9118-1016 Québec inc. |
2021 QCTAT 1461 |
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L’APERÇU
[1] Le Tribunal est saisi de plusieurs contestations provenant de différentes régions. Comme toutes ces contestations soulèvent la même question, elles ont été regroupées par une ordonnance rendue le 21 janvier 2020[1]. Il s’agit de déterminer si un chauffeur de taxi lié par contrat au titulaire du permis de propriétaire de taxi est un travailleur à l’emploi de ce dernier. Certains dossiers[2] ont été ajoutés à ce regroupement, comme le permettait l’ordonnance.
[2] Trois propriétaires de permis de taxi sont visés par les décisions contestées et ont été identifiés par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail, la Commission, comme des employeurs : 9118-1016 Québec inc.[3], ci-après, 9118, dont le président est monsieur Jean Moukhtar, monsieur Mohamed Menasria et Transport G.H., dont le propriétaire est monsieur Awadis Jerjian. Pour faciliter la compréhension, les prétendus employeurs seront identifiés comme les propriétaires. Ils sont tous représentés par le même représentant, Me Éric Dugal, désigné comme le représentant des propriétaires.
[3] Pour chacun des propriétaires, la Commission a déterminé qu’une personne devait être considérée comme un travailleur à leur emploi, soit respectivement : monsieur Akram Jawhar, monsieur Farid Boucenna et monsieur Marwan Abou-Samra. Ces personnes seront identifiées comme étant les chauffeurs. Aucun n’est présent à l’audience. Par contre, la Commission y est représentée.
[4] Les litiges portent soit sur la cotisation[4] exigée par la Commission concernant un salaire versé au chauffeur, soit sur la classification[5] des activités exercées par les propriétaires, soit sur l’admissibilité d’une lésion professionnelle reconnue par la Commission[6], soit sur un relevé de prestations accordé[7]. Dans trois dossiers[8], le Tribunal doit aussi se prononcer sur une question préliminaire, car la Commission a conclu que la demande de révision a été produite hors délai et qu’aucun motif raisonnable n’a été démontré permettant de relever la partie de ce défaut.
[5] Aux époques pertinentes, chaque propriétaire est membre d’une coopérative de taxis, la Coop, qui constitue un intermédiaire en services de transport de taxi. Pour devenir membres, ils ont payé des parts sociales et pour le demeurer, ils paient chacun une mensualité qui leur permet également l’accès à la répartition des courses de taxi. Chaque automobile est munie d’un équipement fourni par l’intermédiaire au propriétaire qui inclut un taximètre, un dôme, et un système de répartition par GPS.
[6] Chaque propriétaire est lié au chauffeur par contrat plus ou moins élaboré qu’il qualifie de location de l’automobile équipée et dont les termes seront analysés ultérieurement. Moyennant un montant fixe journalier ou hebdomadaire payé directement au propriétaire, le chauffeur peut utiliser l’automobile, comme seul conducteur, en la gardant en bon état et en assumant le coût du carburant, du lave-vitre et du nettoyage.
[7] Le représentant des propriétaires prétend que ses clients sont locateurs et qu’en conséquence, les chauffeurs ne peuvent être qualifiés de travailleurs au sens de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[9], la LATMP. Il argumente que la Loi concernant les services de transport par taxi[10], la LSTT, en vigueur aux époques pertinentes, offre deux possibilités : le contrat de location ou le contrat de travail et que tous les propriétaires ont opté pour la première. Il prétend que la LSTT s’applique de manière exclusive, que la Commission n’avait pas juridiction pour appliquer la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et qu’il en est de même pour le Tribunal. Pour soutenir sa prétention que le lien contractuel ne peut constituer un lien d’emploi, il soulève aussi une expectative raisonnable des propriétaires quant à la portée de leur engagement. Subsidiairement, il fait valoir une évolution dans la politique de la Commission entre 2016 et 2020. Il n’a aucune autre prétention à faire valoir quant aux autres aspects des contestations.
[8] Pour sa part, le représentant de la Commission plaide que les chauffeurs sont des travailleurs au sens de la LATMP puisqu’ils offrent une prestation, contre une rémunération, laquelle doit être interprétée largement de manière à prendre des formes diverses, et qu’il existe une subordination juridique entre eux et les propriétaires. Enfin, il plaide subsidiairement que les chauffeurs sont des travailleurs autonomes considérés comme des travailleurs à l’emploi des propriétaires au sens de l’article 9 de la LATMP.
[9] Mis à part les questions préliminaires relatives au délai et la question centrale dans tous les dossiers, soit le statut de travailleur des chauffeurs, les représentants ont indiqué ne pas avoir d’autres prétentions ni d’arguments. En conséquence, la décision ne comporte donc pas d’analyse spécifique quant à la classification, la cotisation, ou la reconnaissance des lésions professionnelles.
[10] Le Tribunal conclut que les chauffeurs sont des travailleurs et que les propriétaires sont des employeurs au sens de la LATMP. Voici pourquoi.
[11] Aux époques pertinentes, l’industrie du taxi est régie par la LSTT, laquelle a été abrogée le 10 octobre 2020. Cette loi prévoit trois types de permis : celui de propriétaire de taxi, celui de chauffeur de taxi et celui d’intermédiaire en services de transport par taxi.
[12] En vertu de cette loi, le propriétaire de taxi doit être titulaire d’un permis délivré par la Commission des transports du Québec. Pour obtenir ce permis, le propriétaire doit répondre à certaines conditions décrites dans la LSTT et au règlement[11] adopté en vertu de celle-ci, le RSTT. Ce titulaire d’un permis de propriétaire est réputé exercer une activité économique organisée de prestation de services à caractère commercial :
4.1. Tout titulaire de permis de propriétaire de taxi est réputé exercer une activité économique organisée de prestation de services à caractère commercial. Sont du capital affecté à l’exploitation de son entreprise, son permis de propriétaire de taxi et l’automobile qui y est attachée.
[13] Le titulaire de ce permis peut soit exploiter personnellement son automobile, s’il est aussi titulaire d’un permis de chauffeur de taxi, soit en confier l’exploitation ou la garde à un titulaire de permis de chauffeur de taxi. Il peut le faire par un contrat de location de l’automobile ou un contrat de travail prévoyant une rémunération par salaire ou par commission :
5. Un permis de propriétaire de taxi autorise son titulaire à posséder un seul taxi, une seule limousine ou une seule limousine de grand luxe et, soit à exploiter personnellement cette automobile, s’il est par ailleurs titulaire d’un permis de chauffeur de taxi, soit à en confier l’exploitation ou la garde à un titulaire de permis de chauffeur de taxi par suite d’un contrat de location ou d’un contrat de travail prévoyant une rémunération par salaire ou par commission.
[...]
[14] Le titulaire du permis de chauffeur de taxi est autorisé à exercer le métier de chauffeur de taxi en conduisant une automobile attachée à un permis de propriétaire de taxi. Le chauffeur peut avoir la garde de l’automobile en vertu d’un contrat de travail le liant à un titulaire de permis de propriétaire de taxi. Il peut aussi exploiter personnellement l’automobile s’il est lié au titulaire-propriétaire par suite d’un contrat de location de l’automobile :
24. Le permis de chauffeur de taxi autorise son titulaire à exercer le métier de chauffeur de taxi, de limousine et de limousine de grand luxe en conduisant une automobile attachée à un permis de propriétaire de taxi.
Un chauffeur peut avoir la garde de telle automobile par suite d’un contrat de travail le liant avec un titulaire de permis de propriétaire de taxi. Il peut aussi exploiter personnellement cette automobile s’il est titulaire du permis de propriétaire de taxi auquel est attachée cette automobile ou s’il est lié avec un titulaire par suite d’un contrat de location de l’automobile.
[...]
[Nos soulignements]
[15] Ces deux possibilités sont reprises dans plusieurs dispositions de la loi, notamment aux articles 48, 55 et 59 :
48. Le titulaire d’un permis de chauffeur de taxi doit conserver dans l’automobile dont il a la garde ou le contrôle une copie du contrat de travail ou de location conclu avec le titulaire de permis de propriétaire de taxi.
55. Tout chauffeur doit, sur demande d’un agent de la paix ou toute personne autorisée à agir comme inspecteur ou enquêteur, produire son permis de chauffeur de taxi, le rapport de vérification visé à l’article 51 et copie de son contrat de location ou de son contrat de travail.
59. Le titulaire d’un permis d’intermédiaire en services de transport par taxi qui réfère à un titulaire de permis de propriétaire de taxi les services d’un chauffeur doit tenir les fiches, les rapports, les dossiers et autres documents prévus par règlement. Il en est de même de tout titulaire d’un permis de propriétaire de taxi qui utilise les services d’un chauffeur par suite d’un contrat de travail ou de location.
[16] Les obligations des propriétaires, des chauffeurs et des intermédiaires font l’objet d’un chapitre dans la LSTT, les articles 48 à 59.2, et certaines dispositions du RSTT en prévoient également.
L’ANALYSE
[17] Avant d’aborder l’analyse de la question principale commune à tous les litiges à savoir si les chauffeurs sont des travailleurs à l’emploi des propriétaires, le Tribunal traitera de la question préliminaire du hors délai dans trois dossiers[12] , du moyen soulevé par le représentant des propriétaires concernant la compétence du Tribunal pour déterminer le statut des chauffeurs et de celui relié à l’expectative raisonnable ou la théorie de l’attente légitime.
Les questions préliminaires
[18] Dans les trois cas, la Commission a conclu que la demande de révision du propriétaire n’a pas été produite dans le délai prévu et qu’aucun motif raisonnable lui permettant d’être relevé de son défaut n’a été démontré.
[19] L’article 358 de la LATMP prévoit qu’une personne qui se croit lésée par une décision rendue par la Commission peut, dans les 30 jours de sa notification, en demander la révision. La notification n’est pas définie dans la LATMP, mais selon la jurisprudence, il s’agit de la date où la personne prend connaissance de la décision écrite et motivée, soit au moment où il reçoit copie de la lettre de la Commission[13].
[20] L’article 358.2 de la LATMP prévoit qu’une personne peut être relevée du défaut de respecter le délai prescrit pour un motif raisonnable. La notion de motif raisonnable n’est pas définie dans la LATMP, mais elle l’a été par la jurisprudence, notamment dans l’affaire Roy et Communauté urbaine de Montréal[14] :
Le motif raisonnable est un critère vaste dont l’interprétation pourra varier dans le temps tout comme celle de la notion du bon père de famille, de l’homme prudent et diligent. Il va sans dire, cependant, qu’il doit y avoir motif raisonnable et que le Tribunal ne saurait sanctionner la négligence d’une partie.
La notion de motif raisonnable est, selon la Commission d’appel, une notion large permettant de considérer un ensemble de facteurs susceptibles d’indiquer, à partir des faits, des démarches, des comportements, de la conjoncture, des circonstances, etc., si une personne a un motif non farfelu, crédible et qui fait preuve de bon sens, de mesure et de réflexion.
[Transcription textuelle].
[21] Dans Berthiaume et Dépanneur Clermont Giguère[15], on précise « que l'article 358.2 de la loi ne requiert pas la preuve d'une impossibilité d'agir, mais plutôt la démonstration que la demande de révision n'a pu être faite dans le délai prescrit pour un motif raisonnable ».
[22] Le motif raisonnable est donc une notion large qui nécessite d’examiner toutes les circonstances de l’affaire pour déterminer si, pour un motif raisonnable, une partie peut être relevée des conséquences de son défaut. Pour conclure à l’existence d’un motif raisonnable, les faits, les démarches, les comportements, la conjoncture et les circonstances doivent permettre de démontrer qu’une personne a un motif non farfelu, crédible et qui fait preuve de bon sens, de mesure, de réflexion et de bon jugement[16]. Le fardeau de démontrer le motif raisonnable repose sur la partie qui l’invoque.
[23] Voyons maintenant la situation dans chacun des dossiers.
705186 et 705187
[24] Le 1er août 2018, la Commission rend deux décisions concernant 9118. Par celles-ci, elle procède à une nouvelle détermination de la classification de l’employeur en ajoutant l’unité 55040 « Transport routier de passagers » pour les années 2016 et 2017 (705186) et pour l’année 2018 (705187). Le 3 octobre 2018, le représentant des propriétaires demande la révision des décisions pour ces trois années.
[25] Le dossier ne contient pas d’information précise du moment de la notification des décisions du 1er août 2018. En prenant en compte le délai postal moyen reconnu de trois à cinq jours ouvrables[17], et même en considérant un délai de cinq jours à la faveur du propriétaire, elles auraient été reçues vraisemblablement vers le 6 août, ce qui fait que la demande de révision est produite après le délai de 30 jours.
[26] Toutefois, le représentant des propriétaires prétend que plusieurs décisions rendues concernent la même question juridique, qu’une des décisions a été contestée et que lorsque la méprise a été constatée, les autres l’ont été. Le représentant de la Commission soumet plutôt que le fait de ne pas avoir contesté revient à plaider l’ignorance de la loi, ce qui ne constitue pas un motif raisonnable.
[27] Le Tribunal retient qu’un motif raisonnable permet de relever 9118 de son défaut d’avoir respecté le délai de 30 jours. Comme rappelé dans Araj et Miracle Auto inc.[18], le principe que nul n’est censé ignorer la loi, propre au droit pénal, doit être appliqué avec prudence et discernement en droit administratif. Lorsque les circonstances dans lesquels une partie est placée et le contexte particulier montrent qu’il lui était difficile de comprendre comment exercer ses droits, le Tribunal est justifié de la relever de son défaut. Le Tribunal estime que c’est le cas ici.
[28] D’abord, à plusieurs reprises, 9118, par monsieur Moukhtar ou par sa comptable, a indiqué à la Commission ne pas être d’accord que monsieur Jawhar soit considéré à son emploi. À l’audience, monsieur Moukhtar explique qu’après l’incident survenu au chauffeur le 1er juillet 2018, il parle, à plusieurs reprises, à des agents de la Commission concernant la relation entre le chauffeur et 9118. On trouve au dossier des notes qui rapportent ces échanges, entre le 11 juillet et le 17 août 2018, entre la Commission et lui ou sa comptable à propos du statut du chauffeur.
[29] De plus, l’agente d’indemnisation de la Commission dans le dossier du chauffeur Akram rapporte une conversation téléphonique du 20 août 2018 avec monsieur Moukhtar où ce dernier indique ne pas être l’employeur. Elle lui précise « qu’il peut contester l’admissibilité et le relevé d’imputation ». Le 20 août, la comptable dépose une demande de révision de la décision d’admissibilité dont les motifs mentionnent que le chauffeur loue la voiture, qu’il est un travailleur autonome et que dans des cas similaires, « le propriétaire n’était pas responsable de paye CSST pr travailleur autonome ».
[30] Par ailleurs, un avis de cotisation est émis le 18 septembre 2018, que 9118 conteste le 21 septembre 2018 par une lettre de la comptable transmise à la Commission. Elle y écrit fournir « de la documentation dont M. Moukthar vous a parlé » dont un contrat, entre 9118 et le chauffeur Akram, mentionne que celui-ci loue la voiture et demande sur quoi la Commission se base pour dire qu’il est un employé. Or, suite à cette lettre, le 28 septembre 2018, la Commission écrit à monsieur Moukhtar en indiquant avoir reçu une demande de révision de sa part d’une décision rendue le 1er août 2018. Par ailleurs, au début de la décision rendue suite à la révision administrative du 3 juillet 2019 concernant l’avis de cotisation du 18 septembre[19], la Commission indique que l’employeur en a demandé la révision le 21 septembre 2018.
[31] Le Tribunal en retient que même pour la Commission, une certaine confusion existait quant à savoir laquelle des décisions était contestée. Considérant que la question du statut du chauffeur est au cœur de toutes ces décisions et que depuis le début 9118 a fait savoir qu’elle contestait qu’il soit considéré à son emploi, compte tenu des circonstances décrites avant, le Tribunal considère recevable la demande de révision à l’égard des décisions du 1er août 2018.
707313
[32] Le 12 avril 2018, la Commission transmet à monsieur Menasria un avis de cotisation lequel contient une cotisation estimative qu’elle a déterminé pour les années 2016 et 2017. Un montant total de 4472, 49$ est réclamé avec une échéance de paiement au 20 mai 2018.
[33] Le dossier ne contient pas d’information précise du moment de la notification de la décision du 12 avril 2018. En prenant en compte le délai postal moyen reconnu de trois à cinq jours ouvrables[20], et même considérant un délai de cinq jours à la faveur du propriétaire, elle aurait vraisemblablement été reçue vers le 17 avril, ce qui fait que la demande de révision[21] est produite après le délai de 30 jours.
[34] Le représentant des propriétaires plaide que monsieur Menasria avait de la difficulté à comprendre ce qui se passait et les implications de ce qu’il devait faire. Il plaide que personne n’était au courant à la Commission. Quant à lui, le représentant de la Commission, il fait valoir que les premiers indices d’un mécontentement apparaissent le 25 juillet seulement et que monsieur Menasria est incapable de justifier le délai entre la décision d’avril et le mois de juillet où il loge un appel à la Commission.
[35] Le Tribunal estime que la preuve ne permet pas de conclure à un motif raisonnable afin de relever monsieur Menasria de son défaut.
[36] Selon le dossier, monsieur Menasria écrit à la Commission le 19 juin 2018 au « Département des masses salariales ». Dans sa lettre, il fait référence à l’avis de cotisation du 12 avril, explique le statut du chauffeur et fait état des montants de location reçus pour 2017.
[37] Dans son témoignage, il explique ensuite avoir été surpris de recevoir l’état de compte du 29 juillet 2018. Il écrit de nouveau à la Commission, à l’attention de monsieur Rousseau, en transmettant le 14 août 2018, une copie de l’état de compte en date du 29 juillet 2018 avec la mention qu’il y a erreur dans le montant réclamé. Mais ce ne sera finalement que la lettre qu’il transmet le 16 septembre intitulée « demande de révision du montant de la cotisation » que la Commission considèrera comme telle. Le 28 septembre, elle accuse réception en ce sens.
[38] Le Tribunal considère que la lettre du 19 juin 2018 constitue une demande de révision. Néanmoins, considérant la notification au 17 avril, point de départ du délai de 30 jours, le délai pour demander la révision se terminait le 17 mai. Monsieur Menasria n’a pas fourni d’explication pouvant constituer un motif raisonnable pour le délai entre le 17 mai et le 19 juin.
[39] Il témoigne qu’il n’était pas toujours facile avec son emploi de chauffeur d’autobus de retourner les appels de la Commission. Il explique, par ailleurs, qu’il avait commencé à faire des versements, dans un désir de collaboration. Par contre, il se demandait pourquoi devait-il payer?
[40] Lors de son témoignage, il ne peut dire s’il a fait des démarches entre avril et le 25 juillet. Il croit qu’il a dû faire un appel téléphonique. Toutefois, les notes du dossier ne font pas état de contact téléphonique entre monsieur Menasria et la Commission entre le 14 avril 2018 et le 25 juillet 2018.
[41] À plusieurs reprises, les tribunaux supérieurs ont rappelé que les tribunaux administratifs doivent faire preuve de souplesse et ne pas faire perdre des droits pour une question procédurale. Dans la décision Cormier c. Commission des lésions professionnelles[22], la Cour supérieure s’exprime ainsi :
[57] Il faut que les organismes administratifs cessent d’être plus rigides que les tribunaux de droit commun quant à la procédure. Rarement devant un tribunal ordinaire, un justiciable perd un droit à cause de la procédure. L’article 352 de ladite loi permet de prolonger un délai lorsqu’on a des motifs raisonnables. (…)
[42] Dans Torres c. Commission des lésions professionnelles[23], la Cour supérieure réitère que par rigorisme, on ne doit pas priver un travailleur de son droit d’être entendu. Enfin, la Cour d’appel s’est également prononcée sur le sujet dans Boissonneault c. Constructions Marquis Laflamme inc.[24] :
[28] La L.A.T.M.P., législation d’ordre public à vocation hautement sociale, doit recevoir une interprétation large et libérale, qui assure l’accomplissement de son objet et l’exécution de ses prescriptions suivant leurs véritables sens, esprit et fin. Par ailleurs, en matière de déchéance de droit, il paraît raisonnable d’interpréter les dispositions de la loi de manière à protéger les droits du justiciable. C’est le cas lorsque la législation dont il s’agit en est une, comme en l’espèce, à vocation sociale.
[43] Néanmoins, cette souplesse ne doit pas avoir pour effet d’éluder les délais contenus dans la LATMP ni l’encadrement juridique qu’elle prévoit. Le délai de l’article 358 est prévu et le moyen d’être relevé du défaut de le respecter impose la démonstration d’un motif raisonnable. Le Tribunal est d’avis que dans ce dossier, un motif raisonnable n’a pas été démontré pour permettre de relever monsieur Menasria de son défaut. La demande de révision n’est donc pas recevable.
La compétence du Tribunal pour déterminer le statut
[44] Le représentant des propriétaires prétend que le Tribunal n’a pas compétence pour se prononcer sur le statut des chauffeurs en vertu de la LATMP, étant donné que la LSTT prévoit la possibilité d’un contrat de location, choix qui aurait été fait par les propriétaires qu’il représente. Il recherche l’application exclusive de la LSTT, estimant que ni la Commission ni le Tribunal n’avait juridiction pour appliquer la LATMP compte tenu du cadre législatif qui découle de la LSTT.
[45] Le représentant de la Commission rappelle qu’il n’appartient pas au Tribunal d’analyser la relation qui existe entre les chauffeurs et les propriétaires au sens de la LSTT, mais plutôt celle qui existe entre ceux-ci en vertu de la LATMP et de la jurisprudence applicable. Il plaide que la Commission a compétence pour faire cette analyse de même que le Tribunal lorsque saisi d’affaires visées par sa loi constitutive, la Loi instituant le Tribunal administratif du travail[25], la LITAT.
[46] La prétention du représentant des propriétaires n’est pas retenue. Premièrement, la LATMP qui prévoit un régime d’indemnisation des lésions professionnelles est d’ordre public tel que mentionné à son article 4. Elle doit être interprétée de façon large et libérale afin que toutes les personnes qui sont liées à un employeur par contrat de travail bénéficient du régime.
[47] Comme exprimé dans Newberry et Commission de la santé et de la sécurité du travail[26] :
[13] Enfin, le tribunal rappelle que le régime québécois d’indemnisation des lésions professionnelles est d’ordre public. Il s’impose aux individus et aux entreprises qui répondent aux définitions d’employeur et de travailleur contenues à la loi. Il ne s’agit pas, à leur égard, d’un régime assurantiel optionnel ou à contribution volontaire. Le travailleur est certes libre de déposer ou non une réclamation, mais l’employeur n’est pas libre d’assurer une protection à ses employés, tant en matière d’indemnisation que de prévention.
[14] Le statut légal d’un individu ou d’une entreprise ne dépend pas également de sa seule volonté ou perception. Ce statut découle des effets de la loi eu égard aux caractéristiques réelles et effectives de la relation contractuelle9.
[Notes omises]
[48] Deuxièmement, la LITAT, prévoit que notamment les affaires découlant de l’application de l’article 359 de la Loi sont instruites et décidées par la division de la santé et de la sécurité du travail. Toutes les contestations en cause ici découlent de contestations logées en vertu de l’article 359 de la LATMP. Le Tribunal a donc pleinement compétence pour en décider.
[49] Troisièmement, lorsque saisi de telles affaires, le Tribunal dispose du pouvoir de décider de toute question de droit ou de fait nécessaire à l’exercice de sa compétence, tel que prévu à l’article 9 de la LITAT. Ainsi, saisi comme en l’espèce de plusieurs affaires regroupées autour de la même question, le Tribunal possède tous les pouvoirs pour décider du statut des chauffeurs afin d’en déterminer les conséquences quant au régime d’indemnisation prévu à la LATMP, tant pour les chauffeurs pour les litiges concernant leur réclamation, que pour les propriétaires en regard de leur classification ou de leur cotisation.
[50] De plus, le Tribunal n’est pas lié par la qualification qu’ont pu adopter les parties relativement au statut des chauffeurs. Le Tribunal doit plutôt analyser la preuve administrée pour chercher la nature réelle de la relation juridique entre les parties[27]. Comme l’écrit le Tribunal[28] :
[28] Afin d’identifier la nature de la relation contractuelle, le Tribunal souligne qu’il n’est pas lié par la qualification dont se dotent les parties ni par la qualification précédemment attribuée par une autre entité gouvernementale, comme l’Agence du Revenu du Québec, ou encore par celle suggérée aux directives de la Commission.
[Note omise]
[51] Aussi, suivant la jurisprudence[29], le statut des personnes au regard des lois fiscales n’a pas d’incidence sur la qualification découlant de l’application des lois du travail. Le même raisonnement s’applique au régime légal entourant l’industrie du taxi, à l’époque pertinente aux litiges dans la présente affaire, avec toutefois une nuance. Plus précisément, pour analyser la notion de subordination juridique, le contexte de la relation entre les parties, incluant l’encadrement juridique découlant de la LSTT et du RSTT, la réalité du type de prestation et les conditions concrètes d’exécution du travail seront prises en compte[30]. Nous y reviendrons.
[52] Ainsi, il appartient au Tribunal de statuer sur la question de savoir si une personne peut être considérée comme un travailleur que ce soit dans le cadre d’une réclamation pour une lésion professionnelle ou afin d’établir la classification d’un employeur ou la cotisation qui tient compte de la rémunération versée à un travailleur.
La théorie de l’attente légitime
[53] Le représentant des propriétaires soulève une expectative raisonnable quant à la portée de leur engagement par contrat de location, un des modèles d’affaires à la LSTT, faisant en sorte que les chauffeurs ne pourraient être considérés comme des travailleurs. Il explique que le justiciable doit s’attendre à ce que la situation juridique soit celle annoncée dans la LSTT et que le traitement de ses droits soit en conformité avec celle-ci. Puisque les propriétaires considèrent que leurs contrats sont des locations, l’analyse de la LATMP en regard de la situation en cause, à l’encontre de ces attentes légitimes, ne serait pas possible.
[54] Le représentant de la Commission fait valoir que la théorie des attentes légitimes n’offre qu’une protection procédurale et ne crée pas de droits matériels au bénéfice des administrés. Il ajoute que même en considérant un contenu substantif possible, ce qu’il exclut, l’attente raisonnable ne serait pas liée aux agissements de la Commission, mais découlerait plutôt du texte même de la LSTT. La Commission ne crée aucune attente à cet égard, ni par les lois qu’elle applique ni par le biais de ses directives ou politiques.
[55] Le Tribunal ne retient pas la prétention du représentant des propriétaires.
[56] D’abord, on ne saurait s’en remettre strictement à la possibilité d’un contrat de location prévue à la LSTT, puisque celle-ci prévoit, justement, aussi celle d’un contrat de travail entre le propriétaire et le chauffeur.
[57] De plus, la théorie de l’attente légitime ou de l’expectative légitime[31], développée par la jurisprudence et exposée notamment par la Cour suprême du Canada dans Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)[32] ne crée pas de droits matériels. Autrement dit, on ne peut recourir à cette théorie pour revendiquer ni un droit ni l’interprétation d’une disposition d’une loi qui prévoit des droits substantifs.
[58] Citant l’arrêt Agraira c. Canada (Sécurité publique et Protection civile)[33] de la Cour suprême du Canada, les auteurs Patricia Blair et Alexandre Ouellet[34] rappellent en quoi consiste la théorie de l’attente légitime :
La théorie de l’attente légitime ou de l’expectative légitime veut qu’un administré puisse revendiquer le respect d’un processus administratif lorsque, dans le cadre de l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire, un organisme, par ses agissements ou ses pratiques, a fait naître chez ce dernier une attente légitime que ce processus soit respecté1. Les tribunaux considèrent cette théorie comme « le prolongement des règles de justice naturelle et de l’équité procédurale »2 ou encore comme une facette de l’obligation d’équité procédurale.
[Notes omises]
Ils expliquent que cette théorie peut s’appliquer dans deux situations[35] :
Premièrement, l’attente peut émaner du comportement d’un organisme ou encore des paroles de l’un de ses représentants. Il en est ainsi lorsque l’organisme administratif s’est engagé à suivre une procédure dans le cadre de l’exercice d’un pouvoir qu’il détient en vertu de lois : « [s]i le demandeur s’attend légitimement à ce qu’une certaine procédure soit suivie, l’obligation d’équité exigera cette procédure4 ». Deuxièmement, elle peut découler du fait qu’un organisme ait constamment suivi une procédure dans le passé, qu’il s’agisse d’une simple pratique ou d’un processus prévu dans une directive5.
[Notes omises]
[59] Dans son ouvrage Droit administratif[36], l’auteur Garant réitère ce qui précède et précise que cette théorie ne peut avoir pour effet d’entraver le pouvoir discrétionnaire du décideur de manière à entraîner un résultat particulier :
La doctrine de l'expectative ou attente légitime est quelquefois invoquée afin d'obtenir une protection procédurale de la part d'un décideur qui, par son comportement, ses paroles ou une pratique, a laissé entendre qu'il adopterait une procédure précise. Il doit s'agir de « déclarations au sujet des procédures qu'il suivrait pour rendre une décision en particulier, ou s'il a constamment suivi dans le passé, en prenant des décisions du même genre, certaines pratiques procédurales »165. Cependant, cette doctrine, comme le précise la Cour suprême, « ne crée pas de droits fondamentaux et n'entrave pas le pouvoir discrétionnaire du décideur légal » « de façon à entraîner un résultat particulier »166. Elle se greffe sur les principes de justice naturelle et fait « plutôt partie de l'équité procédurale »167 constituant l'une de ses nombreuses facettes168.
[Notes omises]
[60] La jurisprudence est constante à considérer que cette théorie ne peut servir d’assise à la revendication de droits substantifs ou matériels[37]. Le Tribunal n’échappe pas à ce constat jurisprudentiel puisque sa jurisprudence est au même effet[38]. D’ailleurs, dans Université McGill et Commission de la santé et de la sécurité du travail[39], cité par le représentant des propriétaires, on lit :
[153] À la lumière de ces écrits, la Commission des lésions professionnelles considère que la théorie de l’expectative légitime ne peut donner naissance à de droits matériels puisqu’elle n’a trait qu’à la procédure. Cette théorie s’applique d’abord et avant tout en matière discrétionnaire et elle s’attache plutôt aux notions d’équité procédurale. La Commission des lésions professionnelles estime donc qu’elle n’est pas utile pour les employeurs dans le cadre du présent débat. Il y a plutôt lieu de se référer aux dispositions de la loi, lesquelles encadrent la compétence de la présente formation tel qu’il a été longuement établi antérieurement.
[61] De plus, comme l’a souligné le représentant de la Commission, les propriétaires n’ont pas démontré que celle-ci aurait généré une attente légitime, ni par son comportement, ni par les lois qu’elle applique, ni par le biais de ses directives ou politiques. Le fardeau de preuve à ce sujet leur appartenait.
[62] Et de toute façon, comme l’a décidé la Cour supérieure dans Groupe Hexagone c. Ville de Lac-Mégantic[40], s’agissant alors de l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire par la municipalité, soit celui d’adopter une résolution, aucune expectative légitime ne saurait justifier le maintien d’une situation qui contrevient à l’ordre public. La Cour supérieure y précise que l’expectative doit être compatible avec les obligations imposées par la loi. Ainsi, même à supposer qu’on puisse considérer une expectative, ce que le Tribunal écarte dans le présent dossier, celle-ci se doit d’être conforme aux obligations découlant de la LATMP que le Tribunal est chargé d’appliquer, d’autant plus qu’il s’agit d’une loi d’ordre public.
La notion de travailleur
[63] La notion de travailleur est définie à l’article 2 de la LATMP comme étant « une personne physique qui exécute un travail pour un employeur, moyennant rémunération, en vertu d'un contrat de travail ou d'apprentissage ». Certaines exclusions qui ne trouvent pas application dans le présent dossier sont prévues. L’employeur est défini comme une personne qui, en vertu d’un contrat de travail ou d’un contrat d’apprentissage, utilise les services d’un travailleur aux fins de son établissement. La notion de contrat de travail est au cœur de ces définitions.
[64] La notion de contrat de travail est énoncée à l’article 2085 du Code civil du Québec[41] :
2085. Le contrat de travail est celui par lequel une personne, le salarié, s’oblige, pour un temps limité et moyennant rémunération, à effectuer un travail sous la direction ou le contrôle d’une autre personne, l’employeur.
[65] Trois composantes caractérisent le contrat de travail : la rémunération, la prestation de travail et la subordination juridique.
[66] Le Tribunal conclut que les chauffeurs sont des travailleurs au sens de la LATMP à l’emploi des propriétaires. Avant d’exposer les motifs pour chaque composante du contrat de travail, voyons les principales clauses des contrats écrits entre les propriétaires et les chauffeurs :
- Le contrat entre 9118 et monsieur Jawhar :
· le locataire « devra jouir du taxi et l’exploiter lui-même en bon père de famille, y consacrer tout son temps et ses soins »
· le taxi est équipé d’un compteur taximètre, d'un dôme, d'une vignette de ville et d’un système de répartition par GPS. Le locateur s’engage à garder le véhicule en bon état d’entretien et à effectuer, à ses frais, les réparations. Le locataire assume le coût du carburant
· le locataire est le seul conducteur
· prix fixe par semaine payé au propriétaire
· le locataire devra exercer la profession de chauffeur de taxi en veillant au respect de la règlementation régissant le taxi
· le locataire devra informer immédiatement le loueur de toutes mesures de suspension ou retrait de son permis de travail
- Transport GH et monsieur Marwan Abou-Samra :
· le propriétaire confie la garde de son véhicule au chauffeur selon un horaire variable à être déterminé quotidiennement ou conjointement par les deux parties.
· le prix de location est un montant fixe par jour
· le chauffeur s’engage à offrir le service de taxi en conformité avec la loi et le règlement sur le transport par taxi
· le chauffeur s’engage à aviser le propriétaire, dès qu’il en aura connaissance, de toute suspension, révocation ou du non- renouvellement de son permis de chauffeur de taxi et/ou de son permis de conduire
- Le contrat entre monsieur Menasria et monsieur Farid Boucenna :
· le propriétaire loue son « permis de taxi avec voiture »
· le chauffeur verse un montant fixe par semaine
[67] Dans son témoignage, monsieur Menasria explique qu’une convention de garde qui relie le taxi au bureau de taxi s’ajoute. À titre de propriétaire, il confie, en contrepartie d’un loyer hebdomadaire, le taxi comme un outil de travail au chauffeur qui a la responsabilité de l’exploiter. Le montant fixe qu’il demande n’a pas changé au fil du temps, car ayant déjà été chauffeur lui-même, il faut travailler un minimum de 10 à 12 heures par jour pour atteindre une certaine rentabilité.
La rémunération
[68] Le représentant des propriétaires a fait valoir qu’il n’y a pas de rémunération puisque ce sont les propriétaires qui reçoivent le versement d’un montant correspondant à un prix de location. Les propriétaires ne participent aucunement à déterminer le montant reçu pour les heures ou les courses effectuées. Quant à lui, le représentant de la Commission plaide que la rémunération peut prendre différentes formes et doit être interprétée largement.
[69] Le Tribunal conclut qu’il y a rémunération. Cette notion s’interprète largement, d’autant plus que la rémunération prend place dans une relation tripartite. Comme exprimé dans Ndayizeye et Université de Montréal[42] : « La rémunération est donc une notion plus large que le salaire. Elle a trait à la contrepartie consentie en raison du travail exécuté ».
[70] La situation est la même pour les trois propriétaires. Le chauffeur paie au propriétaire auquel il est lié, un montant fixe par semaine ou par mois. Le chauffeur assume les coûts d’essence, de lave-vitre et de lavage de l’automobile. Le propriétaire ne perçoit aucune part des revenus versés par l’intermédiaire au chauffeur. Il n’a pas droit, non plus, à des profits selon les heures ou les courses qu’il réalise.
[71] Par ailleurs, le propriétaire paie un montant mensuel à l’intermédiaire, la Coop, dont il est membre pour avoir accès à la répartition des courses de taxi par le biais du taximètre et du GPS. Il assume le coût des assurances, de l’immatriculation et des réparations de l’automobile. Monsieur Jerjian, lors de son témoignage, précise qu’il établit le prix qu’il demande au chauffeur en divisant le total de ses dépenses, incluant les mensualités qu’il paie à la Coop intermédiaire, par semaine ou par jour.
[72] À plusieurs reprises, le Tribunal a statué, dans des contextes similaires, que le chauffeur reçoit une rémunération. Dans Bourjeily et Ghediri[43], le chauffeur versait un montant fixe au propriétaire chaque semaine et le Tribunal explique :
[19] Au chapitre de la rémunération, monsieur Bourjeily souligne qu’il ne verse pas de salaire à monsieur Ghediri et que ce dernier assume lui-même de remplir les formulaires de perception des taxes pour les autorités fiscales. Bien que monsieur Ghediri loue le taxi à raison de 550,00 $ par semaine, ceci ne signifie pas qu’il n’est pas rémunéré. En effet, comme le soulignent plusieurs décisions du Tribunal, la rémunération ne se traduit plus seulement par un salaire déterminé à l’heure, à pourcentage ou encore selon un montant fixe. La pluralité des formes de rémunération fait en sorte qu’en versant un montant fixe sous forme de loyer pour la voiture, les sommes gagnées au-delà de ce loyer représentent la rémunération de monsieur Ghediri.
[Nos soulignements]
[73] De même, dans Estivene et Perin[44], le Tribunal considère que le chauffeur verse au propriétaire une partie des revenus, même s’il s’agit d’un montant fixe :
[34] Dans la présente affaire, le travailleur ne verse pas de pourcentage en tant que tel au requérant des revenus qu’il perçoit. Cependant, la réalité est qu’il verse un montant fixe qui est bien supérieur aux dépenses reliées au véhicule. C’est le requérant qui détermine le montant fixe à être versé. Or, ce montant provient nécessairement des recettes que le travailleur perçoit des clients lorsqu’il travaille, puisqu’il s’agit ici de son seul revenu. Donc, il faut nécessairement conclure que le travailleur verse au requérant un montant qui correspond à une partie de ses revenus. Si on le déterminait en pourcentage de ses revenus gagnés, ce dernier serait variable.
[74] Dans 9125-7782 Québec inc. (Taxi) et CNESST[45], le Tribunal retient que la rémunération est la différence entre l’argent collecté et le montant versé pour la location de l’automobile.
[75] Le fait que la rémunération puisse être déterminée seulement au terme d’une période puisque le chauffeur ne sait pas d’avance quels revenus il tirera des activités de taxi, comme l’a prétendu le représentant des propriétaires, n’a pas d’incidence. Le chauffeur reçoit bel et bien une rémunération qu’il tire de ses activités de taxi.
La prestation de travail
[76] Les chauffeurs de taxi offrent une prestation de travail en effectuant les courses de taxi.
[77] Dans le cas de 9118 et de G.H., selon le contrat écrit, les chauffeurs s’engagent à exercer la profession de chauffeur de taxi ou à offrir le service de taxi. Quant à monsieur Menasria, lors de son témoignage, il affirme qu’une convention de garde reliée au bureau de taxi s’ajoute et que le chauffeur a la responsabilité d’exploiter l’automobile. Il précise avoir déjà été chauffeur et qu’il est nécessaire de faire 10 à 12 heures de taxi par jour pour atteindre une certaine rentabilité.
La subordination juridique
[78] Le critère déterminant pour décider si la prestation de travail est exécutée en vertu d’un contrat de travail constitue celui de la subordination juridique. Le représentant des propriétaires plaide que les chauffeurs ne font que louer les équipements, qu’ils n’ont pas à suivre aucune directive des propriétaires. Il argumente que l’analyse effectuée par la Commission conduit à des situations absurdes puisqu’à la limite, un locateur d’outils pourrait être considéré comme employeur d’un entrepreneur qui loue ou encore un locataire de salles pourrait être employé du locateur.
[79] Le représentant de la Commission argumente que l’outil de travail est fourni par le propriétaire, que le contrat est intuitu personae, c’est-à-dire que le chauffeur doit lui-même utiliser l’automobile pour faire le taxi. De plus, le propriétaire assume les risques puisqu’il doit notamment payer les réparations et qu’il ne reçoit pas de montant du chauffeur lorsque l’automobile est au garage.
[80] Le Tribunal estime que le chauffeur est subordonné juridiquement au propriétaire. Le chauffeur n’est pas un simple locataire d’une automobile et le propriétaire un simple locateur. Le rapport entre le propriétaire et le chauffeur s’inscrit dans un contexte et avec des engagements qui créent bien plus qu’une relation de locateur/locataire.
[81] Dans Ville de Pointe-Claire c. Québec (Tribunal du travail)[46], la Cour suprême du Canada expose les critères qui permettent de déterminer qui est le véritable employeur d’un travailleur dans le cadre d’une relation tripartite. Elle propose une analyse plus globale plutôt que de s’en remettre aux critères de subordination juridique qui seraient utilisés comme des critères exclusifs. On doit chercher à identifier la partie qui a le plus grand contrôle sur tous les aspects du travail en donnant à titre d’exemples : le processus de sélection, l’embauche, la formation, la discipline, l’évaluation, la supervision, l’assignation des tâches, la rémunération et l’intégration dans l’entreprise. Les critères doivent être pondérés globalement et non individuellement.
[82] Les propriétaires témoignent qu’aucun d’eux n’a fait d’entrevue ou de sélection. Pour recruter un chauffeur, ça se passe soit par du bouche à oreilles soit par une annonce affichée au bureau de la Coop mentionnant le numéro du propriétaire recruteur. Si un chauffeur de la Coop est disponible, il contacte le propriétaire. Monsieur Moukthar explique que lorsqu’il rencontre un chauffeur, il s’assure qu’il a un permis valide, fixe le prix, signe la convention de garde et remet l’automobile avec les équipements.
[83] Tous les propriétaires ont également affirmé durant leur témoignage qu’ils ne contrôlent pas les heures de travail des chauffeurs, que ces derniers sont libres de leur horaire. Si le chauffeur souhaite prendre des vacances, s’il avise suffisamment d’avance, le propriétaire reprend l’automobile durant la période et le chauffeur n’a pas à payer. Aussi, les chauffeurs auraient le loisir d’effectuer des courses de type Uber ou autres livraisons.
[84] Néanmoins, ce sont les propriétaires qui font le choix de la Coop dont ils sont membres. Ils paient à celle-ci une mensualité pour avoir accès à la répartition des courses de taxi. Le chauffeur doit offrir le service de taxi. Il s’oblige par contrat avec le propriétaire à le faire. Et il utilise comme outil de travail l’automobile et le matériel fourni par le propriétaire, matériel relié à la répartition par la Coop. Le chauffeur doit aussi être relié à la Coop.
[85] Dans Ndayizeye et Université de Montréal[47], le Tribunal précise que la notion classique de la subordination : « [...] a fait place à la notion de subordination juridique au sens large, qui se rapporte davantage aux modalités d’exécution et de l’encadrement du travail ». C’est pourquoi, le contexte de la relation entre les parties incluant l’encadrement juridique découlant de la LSTT et du RSTT, la réalité du type de prestation et les conditions concrètes d’exécution du travail sont prises en compte dans la pondération des critères.
[86] Le représentant des propriétaires fait valoir que les chauffeurs n’ont aucune directive à suivre de la part des propriétaires, outre de respecter la loi et la règlementation ainsi que les règles imposées par les intermédiaires en services de transport par taxi. Les articles 48 à 59.2 prévoient justement les obligations de chacun. Il n’est donc pas nécessaire que le propriétaire rajoute d’autres directives à cet encadrement. Comme décidé dans Taxi Van Granby et CSST[48], la nature du travail, l’expérience et la compétence des chauffeurs de taxi peuvent expliquer qu’il y ait moins de surveillance à exercer.
[87] Le représentant des propriétaires soumet que ceux-ci n’ont aucun droit de regard ou de contrôle sur les recettes que réalisent les chauffeurs. Dans Yahyaoui (TAXI) et Halitim[49] qu’il cite, le Tribunal conclut que les critères du contrat de travail étaient absents entre les parties concernées, notamment pour cette raison. Par ailleurs, le Tribunal écrit :
[27] Le Tribunal rappelle qu’il importe de considérer les faits particuliers qui sont mis en preuve, dans chaque affaire, puisqu’il n’apparaît pas indiqué de conclure systématiquement que les chauffeurs de taxi qui louent le véhicule leur permettant de desservir des clients sont des travailleurs à l’emploi du propriétaire de leur outil de travail. Le cas soumis, en l’espèce, présente les particularités mises en preuve et qui s’avèrent en accord avec le type de contrat intervenu entre les parties et qui est un « contrat de location ».
[Nos soulignements]
[88] Parmi ces particularités dans l’affaire Yahyaoui[50], selon la preuve retenue par le Tribunal, le chauffeur était libre de se faire remplacer par une personne de son choix, ce qui diffère de la preuve dans le présent cas. Les chauffeurs ne peuvent se faire remplacer. C’est ce qui ressort des contrats de 9118 et G.H. qui mentionnent que le chauffeur est le seul conducteur. Monsieur Menasria témoigne au même effet. Le fait de ne pas pouvoir se faire remplacer milite en faveur de la reconnaissance d’un contrat de travail entre le chauffeur et le propriétaire.
[89] Le statut de travailleur est également mis en opposition avec le statut de travailleur autonome défini dans la LATMP comme « une personne physique qui fait affaire pour son propre compte, seule ou en société, et qui n'a pas de travailleur à son emploi ». Le fait de ne pas fournir les outils et l’équipement significatifs rend difficile la qualification de travailleur autonome. Aussi, la notion de faire « affaires pour son propre compte » suppose d’assumer un certain risque de pertes ou de profits dans le cadre de ses activités.
[90] Les outils de travail sont tous fournis par le propriétaire. Le chauffeur a la garde de l’automobile toute équipée pour faire du taxi. La répartition des appels est fournie au chauffeur parce que le propriétaire est membre de la coop intermédiaire et qu’il paie une mensualité pour y avoir accès. Les demandes de taxi sont relayées par l’intermédiaire, mais le choix que la répartition soit faite par la Coop relève du propriétaire.
[91] Le chauffeur ne paie que l’essence, le lave-vitre et le nettoyage, en plus du montant fixe au propriétaire. Les autres coûts sont assumés par le propriétaire : les mensualités à la Coop, l’entretien et les réparations de l’automobile, l’immatriculation et les assurances.
[92] Ainsi, bien qu’un montant fixe soit payé au propriétaire, c’est lui qui assume les risques. À propos du risque de pertes ou de profits dans le cadre des activités, le Tribunal retient le même raisonnement que dans Estivene et Perin[51] :
[39] Le travailleur ne pourrait exercer ce métier sans les apports du requérant qui fournit les éléments essentiels. Il perçoit les recettes de l’exploitation du taxi et verse un montant hebdomadaire fixe au requérant, ce qui équivaut à une forme de rémunération variable selon les heures qu’il fait et les aléas du marché. Il paie l’essence, mais doit communiquer avec le propriétaire dès que des questions d’entretien sérieux se présentent, n’étant pas le propriétaire du véhicule.
[Nos soulignements]
[93] De plus, le fait que le chauffeur doive aviser le propriétaire, sans délai, de toute mesure concernant son permis de travail appuie que le risque est assumé par le propriétaire. Si par exemple le chauffeur n’est plus en mesure de faire du taxi en raison de la suspension de son permis, il aura sans doute du mal à payer le montant au propriétaire, ce qui justifie qu’il en soit avisé rapidement.
[94] Ainsi, la pondération globale de tous ces éléments amène le Tribunal à conclure que les chauffeurs sont des travailleurs à l’emploi des propriétaires.
[95] Le Tribunal a aussi connaissance de la décision Taxi Para-Adapté inc. et Nasrallah[52] qui conclut que l’employeur est l’intermédiaire dans un contexte particulier de taxi adapté. Compte tenu de ce contexte, du débat dans la présente affaire, du fait que les représentants n’ont pas prétendu que la même conclusion devait s’appliquer et que cette décision fait l’objet d’un pourvoi en contrôle judiciaire[53], le Tribunal n’entend pas se prononcer sur cette décision.
[96] Le représentant des propriétaires a aussi soumis des arguments liés aux politiques de 2016 et de 2020 de la Commission qui prévoient la démarche de détermination du statut d’une personne physique aux fins de la cotisation. En 2016, la Commission était catégorique pour considérer le chauffeur comme lié par contrat de travail, alors qu’en 2020, elle préconiserait le recours à l’expertise pour trancher. Il fait valoir que même en appliquant les critères de ces politiques qui ont évolué dans le temps, les chauffeurs ne peuvent être considérés comme des travailleurs.
[97] Le Tribunal rappelle qu’il n’est pas lié par les directives ou politiques de la Commission et que, comme le prévoit l’article 9 de la LITAT, il procède dans les dossiers de novo puisqu’il possède le pouvoir de rendre la décision qui aurait dû être rendue en premier lieu. Pour ce faire, il est tenu d’analyser le cadre légal en regard de la preuve du dossier plutôt que de vérifier la démarche suivie par la Commission.
[98] Enfin, étant donné la conclusion voulant que les chauffeurs soient des travailleurs à l’emploi des propriétaires, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur la prétention subsidiaire du représentant de la Commission reliée à l’article 9 de la LATMP. Si le Tribunal l’avait fait, il aurait conclu dans le même sens que dans l’affaire Taxi Bellerive et CSST[54].
[99] Concernant les contestations, le représentant des propriétaires n’a pas soumis d’autres moyens que celui du statut des chauffeurs. La preuve ne permet pas non plus de conclure que les décisions rendues par la Commission devraient être infirmées ou modifiées.
[100] Finalement, dans le dossier 709452, la Commission a conclu à l’irrecevabilité de la demande de révision de l’employeur à l’encontre d’un relevé des prestations accordées et des sommes imputées. Elle a considéré que l’employeur ne pouvait contester par ce biais l’admissibilité de la réclamation du travailleur. 9118 n’a pas fait valoir de moyen spécifique à cette décision et il n’y a pas lieu de la remettre en question.
[101] En conséquence, les contestations sont toutes rejetées sauf dans les dossiers 705186 et 705187 dans lesquels elles sont accueillies quant aux questions préliminaires relatives au délai.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU TRAVAIL :
705184-62-1907
REJETTE la contestation de 9118-1016 Québec inc.;
CONFIRME la décision rendue par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail le 3 juillet 2019 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que la Commission était justifiée de déterminer à nouveau la cotisation de l’employeur pour les années 2016 et 2017;
CONFIRME l’avis de cotisation du 18 septembre 2018;
DÉCLARE que les autres chauffeurs de taxi sont des travailleurs à l’emploi de l’employeur;
DÉCLARE que la Commission peut fixer de façon estimative les salaires pour les années 2016 et 2017;
DÉCLARE que l’employeur doit verser la cotisation indiquée dans l’avis de cotisation.
705186-62-1907
ACCUEILLE la contestation de 9118-1016 Québec inc. relativement à la recevabilité de sa demande de révision ;
INFIRME la décision rendue par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail le 3 juillet 2019 à la suite d’une révision administrative ;
DÉCLARE recevable la demande de révision de 9118-1016 Québec inc.;
DÉCLARE que l’employeur doit être classé, pour les années 2016 et 2017, dans l’unité 55040.
705187-62-1907
ACCUEILLE en partie la contestation de 9118-1016 Québec inc. quant à la recevabilité de sa demande de révision;
INFIRME la décision rendue par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail le 3 juillet 2019 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE recevable la demande de révision de 9118-1016 Québec inc.;
DÉCLARE que l’employeur doit être classé, pour l’année 2018, dans l’unité 55040.
705431-71-1907
REJETTE la contestation de 9118-1016 Québec inc.;
CONFIRME la décision rendue par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail le 28 juin 2019 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que monsieur Akram Jawhar est un travailleur de l’employeur;
DÉCLARE que le travailleur a subi une lésion professionnelle le 1er juillet 2018, soit une entorse dorso-lombaire et une contusion frontale;
DÉCLARE que le travailleur a droit aux prestations prévues à la loi.
707313-61-11908
REJETTE la contestation de monsieur Mohamed Menasria;
CONFIRME la décision rendue par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail le 10 juillet 2019 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE irrecevable la demande de révision du 16 septembre 2018.
709359-62-1909
REJETTE la contestation de de 9118-1016 Québec inc.;
CONFIRME la décision rendue par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail le 14 août 2019 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que l’employeur doit être classé, pour l’année 2019, dans les unités 54350 et 55040.
709452-71-1909
REJETTE la contestation de de 9118-1016 Québec inc.;
CONFIRME la décision rendue par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail le 14 août 2019 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE irrecevable la demande de révision du 3 octobre 2018;
719742-61-1912
REJETTE la contestation de monsieur Mohamed Menasria;
CONFIRME la décision rendue par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail le 22 octobre 2019 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que l’employeur doit être classé, pour l’année 2019, dans l’unité 55040.
728460-71-2002
REJETTE la contestation de Transport G.H. ;
CONFIRME la décision rendue par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail le 18 février 2020 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que monsieur Marwan Abou-Samra a subi une lésion professionnelle le 22 mai 2019, dont une entorse cervicale;
DÉCLARE qu’il a droit aux prestations prévues à la loi.
735800-61-2006
REJETTE la contestation de Transport G.H. ;
CONFIRME la décision rendue par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail le 14 mai 2020 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que monsieur Marwan Abou-Samra est un travailleur de l’employeur depuis le 22 mai 2019 et que son salaire doit être ajouté à la masse salariale de l’employeur.
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Annie Beaudin |
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Me Éric Dugal |
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ALPHA AVOCAT / DUGAL AVOCAT INC. |
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Pour les parties demanderesses |
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Me Olivier Hardy La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail |
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PINEAULT AVOCATS CNESST |
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Pour les parties intervenantes
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[1] Ordonnance rendue par la présidente, Me Lucie Nadeau, en vertu de l’article 19 de la Loi instituant le Tribunal administratif du travail, RLRQ, c. T-15.1.
[2] 719742-61-1912; 728460-71-2002; 735800-61-2006.
[3] Pour alléger le texte, elle sera désignée comme 9118.
[4] 9118 : 705184 (2016 et 2017); Menasria : 707313 (2016 et 2017); Transport GH : 735800 (2019).
[5] 9118 : 705186 (2016 et 2017), 705187 (2018), 709359 (2019); Menasria : 7197429 (2019).
[6] 9118 : 705431; Transport GH : 728460.
[7] 9118 : 709452.
[8] 705186, 705187 et 707313.
[9] RLRQ, c. A-3.001.
[10] RLRQ, c. S-6.01.
[11] Règlement sur les services de transport par taxi, RLRQ, c. S-6.01, r.3.
[12] 9118 : 705186, 705187; Menasria : 707313.
[13] Gamache et Kamtech Services inc., C.L.P. 260545-04B-0504, 15 décembre 2005, D. Lajoie.
[14] [1990] C.A.L.P. 916.
[15] C.L.P. 198117-03B-0301, 198137-03B-0301, 198138-03B-0301, 4 décembre 2003, G. Marquis, (03LP-256).
[16] Purolator ltée et Langlais, C.A.L.P. 87109-62-9703, 11 décembre 1997, R. Jolicoeur; Côté et 25432253 Canada inc., C.L.P. 90478-05-9708, 13 février 1998, R. Jolicoeur, révision rejetée le 16 septembre 1998, S. Di Pasquale; Charron et Université Laval, C.L.P. 372258-31-0903, 09- 12- 09, M.-A. Roiseux, (09LP-180).
[17] Rees et Pâtes d’amandes Edde inc., 2017 QCTAT 3412; Adams et Stadacona S.E.C., 2017 QCTAT 2935; Fortier et Structures Ultratec inc., 2017 QCTAT 5310. Récemment, la Cour supérieure réitère la possibilité de recourir au délai postal à moins d’une preuve contraire qui incombe au demandeur : Abbadi c. CNESST et Meubles Delta inc., 2021 QCCS 786.
[18] 2021 QCTAT 655. Et notamment Guénette et Transport Guilbault inc., 2011 QCCLP 5152.
[19] 705184.
[20] Précitées, note 17.
[21] La Commission a considéré que la demande de révision a été faite le du 16 septembre 2018, mais le Tribunal conclut plutôt qu’elle l’a été le 19 juin 2018 comme il sera expliqué plus loin. Dans tous les cas, le délai de 30 jours a été dépassé.
[22] 2008 QCCS 5837.
[23] 2016 QCCS 119.
[24] 2017 QCCA 826.
[25] RLRQ, c. T-15.1.
[26] 2015 QCCLP 1684.
[27] Yahyaoui (TAXI) et Halitim, 2019 QCTAT 5011.
[28] Taxi Para-Adapté inc. et Nasrallah, 2020 QCTAT 3945.
[29] North American Automobile Association Ltd c. Commission des normes du travail du Québec, D.T.E. 93T-429, (1993) 55 Q.A.C. 212 (C.A.); Commission des normes du travail c. 9002-8515 Québec inc., D.T.E. 2000T-432 (C.S.); Ayotte c.Grégoire, Bégin, Brunet & Associés, D.T.E. 2002T-524 (C.Q.); Construction Chamonay inc. c. Québec (Sous-ministre du Revenu), B.E. 2004BE-998 (C.A.).
[30] Ndayizeye et Université de Montréal, 2012 QCCLP 3236.
[31] Parfois nommée l’expectative légitime d ‘équité, la doctrine de l’attente raisonnable ou l’expectative raisonnable.
[32] [1999] 2 RCS 817.
[33] 2013 CSC 36, par. 94.
[34] Patricia BLAIR et Alexandre OUELLET, fasc. 13 : « Équité procédurale », dans Stéphane BEAULAC et Jean-François GAUDREAULT-DESBIENS, Droit administratif, coll. « JurisClasseur Québec, Collection Droit public », Montréal, LexisNexis, 2014 [à jour au 1er octobre 2020].
[35] Idem.
[36] Patrice GARANT, avec la coll. de P. GARANT et J. GARANT, Droit administratif, 7e édition, Montréal, Éditions Yvon Blais, 2017.
[37] Centre hospitalier Mont-Sinaï c. Québec (Ministre de la Santé et des Services sociaux), 2001 CSC 41; Moreau-Bérubé c. Nouveau-Brunswick (Conseil de la magistrature), 2002 CSC 11; Canada (Procureur général) c. Mavi, 2011 CSC 30; Guo c. Québec (Procureure générale) (Ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles), 2015 QCCS 4876.
[38] Notamment Groupe Sutton et Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail, 2016 QCTAT 5063; Praxair Canada inc., 2019 QCTAT 400.
[39] 2011 QCCLP 4532.
[40] 2017 QCCS 5425 (désistement d’appel, 500-09-027251-180).
[41] RLRQ, c. CCQ-1991.
[42] Précitée, note 30.
[43] 2020 QCTAT 1967.
[44] 2019 QCTAT 3137.
[45] 2019 QCTAT 4957.
[46] [1997] 1 R.C.S. 1015.
[47] Précitée, note 30.
[48] 2015 QCCLP 5222.
[49] Précitée, note 27.
[50] Précité, note 27.
[51] Précitée, note 44.
[52] Précitée note 28.
[53] 500-17-114675-203.
[54] 2011 QCCLP 6342, par 53 à 57.
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