moindre doléance d’un vétérinaire ou propriétaire d’animal.
[68] Pour analyser les positions de part et d’autre, le Tribunal doit considérer le régime légal applicable. Il ne s’agit pas de trancher définitivement le fond de la problématique. Il s’agit plutôt de vérifier si l’on est, dès le stade de l’autorisation, face à une pure question de droit au sens de l’arrêt Asselin[42] et de l’arrêt Godin[43].
C.2.1 L’auteur Lamontagne
[69] Auteur reconnu en matière de droit de la vente, le professeur Denys-Claude Lamontagne traite dans sa monographie[44] de la garantie de sécurité du bien vendu, édictée aux articles 1468 et 1469 C.c.Q.
[70] Me Lamontagne résume notamment que :
· la garantie de sécurité s’impose au fabricant, au distributeur, au fournisseur du bien meuble (tout participant à la chaîne de fabrication);
· le préjudice allégué par le défaut de sécurité peut être corporel, matériel ou moral;
· tout « tiers » peut invoquer la garantie. Cependant, quand un contrat est intervenu directement avec ce tiers, celui-ci ne peut réclamer que sur une base contractuelle plutôt qu’extracontractuelle;
· la victime doit prouver l’existence d’un défaut, le préjudice et le lien causal entre les deux[45].
[71] Le fabricant, le distributeur et le fournisseur disposent de trois catégories de moyens de défense, à savoir :
· la victime connaissait ou était en mesure de connaître le défaut du bien;
· le préjudice résulte de la force majeure;
· au moment où le bien a été fabriqué, distribué ou fourni, le vice était indécelable; puis, quand l’existence du défaut a été révélée, ils n’ont pas été négligents dans leur devoir d’information[46].
[72] Ce troisième moyen d’exonération est édicté au deuxième alinéa de l’article 1473 C.c.Q., comme suit :
Art. 1473. Le fabricant, distributeur ou fournisseur d’un bien meuble n’est pas tenu de réparer le préjudice causé par le défaut de sécurité de ce bien s’il prouve que la victime connaissait ou était en mesure de connaître le défaut du bien, ou qu’elle pouvait prévoir le préjudice. Il n’est pas tenu, non plus, de réparer le préjudice s’il prouve que le défaut ne pouvait être connu, compte tenu de l’état des connaissances, au moment où il a fabriqué, distribué ou fourni le bien et qu’il n’a pas été négligent dans son devoir d’information lorsqu’il a eu connaissance de l’existence de ce défaut. |
Art. 1473. The manufacturer, distributor or supplier of a movable thing is not bound to make reparation for injury caused by a safety defect in the thing if he proves that the victim knew or could have known of the defect, or could have foreseen the injury.
Nor is he bound to make reparation if he proves that, according to the state of knowledge at the time that he manufactured, distributed or supplied the thing, the existence of the defect could not have been known, and that he was not neglectful of his duty to provide information when he became aware of the defect. |
C.2.2 Les autrices Leroux et Giroux
[73] Dès 1993, les professeures Thérèse Leroux et Michelle Giroux s’intéressaient à l’obligation de qualité et de sécurité puis à l’obligation d’information du fabricant d’un médicament[47].
[74] Elles exposaient que ces obligations sont élaborées dans la Loi sur les aliments et les drogues[48], dont le but premier est la protection du public[49].
[75] L’obligation de qualité et de sécurité vise l’efficacité et l’innocuité du médicament. Mais il ne peut s’agir d’exigences absolues : chaque médicament comporte des risques inhérents, qui ne peuvent pas toujours être éliminés[50].
[76] Cette obligation persiste durant toute la vie marchande du produit. Aussi, des mécanismes doivent être en place pour déceler les performances et les lacunes de ce produit. Ce fabricant doit se tenir à jour des développements scientifiques[51].
[77] S’inspirant de la grande controverse des transfusions de sang contaminé (qui fait rage à l’époque de l’article), les autrices relèvent diverses formes que peut revêtir un manquement à l’obligation :
L’absence de tests de dépistage sur les échantillons sanguins lorsque disponibles, le refus de remettre en cause certaines techniques utilisées, ou encore, le fait de ne pas rappeler les échantillons déjà distribués et auxquels on n’a pas appliqué une nouvelle méthode déjà existante[52].
[78] Concernant l’obligation d’information, les professeures Leroux et Giroux mentionnent l’entrée en vigueur imminente du nouveau Code civil du Québec, le 1er janvier 1994.
[79] Les articles 1468 et 1469 C.c.Q. sont de droit nouveau. Ces dispositions font écho au Règlement sur les aliments et drogues[53].
[80] La réglementation fédérale distingue l’information destinée à un membre du public, d’une part, de celle que requiert le professionnel de la santé (médecin, pharmacien, vétérinaire) appelé à prescrire le médicament, d’autre part.
[81] Bien que la jurisprudence québécoise soit encore anémique en 1993, les autrices penchent en faveur de la reconnaissance au Québec de la « doctrine de l’intermédiaire compétent », concept en provenance des États-Unis[54].
[82] Selon cette doctrine, le fabricant se décharge de son devoir d’information quand il fournit telle information, non pas au consommateur, mais au professionnel qui lui prescrit le médicament.
C.2.3 Les auteurs Gagné et Bourassa Forcier
[83] En 2017, le praticien Mathieu Gagné et la professeure Mélanie Bourassa Forcier publient la deuxième édition de leur Précis de droit pharmaceutique[55], qui procure une mise à jour sur ces mêmes notions.
[84] Ils décrivent le système national de pharmacovigilance, en vertu duquel Santé Canada, à l’instar d’homologues à travers le monde, recueille systématiquement de l’information sur les effets indésirables des médicaments[56].
[85] Le fabricant est tenu d’élaborer des procédures écrites pour rapporter diligemment toute réaction indésirable grave et imprévue à la drogue, qu’elle soit survenue au Canada ou à l’extérieur du Canada.
[86] Au-delà de ce mécanisme spécifique, Gagné et Bourassa Forcier indiquent que les fabricants de produits pharmaceutiques sont, en droit québécois, astreints à une norme de diligence élevée, parce leurs produits sont destinés à être ingérés ou consommés par des humains (ou des animaux)[57].
[87] Le plus souvent, le consommateur aura acquis le médicament directement du fabricant, d’où une relation contractuelle. Il pourra parfois exister des situations où celui qui utilise le médicament sera autre que celui qui l’a acheté, d’où une relation extracontractuelle[58].
[88] Le respect des normes prescrites par la Loi sur les aliments et drogues et de son Règlement ne constitue pas une fin de non-recevoir à un recours fondé sur le droit civil. De même, l’industrie pharmaceutique canadienne s’auto-réglemente en s’imposant des standards élevés de diligence, qui ne la mettent pas pour autant à l’abri de recours par les victimes d’effets indésirables[59].
[89] L’obligation de qualité et de sécurité n’est pas absolue. Les risques d’utilisation d’un médicament ne peuvent pas être totalement éliminés[60]. Ceci mène à penser qu’une analyse factuelle et contextuelle s’impose en cas de litige.
[90] Par contre, l’obligation de qualité et de sécurité est continue. Elle s’applique pendant toute la vie marchande du médicament :
Elle (la compagnie pharmaceutique) doit non seulement être raisonnablement diligente lors des étapes précédant la mise en marché d’un médicament, mais elle doit également maintenir à jour pour ses connaissances scientifiques et rapporter les effets indésirables[61].
[91] Tant en matière contractuelle qu’en matière extracontractuelle, on ne peut plus douter au Québec de l’existence d’une obligation d’information[62].
[92] L’utilisateur doit être suffisamment informé des dangers auxquels il s’expose pour être en mesure de prendre une décision éclairée (la mise en garde) et d’utiliser correctement le produit (le mode d’emploi)[63].
[93] Le fabricant de produits pharmaceutiques doit effectuer un suivi rigoureux des nouveaux effets indésirables. L’article 1473 C.c.Q. l’oblige à en informer les utilisateurs[64]. Encore une fois, il s’agit d’une obligation continue[65].
[94] Le fabricant doit divulguer tous les risques importants en termes de probabilité de réalisation. Gagné et Bourassa Forcier citent un auteur américain à l’effet qu’une probabilité d’au moins une chance sur mille révèle l’existence d’un risque important[66].
[95] Ces mêmes auteurs considèrent avoir décelé la réception au Québec de la doctrine de l’intermédiaire compétent[67].
[96] Ils citent à cet effet l’arrêt de la Cour suprême dans Lapierre c. Québec (Procureur général)[68] et l’arrêt subséquent de la Cour d’appel dans Mowrey c. Johnson & Johnson[69].
C.2.4 Le récent arrêt Abbott
[97] L’état du droit s’est considérablement précisé depuis l’arrêt que la Cour d’appel a rendu le 8 mai 2019 dans l’arrêt Abbott[70], traitant du médicament antibiotique Biaxin.
[98] Pour la première fois au Canada, une cour d’appel statue au fond sur la responsabilité civile d’une compagnie pharmaceutique du fait d’un médicament d’ordonnance[71].
[99] Dès le début du jugement, le juge Ruel résume les règles applicables pour trancher une poursuite contre un fabricant pharmaceutique pour défaut de sécurité d’un médicament (dont il est concédé dès le départ qu’elle est instituée sur une base extracontractuelle) :
[9] Pour espérer obtenir réparation contre le fabricant en application du régime extracontractuel portant sur le défaut de sécurité des biens, l’usager doit démontrer par une preuve prépondérante : (1) que le bien comporte un danger, (2) qu’il subit un préjudice, et (3) qu’il existe un lien de causalité, c’est-à-dire que le préjudice constitue la matérialisation concrète du danger. S’il réussit à faire cette démonstration, il y a présomption de responsabilité du fabricant.
[10] Ce dernier peut s’exonérer s’il démontre avoir satisfait à son obligation d’information en transmettant aux usagers des informations adéquates sur les dangers de son produit. Le cas échéant, il pourra invoquer que l’usager connaissait ou était en mesure de connaître le danger. S’il prouve que le danger ne pouvait être connu compte tenu de l’état des connaissances au moment de la fabrication ou de la mise en marché du bien, il pourra également s’exonérer s’il prouve qu’il n’a pas été négligent dans son devoir d’information lorsqu’il a eu connaissance de l’existence de ce danger.
[soulignement ajouté]
[100] Le juge Ruel applique ensuite ces principes au cas d’espèce, en soulignant initialement que la preuve n’a pas démontré scientifiquement que le médicament provoque les effets secondaires dont on s’est plaint :
[11] En l’espèce, la preuve n’établit pas que le Biaxin possède la capacité de provoquer des effets secondaires de nature neuropsychiatrique. Néanmoins, des effets secondaires de nature neuropsychiatrique très graves ont été rapportés en concomitance avec la prise du Biaxin. Cinq membres du recours ont présenté une preuve convaincante à cet égard. Dans une optique de précaution et compte tenu de la large utilisation de ce médicament pour traiter certaines infections bactériennes sérieuses, le fabricant devrait informer les usagers des effets secondaires graves rapportés à la suite de la prise de ce médicament.
[12] En l’espèce, cependant, Abbott a adéquatement informé les usagers, dès la mise en marché du Biaxin et de manière évolutive par la suite en fonction de l’évolution des connaissances, des risques d’effets secondaires de nature neuropsychiatrique.
[13] Les monographies successives du Biaxin, qui sont approuvées par Santé Canada en lien avec la commercialisation du médicament, font état des diverses formes d’effets secondaires de nature neuropsychiatrique.
[14] Compte tenu que la capacité du médicament de causer des effets secondaires de nature neuropsychiatrique n’a pu être établie, malgré de rigoureuses évaluations pendant presque trente ans, et que la prévalence de tels effets est très faible, Abbott était justifiée d’inclure ces effets secondaires dans la section « Effets secondaires » de la Partie I des monographies successives du Biaxin, au lieu de la section « Mises en garde et précautions » de la même partie, qui vise des effets graves et prouvés pouvant mettre en péril la santé immédiate de l’usager.
[15] Par l’inclusion des informations contenues aux monographies successives du Biaxin, Abbott s’est déchargée de son obligation d’informer les intermédiaires compétents, c’est-à-dire les pharmaciens et les médecins, des risques et dangers de l’utilisation du médicament. Ces intermédiaires devraient prendre connaissance des informations contenues dans les monographies et en informer à leur tour leurs patients, selon leur jugement professionnel, compte tenu notamment du niveau de risque.
[soulignements ajoutés]
[101] Il s’agit précédemment d’un « aperçu » de ce qui sera ensuite analysé en détails.
[102] Ainsi, plus loin, le juge Ruel décrit comment doit s’appliquer l’article 1469 C.c.Q. :
[81] Selon l’article 1469 du Code civil du Québec, l’absence d’indications suffisantes quant aux dangers d’un bien ou quant aux moyens de s’en prémunir est donc assimilée à un défaut de sécurité.
[82] En effet, la transmission d’informations adéquates sur les dangers d’un bien par le fabricant permet aux utilisateurs d’exercer un choix éclairé de se le procurer ou non, de l’utiliser, de cesser son utilisation ou de questionner le fabricant ou des intermédiaires qualifiés en vue de se prémunir ou de se protéger à l’encontre de la matérialisation des risques et dangers qu’il comporte.
[83] L’information doit être précise et les mises en garde transmises par le fabricant doivent être suffisantes pour que l’utilisateur « réalise pleinement le danger et le risque associé à l’usage du bien ainsi que ses conséquences potentielles et sache quoi faire (ou ne pas faire) pour s’en protéger ou, le cas échéant, y remédier ».
[84] Par ailleurs, l’intensité de l’obligation d’information qui incombe au fabricant « est directement proportionnelle à l’importance du danger et du préjudice potentiels que présente l’usage du bien ».
[85] Dans ce contexte, « le produit destiné à être ingéré ou encore implanté ou introduit dans le corps exige un niveau d’information particulièrement élevé, surtout lorsque le préjudice susceptible de découler de son utilisation est grave ou la probabilité de sa matérialisation non négligeable ».
[86] En somme, « le fabricant a le devoir de renseigner les usagers sur les risques et dangers que présente le bien et la manière de s’en protéger et, s’il manque à ce devoir, le bien n’offrant alors pas la sécurité à laquelle on est normalement en droit de s’attendre, il encourt [sa] responsabilité ».
[références omises et soulignements ajoutés]
[103] Telles règles d’application de l’article 1469 C.c.Q. sont celles que la Cour d’appel a élaborées en début de 2019 dans le cadre de l’ « action collective du tabac »[72].
[104] L’arrêt Abbott se penche ensuite sur la méthodologie d’application de l’article 1468 C.c.Q. :
[87] Pour espérer obtenir réparation en application de l’article 1468 du Code civil du Québec, l’usager doit démontrer selon une preuve prépondérante : (1) que le bien comporte un danger, (2) qu’il subit un préjudice, et (3) qu’il existe un lien de causalité entre le préjudice et le dangerhttp://citoyens.soquij.qc.ca/php/decision.php?ID=0D01542C4859DE170E30E2E1D760CF3A&captchaToken=03AGdBq24HPSQxKwqL-88YA-Q36dpCqdbL2S3KglzgpKt-E2GvgQ2egpP6NcepCN3wApdd3pJjMpV9V0Rhhi60b4RL4O_7A-WPyeydFBomiDdAmRiDl85YvrafYzTGZBgJKSPuhqwYXQNqCBFg25fp66CwuF2tU4bX2HGbVZhBjqERFkxFxgeom8h-h03fbiBkgurM6ase-bH6_-sIQAISECGdoi7nz2nRDNXv60TXR-wirNBiHOY0gUMFEBpKfDPXQwa7Tne4XQdScSbhGUUOWG1Iu2qhzllluG2soWeYPcTCFeQ44Do4g_uh2QyNLD1gTp7paGQPv4cq7AA47ieGuTyPXq9DN9EXqTlhOrsmj65fEjXfPyuktVBWGvar_7_Sv4lLzyRklXr_Y0aBw77oo2Hmo78HiMuP9PhQaQXoNX7E3jMmSP6zZ58kyyxDZfkRg663YyjoszLFX3QFCEhqe9LykiZeVp_dUA - _ftn44.
[88] En principe, l’usager n’a pas le fardeau de démontrer la cause précise du défaut de sécurité. Plus particulièrement, il n’a pas à démontrer, selon l’article 1469 du Code civil du Québec, que le défaut de sécurité résulte d’un vice de conception, de fabrication ou encore de l’absence d’indications suffisantes quant aux risques et dangers, bien qu’il puisse toujours tenter de faire cette démonstration ou d’en présenter l’esquisse.
[89] En ce qui concerne la suffisance des indications quant aux risques et dangers, il n’y a véritablement que le fabricant qui puisse présenter une preuve complète à ce sujethttp://citoyens.soquij.qc.ca/php/decision.php?ID=0D01542C4859DE170E30E2E1D760CF3A&captchaToken=03AGdBq24HPSQxKwqL-88YA-Q36dpCqdbL2S3KglzgpKt-E2GvgQ2egpP6NcepCN3wApdd3pJjMpV9V0Rhhi60b4RL4O_7A-WPyeydFBomiDdAmRiDl85YvrafYzTGZBgJKSPuhqwYXQNqCBFg25fp66CwuF2tU4bX2HGbVZhBjqERFkxFxgeom8h-h03fbiBkgurM6ase-bH6_-sIQAISECGdoi7nz2nRDNXv60TXR-wirNBiHOY0gUMFEBpKfDPXQwa7Tne4XQdScSbhGUUOWG1Iu2qhzllluG2soWeYPcTCFeQ44Do4g_uh2QyNLD1gTp7paGQPv4cq7AA47ieGuTyPXq9DN9EXqTlhOrsmj65fEjXfPyuktVBWGvar_7_Sv4lLzyRklXr_Y0aBw77oo2Hmo78HiMuP9PhQaQXoNX7E3jMmSP6zZ58kyyxDZfkRg663YyjoszLFX3QFCEhqe9LykiZeVp_dUA - _ftn46. Le fardeau à cet égard n’appartient donc pas à l’usager, bien qu’en pratique, ce dernier puisse faire une preuve sommaire à ce sujet.
[90] Sur la causalité, l’usager doit établir que le préjudice constitue la matérialisation concrète du danger. Il faut que « le préjudice soit l’expression de la matérialisation du danger dont l’usager courait le risque en se servant du produit »http://citoyens.soquij.qc.ca/php/decision.php?ID=0D01542C4859DE170E30E2E1D760CF3A&captchaToken=03AGdBq24HPSQxKwqL-88YA-Q36dpCqdbL2S3KglzgpKt-E2GvgQ2egpP6NcepCN3wApdd3pJjMpV9V0Rhhi60b4RL4O_7A-WPyeydFBomiDdAmRiDl85YvrafYzTGZBgJKSPuhqwYXQNqCBFg25fp66CwuF2tU4bX2HGbVZhBjqERFkxFxgeom8h-h03fbiBkgurM6ase-bH6_-sIQAISECGdoi7nz2nRDNXv60TXR-wirNBiHOY0gUMFEBpKfDPXQwa7Tne4XQdScSbhGUUOWG1Iu2qhzllluG2soWeYPcTCFeQ44Do4g_uh2QyNLD1gTp7paGQPv4cq7AA47ieGuTyPXq9DN9EXqTlhOrsmj65fEjXfPyuktVBWGvar_7_Sv4lLzyRklXr_Y0aBw77oo2Hmo78HiMuP9PhQaQXoNX7E3jMmSP6zZ58kyyxDZfkRg663YyjoszLFX3QFCEhqe9LykiZeVp_dUA - _ftn48.
[91] Dans un dossier portant sur l’utilisation d’un médicament, comme en l’espèce, la causalité est la preuve prépondérante de la matérialisation du risque d’un effet secondaire particulier du médicament, c’est-à-dire la preuve d’une relation de cause à effet entre le risque et le préjudice subi par les usagers.
[92] Dans le cadre d’une action collective portant sur le défaut de sécurité d’un médicament, cette preuve de causalité pourra dans certains cas être faite de manière collective, particulièrement lorsque la capacité du médicament de causer un effet secondaire particulier est établie.
[93] Dans d’autres cas, il peut être requis pour les usagers de faire une preuve individuelle de causalitéhttp://citoyens.soquij.qc.ca/php/decision.php?ID=0D01542C4859DE170E30E2E1D760CF3A&captchaToken=03AGdBq24HPSQxKwqL-88YA-Q36dpCqdbL2S3KglzgpKt-E2GvgQ2egpP6NcepCN3wApdd3pJjMpV9V0Rhhi60b4RL4O_7A-WPyeydFBomiDdAmRiDl85YvrafYzTGZBgJKSPuhqwYXQNqCBFg25fp66CwuF2tU4bX2HGbVZhBjqERFkxFxgeom8h-h03fbiBkgurM6ase-bH6_-sIQAISECGdoi7nz2nRDNXv60TXR-wirNBiHOY0gUMFEBpKfDPXQwa7Tne4XQdScSbhGUUOWG1Iu2qhzllluG2soWeYPcTCFeQ44Do4g_uh2QyNLD1gTp7paGQPv4cq7AA47ieGuTyPXq9DN9EXqTlhOrsmj65fEjXfPyuktVBWGvar_7_Sv4lLzyRklXr_Y0aBw77oo2Hmo78HiMuP9PhQaQXoNX7E3jMmSP6zZ58kyyxDZfkRg663YyjoszLFX3QFCEhqe9LykiZeVp_dUA - _ftn50. Par exemple, dans un dossier, portant sur l’ingestion d’un médicament sur ordonnance, comme en l’espèce, si le risque d’un effet secondaire particulier est très rare, il peut être nécessaire d’évaluer s’il existe une relation de cause à effet entre le risque d’un effet secondaire particulier et le préjudice subi, en considérant l’historique médical de l’usager et les autres facteurs qui pourraient expliquer son état.
[94] La causalité peut être établie par présomptions de fait. Le cas échéant, le tribunal ne doit prendre en compte que celles qui sont graves, précises et concordanteshttp://citoyens.soquij.qc.ca/php/decision.php?ID=0D01542C4859DE170E30E2E1D760CF3A&captchaToken=03AGdBq24HPSQxKwqL-88YA-Q36dpCqdbL2S3KglzgpKt-E2GvgQ2egpP6NcepCN3wApdd3pJjMpV9V0Rhhi60b4RL4O_7A-WPyeydFBomiDdAmRiDl85YvrafYzTGZBgJKSPuhqwYXQNqCBFg25fp66CwuF2tU4bX2HGbVZhBjqERFkxFxgeom8h-h03fbiBkgurM6ase-bH6_-sIQAISECGdoi7nz2nRDNXv60TXR-wirNBiHOY0gUMFEBpKfDPXQwa7Tne4XQdScSbhGUUOWG1Iu2qhzllluG2soWeYPcTCFeQ44Do4g_uh2QyNLD1gTp7paGQPv4cq7AA47ieGuTyPXq9DN9EXqTlhOrsmj65fEjXfPyuktVBWGvar_7_Sv4lLzyRklXr_Y0aBw77oo2Hmo78HiMuP9PhQaQXoNX7E3jMmSP6zZ58kyyxDZfkRg663YyjoszLFX3QFCEhqe9LykiZeVp_dUA - _ftn52. Il est possible de les appliquer dans le cadre d’une action collective, de la même façon que tout autre recours civil.
[95] De telles présomptions de fait ne peuvent cependant être tirées lorsque « la preuve pointe dans des directions différentes et parfois opposées » ou que la preuve d’experts est controversée.
[96] La démonstration de ces éléments de manière prépondérante par l’usager, soit l’existence d’un danger, la preuve d’un préjudice et la preuve d’un lien de causalité, établit une présomption de responsabilité du fabricant.
[références omises]
[105] L’arrêt examine ensuite comment le fabricant peut repousser cette présomption réfragable. Il n’est pas utile de pousser ici telle analyse étant donné qu’il s’agit de moyens de défense au fond.
[106] Poursuivant son exposé, le juge Ruel souligne à quel point l’obligation d’information du fabricant pharmaceutique peut varier en intensité selon les variables du cas d’espèce :
[103] Dans une affaire de responsabilité civile extracontractuelle du fabricant pharmaceutique en lien avec la sécurité des médicaments, une série de considérations contextuelles particulières ont un impact sur la preuve d’un danger, du lien de causalité, de l’existence et de l’intensité de l’obligation d’information et sur les moyens de défense spécifiques applicables, en particulier celui visant l’innovation technologiquehttp://citoyens.soquij.qc.ca/php/decision.php?ID=0D01542C4859DE170E30E2E1D760CF3A&captchaToken=03AGdBq24HPSQxKwqL-88YA-Q36dpCqdbL2S3KglzgpKt-E2GvgQ2egpP6NcepCN3wApdd3pJjMpV9V0Rhhi60b4RL4O_7A-WPyeydFBomiDdAmRiDl85YvrafYzTGZBgJKSPuhqwYXQNqCBFg25fp66CwuF2tU4bX2HGbVZhBjqERFkxFxgeom8h-h03fbiBkgurM6ase-bH6_-sIQAISECGdoi7nz2nRDNXv60TXR-wirNBiHOY0gUMFEBpKfDPXQwa7Tne4XQdScSbhGUUOWG1Iu2qhzllluG2soWeYPcTCFeQ44Do4g_uh2QyNLD1gTp7paGQPv4cq7AA47ieGuTyPXq9DN9EXqTlhOrsmj65fEjXfPyuktVBWGvar_7_Sv4lLzyRklXr_Y0aBw77oo2Hmo78HiMuP9PhQaQXoNX7E3jMmSP6zZ58kyyxDZfkRg663YyjoszLFX3QFCEhqe9LykiZeVp_dUA - _ftn61.
[104] Par ailleurs, l’obligation d’information du fabricant en matière pharmaceutique quant à la sécurité des médicaments, mise en œuvre par les dispositions du Code civil du Québec, est influencée par d’autres sources, notamment le droit fédéral encadrant le développement, l’approbation et la mise en marché de médicamentshttp://citoyens.soquij.qc.ca/php/decision.php?ID=0D01542C4859DE170E30E2E1D760CF3A&captchaToken=03AGdBq24HPSQxKwqL-88YA-Q36dpCqdbL2S3KglzgpKt-E2GvgQ2egpP6NcepCN3wApdd3pJjMpV9V0Rhhi60b4RL4O_7A-WPyeydFBomiDdAmRiDl85YvrafYzTGZBgJKSPuhqwYXQNqCBFg25fp66CwuF2tU4bX2HGbVZhBjqERFkxFxgeom8h-h03fbiBkgurM6ase-bH6_-sIQAISECGdoi7nz2nRDNXv60TXR-wirNBiHOY0gUMFEBpKfDPXQwa7Tne4XQdScSbhGUUOWG1Iu2qhzllluG2soWeYPcTCFeQ44Do4g_uh2QyNLD1gTp7paGQPv4cq7AA47ieGuTyPXq9DN9EXqTlhOrsmj65fEjXfPyuktVBWGvar_7_Sv4lLzyRklXr_Y0aBw77oo2Hmo78HiMuP9PhQaQXoNX7E3jMmSP6zZ58kyyxDZfkRg663YyjoszLFX3QFCEhqe9LykiZeVp_dUA - _ftn62 et les solutions proposées par la Cour suprême et des tribunaux d’autres juridictions canadiennes sur le devoir d’information des fabricants pharmaceutiques ou d’équipements médicaux.
[références omises et soulignements ajoutés]
[107] Cependant, en s’appuyant sur le précédent de la Cour suprême dans Hollis c. Dow Corning Corp.[73], on peut retenir que l’obligation de mise en garde peut naître bien avant le moment où des conclusions définitives sur la cause et l’effet du danger sont tirées[74].
[108] Plutôt, chaque risque ou danger grave d’un médicament doit être divulgué, sans égard au degré de probabilité de sa réalisation[75].
[109] Même après que Santé Canada ait approuvé le prospectus ou la monographie, le fabricant doit y apporter des révisions chaque fois que des mises à jour sont nécessaires[76].
[110] Par ailleurs, la Cour d’appel écarte l’application de la Loi sur la protection des consommateurs car la vente de médicaments sur ordonnance par un pharmacien ne constitue pas un contrat de consommation[77]. C’est la Code civil du Québec qu’il faut alors appliquer[78].
[111] La Cour d’appel accrédite la doctrine de l’intermédiaire compétent. Elle statue que cette doctrine trouve application dans le contexte particulier de l’acquisition de médicaments sur ordonnance[79]. Ainsi, le fabricant d’un médicament sur ordonnance se décharge de son obligation d’information s’il met en garde adéquatement les intermédiaires compétents, soit le médecin et le pharmacien[80].
[112] Le mot « adéquatement » fait appel à une analyse factuelle, contextuelle.
[113] Par ailleurs, la Cour d’appel précise que le droit commun de la responsabilité civile opère distinctement de la réglementation découlant de la Loi sur les aliments et drogues. Cependant, le respect des normes statutaires et réglementaires constitue un élément à considérer au moment de vérifier si le fabricant pharmaceutique s’est acquitté de son obligation d’information, sans que tel élément soit déterminant à lui seul[81].
C.2.5 Récapitulation
[114] L’analyse des règles spécifiques ne permet d’identifier qu’une seule pure question de droit dont il soit possible de disposer au stade de l’autorisation. Ainsi, la Loi sur la protection du consommateur ne régit pas la vente et la distribution de médicaments sur ordonnance. Si c’est le cas pour un pharmacien (dans l’affaire Abbott), c’est sûrement le cas pour un vétérinaire.
[115] Pour le reste, il est clair que le fabricant pharmaceutique est astreint à des devoirs d’information et de sécurité concernant son médicament. Cependant, l’ampleur et l’intensité de tels devoirs dépendent du contexte, ce qui requiert une analyse factuelle.
[116] Dans le cadre d’une action en responsabilité pour défaut de sécurité d’un médicament, l’usager bénéficie d’une présomption réfragable quand il démontre par preuve prépondérante :
a) que le produit comporte un danger;
b) qu’il subit un préjudice; et
c) qu’il existe un lien de causalité entre son préjudice et tel danger.
[117] Le fabricant dispose de moyens d’exonération en fonction des faits qu’il prouvera pour leur donner ouverture.
[118] Cependant, il ne suffira pas au fabricant d’établir qu’il a toujours été en règle auprès de Santé Canada. Des dangers graves peuvent exiger des fabricants des divulgations aux usagers et aux intermédiaires compétents sans attendre la réaction officielle de Santé Canada.
[119] C’est en fonction de telles règles qu’il faut maintenant vérifier si la demande d’autorisation remplit chacun des quatre critères de l’article 575 C.p.c.
D. LE RÉGIME DU DROIT COMMUN
[120] On peut, dès la présente étape, éliminer les syllogismes juridiques qui mettraient en application la Loi sur la protection du consommateur.
[121] La position de la Cour d’appel dans l’arrêt Abbott[82] (résumé à la sous-section C.2.4 ci-haut) met fin à toute controverse.
[122] Ainsi, la vente de médicaments sur ordonnance par un pharmacien ne constitue pas un contrat de consommation. Logiquement, cette solution est la même quand c’est un vétérinaire qui vend le médicament sur ordonnance pour être administré à un animal.
[123] En effet, la Loi sur les médecins vétérinaires[83] confère aux médecins vétérinaires une série d’actes exclusifs dont celui de « prescrire des médicaments pour animaux »[84].
[124] L’article 23 de la Loi ajoute que tout médecin vétérinaire peut utiliser, administrer et vendre des médicaments utilisés pour soigner des animaux.
[125] Il en résulte que seul le régime de responsabilité civile du droit commun, édicté par le Code civil du Québec, peut régir la présente action collective, si autorisée.
[126] On verra que l’application de la Loi sur la protection du consommateur aurait pu, notamment :
· priver le fabricant et le commerçant de la possibilité d’exclure leur responsabilité en démontrant qu’ils ignoraient le vice ou le défaut du bien (article 53);
· procurer au consommateur le droit de réclamer des dommages punitifs (article 272).
[127] L’action collective doit donc pouvoir s’appuyer sur le droit commun édicté par le Code civil du Québec.
[128] Il ne vaut donc pas la peine de réfuter l’argument d’Intervet que la Cour supérieure du Québec serait incapable de connaître et d’appliquer correctement la common law des autres juridictions du Canada.
E. LA COMPÉTENCE INTERNATIONALE DE LA COUR SUPÉRIEURE
[129] Ici, la question concrète se pose de savoir, dans l’hypothèse où l’action collective serait autorisée, si la Cour supérieure aurait compétence sur un groupe de membres résidant au Québec seulement ( « groupe québécois » ) ou, tel que le réclament les demanderesses, sur un groupe de membres résidant au Canada ( « groupe pan-canadien » ).
[130] La réponse à cette question se trouve nécessairement au titre du Code civil du Québec traitant de la compétence internationale des autorités du Québec (articles 3134 à 3154)[85].
[131] La règle particulière de l’article 3149 C.c.Q. est inapplicable, car nous ne sommes pas ici en présence d’un contrat de consommation (ou d’un contrat de travail).
[132] Les demanderesses cherchent à instituer une action personnelle à caractère patrimonial. Il faut donc vérifier l’application des critères particuliers de l’article 3148 C.c.Q. ou, à titre supplétif, l’application de la règle générale de l’article 3134 C.c.Q. :
Art. 3148. Dans les actions personnelles à caractère patrimonial, les autorités québécoises sont compétentes dans les cas suivants : 1° Le défendeur a son domicile ou sa résidence au Québec; 2° Le défendeur est une personne morale qui n’est pas domiciliée au Québec mais y a un établissement et la contestation est relative à son activité au Québec; 3° Une faute a été commise au Québec, un préjudice y a été subi, un fait dommageable s’y est produit ou l’une des obligations découlant d’un contrat devait y être exécutée; 4° Les parties, par convention, leur ont soumis les litiges nés ou à naître entre elles à l’occasion d’un rapport de droit déterminé; 5° Le défendeur a reconnu leur compétence. Cependant, les autorités québécoises ne sont pas compétentes lorsque les parties ont choisi, par convention, de soumettre les litiges nés ou à naître entre elles, à propos d’un rapport juridique déterminé, à une autorité étrangère ou à un arbitre, à moins que le défendeur n’ait reconnu la compétence des autorités québécoises. |
Art. 3148. In personal actions of a patrimonial nature, Québec authorities have jurisdiction in the following cases:
(1) the defendant has his domicile or his residence in Québec; (2) the defendant is a legal person, is not domiciled in Québec but has an establishment in Québec, and the dispute relates to its activities in Québec; (3) a fault was committed in Québec, injury was suffered in Québec, an injurious act or omission occurred in Québec or one of the obligations arising from a contract was to be performed in Québec;
(4) the parties have by agreement submitted to them the present or future disputes between themselves arising out of a specific legal relationship;
(5) the defendant has submitted to their jurisdiction.
However, Québec authorities have no jurisdiction where the parties have chosen by agreement to submit the present or future disputes between themselves relating to a specific legal relationship to a foreign authority or to an arbitrator, unless the defendant submits to the jurisdiction of the Québec authorities. |
Art. 3134. En l’absence de disposition particulière, les autorités du Québec sont compétentes lorsque le défendeur a son domicile au Québec. |
Art. 3134. In the absence of any special provision, Québec authorities have jurisdiction when the defendant is domiciled in Québec. |
[133] Il est concédé[86] qu’Intervet Canada a son siège social à Kirkland, au Québec[87]. Toute personne, où qu’elle réside, peut venir la poursuivre devant les tribunaux québécois.
[134] Cette réponse s’impose tant en vertu du paragraphe 3148 (1o) que de l’article 3134 C.c.Q.
[135] Il est parfaitement logique qu’une personne résidant au Canada mais hors du Québec s’adresse aux tribunaux québécois pour réclamer indemnisation pécuniaire d’une personne morale dont le siège social est situé au Québec.
[136] Cette même logique s’applique à une action collective et aux membres englobés dans le groupe.
[137] Intervet Autriche est une personne morale constituée en Autriche, où elle a son siège social[88]. Cependant, Intervet Autriche n’a aucun établissement au Québec, de sorte que le paragraphe 3148 (2o) C.c.Q. ne s’applique pas.
[138] Par contre, le paragraphe 3148 (3o) C.c.Q. trouve application : la demande d’autorisation allègue que les manquements reprochés au fabricant du Bravecto (manquement au devoir général de prudence, manquement au devoir d’information, fausses représentations, fausse publicité, dissimulation d’information) ont occasionné un fait dommageable (le décès du chien Snoopy, les ennuis de santé du chien Willy) au Québec. De la sorte, les demanderesses ont subi au Québec un préjudice pécuniaire en tant que propriétaires des chiens.
[139] Cependant, le paragraphe 3148 (3o) C.c.Q. ne trouve pas application quant aux propriétaires de chiens résidant ailleurs qu’au Québec. Quant à ceux-ci, le fait dommageable ne s’est pas produit au Québec et leur préjudice n’y a pas été subi.
[140] La Cour supérieure du Québec est compétente pour se saisir d’une action en dommages-intérêts dirigée contre Intervet Autriche, mais uniquement quant aux membres résidant au Québec.
[141] Il en résulte qu’une action collective ne pourrait être autorisée envers Intervet Autriche que pour un groupe québécois. Intervet Autriche se dit d’accord avec cette détermination[89].
[142] L’article 3128 C.c.Q. n’est d’aucun secours aux demanderesses à ce stade de l’analyse, car cette disposition traite du droit substantiel applicable (par le tribunal compétent) à la responsabilité du fabricant d’un bien meuble (tel un médicament), mais ne fait pas partie de celles permettant de vérifier la compétence du tribunal.
[143] À titre d’argument subsidiaire, les demanderesses ont convenu qu’il serait inapproprié que la même action collective concerne à la fois un groupe pan-canadien (contre Intervet Canada) et un groupe québécois (contre Intervet Autriche).
[144] En tel cas, les demanderesses demandent que l’action collective soit autorisée contre les deux défenderesses, mais pour un groupe québécois uniquement.
[145] En conséquence, le Tribunal vérifiera ci-après si l’action collective peut être autorisée quant à un groupe constitué uniquement de propriétaires de chiens résidant au Québec.
F. LE CRITÈRE DU PARAGRAPHE 575 (2O) C.P.C. : L’APPARENCE DE DROIT
[146] Il faut se placer le 1er juin 2015, quand un comprimé de Bravecto a été ingéré par le chien Willy; puis le 7 septembre 2018, quand un autre comprimé de Bravecto a été administré à Snoopy.
[147] Les demanderesses affirment qu’on ne leur a rien divulgué, à l’époque, quant à certains risques d’effets secondaires indésirables qui se sont éventuellement manifestés chez leur chien respectif.
[148] Elles prétendent qu’Intervet savait alors que l’agent actif du Bravecto, le fluralaner, pouvait avoir des effets indésirables non dénoncés dans le prospectus accompagnant l’autorisation de Santé Canada prenant effet le 2 juillet 2014.
F.1 Le cas de Willy
[149] Avant le 1er juin 2015, d’après la demande d’autorisation et ses pièces, il n’y avait que l’étude de DuPont Pharmaceuticals publiée en juillet 1998. Cette étude s’inquiétait des effets anticoagulants des dérivés isoxazolines (famille de molécules dont le fluralaner fait partie).
[150] Cependant, le dossier tel que présentement constitué ne permet d’établir aucun lien logique entre la problématique étudiée par DuPont (les effets anticoagulants des isoxazolines) et les ennuis de santé éprouvés par le chien Willy (problèmes de peau et de poils).
[151] Il faut consulter le dossier vétérinaire de Willy, tout d’abord à la Clinique vétérinaire Vimont[90], puis à la Clinique vétérinaire DMV (de Lachine)[91], pour constater les efforts que déploient différents vétérinaires pour identifier l’étiologie des problèmes dermatologiques du chien, de façon à dispenser un traitement efficace.
[152] Le Bravecto est prescrit le 29 mai 2015 pour être administré le 1er juin 2015 (puis le 1er août 2015)[92]. Les consultations des 21 juin et 25 juin 2015 sont en lien avec une infection des yeux[93].
[153] La première mention d’un problème dermatologique survient lors de la consultation du 14 juillet 2015[94].
[154] Quand les vétérinaires de la Clinique DMV prennent charge, le 16 juillet 2015, ils suivent la situation de près, prescrivent des onguents, sans rien noter quant à la deuxième dose de Bravecto, prévue pour le 1er août 2015[95].
[155] Le 16 septembre 2015, la Dre Haltrecht note : « Willy is very sensitive to medications, vomiting and diarrhea from heartworm and bravecto » (donc, deux médicaments semblent suspectés).
[156] Le 29 août 2015, le vétérinaire discute de la possibilité que Willy ait été contaminé par une crème aux estrogènes qu’utilise personnellement Mme Olenitch, ou encore soit victime de possibles allergies alimentaires ou environnementales[96].
[157] Le 13 décembre 2017, Mme Olenitch informe le vétérinaire qu’elle a recouru à la de la médecine alternative (traitements homéopathiques) pour détoxifier le foie de Willy[97].
[158] Ce n’est que le 4 avril 2018 que la Dre Pagé, pour la première fois, relate l’opinion de Mme Olenitch qu’il y aurait un lien entre le Bravecto et l’alopécie de Willy[98]. De fait, Mme Olenitch a, le 21 novembre 2017, transmis une déclaration de pharmacovigilance à Santé Canada[99].
[159] Le dossier vétérinaire reproduit un courriel adressé par Mme Olenitch à Dre Pagé le 21 mai 2018[100] . Mme Olenitch cite une certaine Dre Liu qui aurait attribué l’alopécie à un désordre endocrinien.
[160] Dans ce courriel, Mme Olenitch écrit :
Je dois vous rassurer que je ne cherche plus à établir un lien avec Bravecto (pour moi il est clair que ce produit ait joué un rôle dans les problèmes de santé de Willy et qu’aucun de mes chiens ne recevra plus jamais un produit antiparasitaire chimique)…[101]
[soulignement ajouté]
[161] Willy est soumis à une réévaluation de son état général le 27 juin 2018 puis le 25 septembre 2018[102]. Les vétérinaires ne notent rien qui soit en lien avec le Bravecto, sauf mention d’un test en laboratoire américain en août 2018 qui aurait décelé un syndrome thyroïdien[103].
[162] Ce qui importe à ce point, c’est que l’analyse des dossiers vétérinaires n’établit aucun lien avec les effets anticoagulants des isoxazolines, rapportés par DuPont en 1998.
[163] Par ailleurs, les allégations et les pièces ne permettent pas plus de soutenir que la simple existence de l’étude de DuPont aurait dû mener dès 1999 au bannissement de tous les dérivés isoxazolines des médicaments vétérinaires.
[164] Il aurait fallu au moins alléguer que Santé Canada, la FDA et l’EMA ont été bernées quand elles ont autorisé la mise en marché du Bravecto sur leurs territoires respectifs.
[165] Le cas individuel de Willy ne remplit pas les critères du paragraphe 575 (2o) C.p.c..
F.2 Le cas de Snoopy
[166] Le 7 septembre 2018, l’alerte avait déjà retenti à l’EMA en Europe et à la FDA aux États-Unis. Ces agences prévenaient que les systèmes de pharmacovigilance relevaient des incidences préoccupantes de troubles neurologiques, troubles dermatologiques et maladies du sang[104].
[167] On peut inférer qu’Intervet était au courant des préoccupations de la FDA au moins quelques semaines avant que celle-ci diffuse son bulletin d’alerte du 20 septembre 2018[105].
[168] Il incombera au juge du fond de déterminer à partir de quand précisément Intervet était tenue de satisfaire à son devoir d’information auprès des consommateurs canadiens ou québécois du Bravecto.
[169] Intervet soulève que les nécropsies de Snoopy étaient non concluantes quant à un lien de cause à effet entre l’ingestion de Bravecto et le décès du chien le lendemain. Par contre, le dossier comporte une lettre de la vétérinaire Dodds qui établit ce lien catégoriquement[106].
[170] Il se peut qu’à une étape ultérieure du dossier, les qualifications d’experte de la Dre Dodds soient mises en doute. En effet, la revue scientifique Veterinary Medecine and Science a publié en juin 2020 un article mettant en garde contre la toxicité des parasiticides isoxazolines dont la Dre Dodds est co-autrice avec d’autres, dont Mme Valerie Palmieri[107].
[171] Or, le dossier indique l’institution en 2019, devant la New Jersey District Court, d’une action collective parallèle contre Intervet concernant le Bravecto[108]. La demanderesse est Valerie Palmieri.
[172] On peut anticiper que la Dre Dodds aura fort à faire pour établir son objectivité, son impartialité et sa rigueur dans la présente action collective[109].
[173] Cependant, il n’incombe aucunement au juge d’autorisation d’aborder cette problématique, qui relève du juge du fond.
[174] Au présent stade, il faut se limiter à constater que les allégations de la demande d’autorisation (complétées par les pièces) établissent l’existence d’une cause défendable en vue de prouver :
a) que le Bravecto comporte un danger;
b) que la propriétaire de Snoopy a subi un préjudice;
c) qu’il existe un lien de causalité entre le danger et le préjudice.
[175] Le cas de Snoopy remplit les critères du paragraphe 575 (2o) C.p.c.
G. LE CRITÈRE DU PARAGRAPHE 575 (1O) C.P.C. : DES QUESTIONS COMMUNES
[176] Intervet plaide :
· que les demanderesses ne parviennent pas à identifier des questions de droit ou de fait identiques, similaires ou connexes qui concernent l’ensemble des membres du groupe;
· que chaque cas est un cas d’espèce, de sorte que les questions individuelles prédominent au point de rendre insignifiants la solution de quelque question commune.
[177] C’est ainsi qu’Intervet conteste la demande formulée durant l’audience du 24 septembre 2020, alors que les demanderesses veulent énoncer plus précisément le genre de troubles que le Bravecto aurait occasionnés aux chiens concernés. Jusque-là, Intervet pouvait garder espoir que ses moyens de contestation ci-haut soient retenus.
[178] Le Tribunal rejette l’objection d’Intervet et autorise la modification réclamée, quitte à raffiner la description du groupe plus loin dans ce jugement.
[179] Un lien logique et cohérent est approprié avec la mise à jour le 2 novembre 2018 par Santé Canada du prospectus, dont l’ajout est reproduit ici pour la commodité du lecteur :
Les réactions indésirables suivantes ont été signalées rarement (signalés chez au moins 1, mais pas plus de 10 animaux sur 10 000 animaux exposés) et très rarement (signalées chez moins de 1 sur 10 000 animaux exposés) et sont regroupées par système de l’organisme, par ordre décroissant de fréquent :
Troubles du tractus digestif : vomissements, diarrhée, hypersalivation, diarrhée hémorragique
Troubles systémiques : manque d’efficacité soupçonné, léthargie, anorexie
Troubles de la peau et annexes : prurit, alopécie
Troubles neurologiques : convulsions, ataxie, tremblements musculaires[110]
[180] L’arrêt Abbott[111] permet l’identification de questions communes à l’ensemble des membres, pour lesquelles les réponses du juge du fond jouerait vraisemblablement un rôle non négligeable quant au sort du litige.
[181] Ces questions communes concernent l’application des articles 1457, 1468 et 1469 C.c.Q. au comportement d’Intervet, qui aurait tardé indûment à mettre en garde contre certains effets secondaires indésirables du Bravecto.
[182] Le critère du paragraphe 575 (1o) C.p.c. est rempli.
H. LE CRITÈRE DU PARAGRAPHE 575 (3O) C.P.C. : L’EXISTENCE D’UN GROUPE
[183] Intervet plaide que la demande d’autorisation faillit à démontrer l’existence d’un groupe de propriétaires québécois de chiens, qui rendrait difficile ou peu pratique l’application des règles sur le mandat d’ester ne justice pour le compte d’autrui ou sur la jonction d’instance.
[184] Selon Intervet, Snoopy serait le seul chien à avoir éprouvé des hémorragies internes. Il n’y aurait, au Canada, que six propriétaires ayant prétendu que le Bravecto aurait causé à leur chien des problèmes de nature dermatologique[112].
[185] Intervet cherche à morceler le groupe proposé en une constellation de sous-groupes, un par diagnostic vétérinaire distinct.
[186] Le Tribunal n’est pas d’accord.
[187] Encore une fois, les questions communes portent sur des allégations qu’Intervet aurait dissimulé sa connaissance d’effets secondaires indésirables, susceptibles de causer à des chiens des préjudices variés, du moins selon la mise en garde du 2 novembre 2018 par Santé Canada.
[188] Pour les fins de l’autorisation de l’action collective, ce n’est pas une distinction pertinente que certains chiens aient subi des troubles digestifs et d’autres des troubles neurologiques (par exemple).
[189] Le groupe ne doit pas être restreint aux propriétaires de chiens qui seraient morts en lien avec l’ingestion de Bravecto. Intervet a raison que la mort n’est pas une maladie mais un des résultats d’une maladie.
[190] Les demanderesses ont déployé des efforts plus que suffisants pour vérifier qu’il existe au Québec d’autres propriétaires de chiens déplorant les effets indésirables du Bravecto. Les tableaux Excel confectionnés par Mme Olenitch[113] constituent à ce stade, une preuve suffisante à cet effet.
[191] Vraisemblablement, il existe au Québec d’autres membres qui ne sont pas au courant des présentes procédures judiciaires et qui ne sont pas identifiés auprès des demanderesses et de leurs avocats. On ne peut imaginer que Mmes Olenitch et Gagnon les auraient déjà identifiés tous.
[192] Il n’est pas obligatoire que le nombre des membres du groupe envisagé se chiffre par milliers[114].
[193] Le critère du paragraphe 575 (3o) C.p.c. est rempli.
I. LE CRITÈRE DU PARAGRAPHE 575 (4O) C.P.C. : LA CAPACITÉ DE MME GAGNON DE REPRÉSENTER LES MEMBRES
[194] Mme Olenitch ne parvient pas à démontrer qu’elle détient un recours personnel contre Intervet. N’étant pas membre du groupe, elle ne peut agir comme représentante des membres du groupe[115].
[195] Il en est autrement de Mme Gagnon.
[196] Depuis l’ouverture de ce dossier, Mme Gagnon a manifesté son militantisme en vue d’obtenir une condamnation contre Intervet et sa détermination à recruter le plus grand nombre de membres concernés.
[197] On ne soulève rien qui la disqualifierait en tant que représentante capable d’observer le déroulement de l’instance et à assurer la liaison entre les membres et les avocats du groupe.
[198] Le critère du paragraphe 575 (4o) C.p.c. est rempli quant à Mme Gagnon (mais pas quant à Mme Olenitch).
J. DESCRIPTION DU GROUPE
[199] Tel que déjà indiqué, il y a lieu de retenir une description du groupe formé :
· de propriétaires de chiens;
· de résidants du Québec; et
· dont le chien a ingéré un ou plus comprimé(s) de Bravecto par voie orale.
[200] Pour permettre à un propriétaire de chien de vérifier objectivement s’il fait partie du groupe des membres ou non, il est approprié de préciser le type de problème de santé qu’aurait subi le chien, en lien direct avec l’avis donné le 2 novembre 2018 par Santé Canada. Cet avis énumère les conditions affectant les chiens qui n’avaient pas, jusque-là, fait l’objet d’une mise en garde publique par Intervet.
[201] Selon la théorie de la cause dont la démonstration a été validée ci-haut, il y a lieu de fixer deux limites temporelles[116], soit :
· le début au 16 février 2017, date du bulletin de pharmacovigilance de l’EMA[117], constituant la première indication alléguée des effets indésirables éventuellement retenus par Santé Canada; et
· la fin au 2 novembre 2018, date de la mise à jour par Santé Canada, date au-delà de laquelle le défaut d’information allégué ne saurait persister.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[202] ACCUEILLE en partie la demande pour autorisation d’exercer une action collective et pour attribuer le statut de représentante;
[203] AUTORISE l’exercice de l’action collective ci-après décrite :
Une action collective en dommages-intérêts pour responsabilité civile pharmaceutique.
[204] REJETTE la demande d’attribuer à Alla Olenitch le statut de représentante des membres;
[205] ATTRIBUE à Jessica Gagnon le statut de représentante aux fins d’exercer l’action collective envisagée pour le compte du groupe de personnes ci-après décrit :
Toute personne résidant au Québec ayant administré à son chien, entre le 16 février 2017 et le 2 novembre 2018, un comprimé oral du médicament Bravecto (dose entre 112,5 mg et 1400 mg) et dont le chien a ensuite développé l’une des conditions suivantes :
· troubles du tractus digestif : vomissements, diarrhée, hypersalivation, diarrhée hémorragique;
· troubles systémiques : manque d’efficacité soupçonné, léthargie, anorexie;
· troubles de la peau et annexes : prurit, alopécie;
· troubles neurologiques, convulsions, ataxie, tremblements musculaires.
[206] IDENTIFIE comme suit les principales questions de faits et de droit qui seront traitées collectivement :
1. les défenderesses ont-elles commis de nombreuses fautes notamment :
a) des manquements au devoir général de ne pas causer de préjudice à autrui (art. 1457 C.c.Q.)?
b) des manquements au devoir d’information du fabricant et du distributeur notamment par fausses représentations, par publicité trompeuse et par dissimulation d’information (arts. 1468, 1469 et 1473 C.c.Q.)?
2. les membres ont-ils subi un préjudice indemnisable?
3. si oui, y a-t-il lieu à recouvrement collectif, à recouvrement individuel ou une combinaison des deux?
[207] IDENTIFIE comme suit les conclusions recherchées qui s’y rattachent :
a) ACCUEILLIR la requête introductive d’instance des requérantes;
b) CONDAMNER les intimées à verser des dommages-intérêts aux membres, incluant les intérêts et l’indemnité additionnelle;
c) ORDONNER le recouvrement collectif des dommages-intérêts ou, subsidiairement, leur recouvrement individuel;
d) LE TOUT avec frais de justice incluant les frais pour les pièces, les expertises, les experts et leurs témoignages et les frais de publication d’avis.
[208] DÉCLARE qu’à moins d’exclusion, les membres seront liés par tout jugement à intervenir sur l’action collective de la manière prévue par la Loi;
[209] RÉSERVE à un jugement ultérieur l’approbation des avis aux membres et du plan de dissémination des avis, ainsi que la fixation du délai d’exclusion, jugement à être rendu après une audience qui sera convoquée diligemment;
[210] RÉFÈRE le dossier au juge en chef pour détermination du district dans lequel l’action collective devra être exercée;
[211] LE TOUT, frais de justice à suivre.
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__________________________________ PIERRE-C. GAGNON, j.c.s. |
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Me Paule Lafontaine Me Robert Eidinger |
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EIDINGER & ASSOCIÉS |
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Avocats pour les demanderesses |
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Me Claude Marseille Me Ariane Bisaillon |
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BLAKES, CASSELS & GRAYDON |
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Avocats pour les défenderesses
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Dates d’audience : |
24 et 25 septembre 2020 |
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[1] Intervet est une division de Merck et utilise aussi la raison sociale Merck Santé animale (pièce R-3).
[2] Courriel de Me Marseille versé au dossier.
[3] La pièce R-43 a été produite à l’audience du 24 septembre 2020.
[4] Pièce R-4.
[5] Pièce R-5.
[6] Pièce R-6.
[7] Pièce R-7.
[8] Pièce R-9.
[9] Pièces R-18 et R-19.
[10] Pièce R-22.
[11] Pièces R-24 et R-24A.
[12] Pièce R-24A.
[13] Pièce R-26.
[14] Pièce R-25.
[15] Pièce R-27.
[16] Pièce R-29.
[17] Pièce R-30.
[18] Pièce R-31.
[19] Pièce R-38. Une sous-liste (pièce R-39) retient quelque 137 déclarations qui mentionnent (entre autres) un désordre dermatologique chez des chiens.
[20] Pièces R-40 et R-41.
[21] Pièce R-42 (clé USB).
[22] Infineon Technologies AG c. Option Consommateurs, 2013 CSC 59 (l’ « arrêt Infineon » ); Vivendi Canada inc. c. Dell’Aniello, 2014 CSC 1 (l’ « arrêt Vivendi » ).
[23] Asselin c. Desjardins Cabinet de services financiers inc., 2017 QCCA 1673.
[24] Arrêt Infineon, préc., note 22; D’Amico c. Procureure générale du Québec, 2019 QCCA 1922 (l’ « arrêt D’Amico » ).
[25] Arrêt Vivendi, préc., note 22.
[26] Baratto c. Merck Canada inc., 2018 QCCA 1240.
[27] Option Consommateurs c. Merck Co. Inc., 2013 QCCA 57.
[28] Arrêt D’Amico, préc., note 22.
[29] L’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal c. J.J., 2019 CSC 35; motifs du juge Brown au nom de la majorité (l’ « arrêt L’Oratoire Saint-Joseph » ).
[30] Idem, par. 24.
[31] Idem, par. 56.
[32] 2020 CSC 30 ( l’ « arrêt Asselin » ).
[33] 2020 QCCA 129 (« arrêt Godin » ).
[34] Arrêt Asselin, préc., note 32.
[35] Arrêt Vivendi, préc., note 22; arrêt Infineon, préc, note 22.
[36] Arrêt L’Oratoire Saint-Joseph, préc., note 29.
[37] Idem.
[38] Lorrain c. Pétro-Canada, J.E. 2013-416 (C.A.).
[39] Nadeau c. Mercedes-Benz Canada inc., 2017 QCCA 470.
[40] Champagne c. Subaru Canada inc., 2018 QCCA 1554.
[41] Written Representations (18 septembre 2020), par. 168.
[42] Préc., note 32.
[43] Préc., note 33.
[44] D.-C. LAMONTAGNE, Droit de la vente, 4e édition, Éditions Yvon Blais, 2019, par. 265-268.
[45] Idem, par. 267, p. 184-185.
[46] Idem, par. 268, p. 185-186.
[47] T. LEROUX et M. GIROUX, La protection du public et les médicaments : les obligations du fabricant, (1993) 24 R.G.D. 310.
[48] L.R.C. (1985) c. F-27.
[49] LEROUX et GIROUX, préc., note 47, p. 312.
[50] Idem, p. 317.
[51] Idem, p. 318.
[52] Idem, p. 324.
[53] C.R.C., c. 870.
[54] LEROUX et GIROUX, préc., note 47, p. 335. L’arrêt Abbott de 2019 tranche cette question.
[55] M. GAGNÉ et M. BOURASSA FORCIER, Précis de droit pharmaceutique, 2e édition, Éditions Yvon Blais, 2017.
[56] Idem, p. 266-268.
[57] Idem, p. 285.
[58] Idem, p. 285.
[59] Idem, p. 287.
[60] Idem, p. 289
[61] Idem, p. 289.
[62] Idem, p. 314-315.
[63] Idem, p. 317.
[64] Idem, p. 318.
[65] Idem, p. 318-319.
[66] Idem, p. 321-322.
[67] Idem, p. 326-328. L’arrêt Abbott tranche cette question.
[68] [1985] 1 RCS 241.
[69] [1997] R.R.A. 17 (C.A.).
[70] Brousseau c. Laboratoires Abbott limitée, 2019 QCCA 801 (l’ « arrêt Abbott » ). Ce jugement cite avec approbation la monographie de Gagné et Bourassa Forcier.
[71] J. CAVALANCIA et J. GIRARD, « Développements jurisprudentiels récents en droit de l’action collective », Colloque national (2020) sur l’action collective, Éditions Yvon Blais, 2020, p. 135-138.
[72] Imperial Tobacco Canada ltée c. Conseil québécois sur le tabac et la santé, 2019 QCCA 358.
[73] [1995] 4 RCS 634.
[74] Arrêt Abbott, préc. note 70, par. 123.
[75] Idem, par. 127.
[76] Idem, par. 143.
[77] Idem, par. 17, 55-66.
[78] Idem, par. 71.
[79] Idem, par. 15 et 163.
[80] Idem, par. 164.
[81] Idem, par. 156-160.
[82] Préc., note 70.
[83] RLRQ, c. M-8.
[84] Idem, article 7.
[85] Spar Aerospace ltée c. American Mobile Satellite Corp., 2002 CSC 78.
[86] Written Representations, par. 272.
[87] Pièce R-3.
[88] Pièce D-3, telle qu’autorisée par le jugement du 6 novembre 2019 dans le présent dossier, 2019 QCCS 4651.
[89] Written Representations, par. 273.
[90] Pièce R-9.
[91] Pièce R-10.
[92] Pièce R-9, p. 10/15.
[93] Idem, p. 11/15 et 12/15.
[94] Idem, p. 13/15 et 14/15.
[95] Pièce R-10, p. 1/23.
[96] Idem, p. 5/23.
[97] Idem, p. 11/23.
[98] Idem, p. 13/23.
[99] Pièce R-22.
[100] Pièce R-10, p. 14/23.
[101] Idem, p. 15/23.
[102] Idem, p. 16/23 à 19/23 et 21/23 à 23/23.
[103] Idem, p. 21/23.
[104] Le Tribunal ignore en quoi consistent les « mediatric reactions » rapportées par l’EMA à son bulletin R-24A.
[105] Pièce R-27.
[106] Pièce R-7.
[107] Pièce P-43.
[108] Pièce R-37.
[109] Article 22 C.p.c.
[110] Pièce R-29.
[111] Préc., note 70.
[112] Pièce R-40.
[113] Pièces R-40 et R-41.
[114] Arrêt Godin, préc., note 33, par. 128.
[115] Option consommateurs c. Fédération des caisses Desjardins du Québec, 2010 QCCA 1416.
[116] Abicidan c. Bell Canada, 2017 QCCS 1198; Ouellet c. Lasik M.D. inc., 2020 QCCS 3863.
[117] Pièces R-24 et R-24A.
AVIS :
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