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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Sherbrooke

Le 15 juillet 2005

 

Région :

Estrie

 

Dossier :

255664-05-0502

 

Dossier CSST :

127045946

 

Commissaire :

Me Micheline Allard

 

Membres :

Claude Lessard, associations d’employeurs

 

Gisèle Chartier, associations syndicales

 

 

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Mario Leroux

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Sécurité CSG inc.

 

Partie intéressée

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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DÉCISION

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[1]                Le 25 février 2005, monsieur Mario Leroux (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 3 février 2005 à la suite d’une révision administrative.

[2]                Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 9 décembre 2004 et déclare que le travailleur n’a pas droit au remboursement de ses frais de déplacement en véhicule-taxi engagés du 3 au 24 novembre 2004.

[3]                L’audience s’est tenue le 7 juillet 2005 à Sherbrooke en présence du travailleur et de son procureur. L’employeur, Sécurité CSG inc., ne s’est pas présenté.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]                Le travailleur demande de reconnaître qu’il a droit au remboursement de ses frais de transport en taxi pour la période du 3 novembre au 24 novembre 2004.

LA PREUVE

[5]                Le 28 octobre 2004, le travailleur est victime d’un accident du travail. Il subit une fracture ouverte du poignet gauche nécessitant une chirurgie et une orthèse plâtrée du poignet jusqu’à l’épaule. Il est traité par le docteur Anctil, orthopédiste.

[6]                Le 3 novembre 2004, le travailleur voit le docteur Anctil pour un examen de contrôle.

[7]                Le 24 novembre suivant, il revoit son médecin pour l’exérèse d’une broche.

[8]                Toujours le 24 novembre, le docteur Anctil signe un certificat médical se lisant ainsi : « ne peut conduire depuis le 28 octobre ».

[9]                Les visites médicales des 3 et 24 novembre 2004 sont faites au Centre hospitalier Hôtel-Dieu, sur la rue Bowen à Sherbrooke. Le travailleur s’y rend en taxi à partir de sa résidence sise sur la rue Parrot à Fleurimont. Il revient chez lui en taxi également.

[10]           Le 26 novembre 2004, le travailleur produit à la CSST une demande de remboursement pour ses frais de déplacement en taxi.

[11]           Le 9 décembre 2004, la CSST refuse cette demande. Elle verse au travailleur une somme équivalente au coût d’utilisation du transport en commun. Cette décision est maintenue à la suite d’une révision administrative le 3 février 2005.

[12]           Témoignant à l’audience, le travailleur relate que son orthèse plâtrée a été retirée le 8 décembre 2004. Un plâtre partant du poignet jusqu’au coude a alors été installé puis retiré le 22 décembre suivant. Il a ensuite été traité en physiothérapie jusqu’en mai 2005.

[13]           Le docteur Anctil a autorisé le travailleur à conduire son véhicule automobile à compter du 6 janvier 2005. Il s’est rendu à ses traitements de physiothérapie et ses visites médicales avec son véhicule automobile à partir de cette date.

[14]           Le travailleur explique que le transport en commun offert par la CMTS consiste en un service de taxi-bus menant de la Route 112, à proximité de sa résidence sur la rue Parrot, jusqu’à la place Fleurimont et dont l’horaire est le suivant : du lundi au vendredi de 7 h à 8 h 30 et de 15 h à 17 h aux trente minutes. Puis, à partir de la Place Fleurimont, le service régulier d’autobus menant notamment au Centre-ville de Sherbrooke et ensuite au Centre hospitalier Hôtel-Dieu est offert aux usagers.

[15]           Le travailleur indique que pour ses visites auprès du docteur Anctil les 3 et 24 novembre 2004, il aurait dû quitter sa résidence vers 7 h 30 et n’aurait été de retour que vers 15 h 30 s’il avait utilisé le transport en commun.

L’AVIS DES MEMBRES

[16]           Les membres issus des associations d’employeurs et syndicales sont d’avis que la requête du travailleur doit être accueillie. Ils considèrent en effet que le service de transport en commun à Fleurimont ne correspond pas, compte tenu de l’horaire très limité du circuit, à un service disponible pour le travailleur ni à la solution appropriée.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[17]           La Commission des lésions professionnelles doit décider si le travailleur a droit au remboursement des frais de déplacement en taxi pour les visites médicales des 3 et 24 novembre 2004.

[18]           L’article 115 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) prévoit :

115. La Commission rembourse, sur production de pièces justificatives, au travailleur et, si son état physique le requiert, à la personne qui doit l'accompagner, les frais de déplacement et de séjour engagés pour recevoir des soins, subir des examens médicaux ou accomplir une activité dans le cadre de son plan individualisé de réadaptation, selon les normes et les montants qu'elle détermine et qu'elle publie à la Gazette officielle du Québec.

__________

1985, c. 6, a. 115.

 

 

[19]           Les visites médicales des 3 et 24 novembre 2004 sont visées par l’article 115 puisque le docteur Anctil a pratiqué un examen médical et dispensé des soins au travailleur.

[20]           La CSST a adopté le Règlement sur les frais de déplacement et de séjour[2] (le règlement) en vertu de l’article 115 de la loi.

[21]           Suivant l’article 4 du règlement, la CSST rembourse les frais de déplacement et de séjour en tenant compte de la solution appropriée la plus économique. Pour les frais de transport, les articles 5 et 6 du règlement énoncent ce qui suit :

5.         Sont remboursables les frais engagés pour le transport en commun par autobus, métro, train ou bateau.

 

6.         La Commission peut autoriser un travailleur à utiliser un véhicule personnel ou un véhicule-taxi lorsque le médecin qui a charge de ce travailleur atteste qu’il est incapable d’utiliser les moyens de transport prévus à l’article 5 en raison de son état de santé et qu’elle estime que cette incapacité est causée ou aggravée par une lésion professionnelle.

 

Le médecin peut indiquer la période durant laquelle l’incapacité d’utiliser les moyens de transport en commun durera vraisemblablement.

[22]           L’article 5 pose comme principe général que ce sont les frais de transport en commun qui sont remboursables.

[23]           Cependant, encore faut-il que ce mode de transport soit disponible et qu’il représente la solution appropriée pour le travailleur.

[24]           De l’avis de la Commission des lésions professionnelles, le transport en commun offert au travailleur est limité au point où il ne correspond pas à un service disponible.

[25]           L’on ne peut en effet qualifier de disponible un service faisant en sorte qu’un individu doit s’absenter de sa résidence pendant huit heures pour voir son médecin, dans un hôpital pourtant à proximité, parce qu’il n’y a aucun transport en commun à Fleurimont pendant une période continue de six heures et demie de la journée.

[26]           La CSST a manifestement opté pour la solution la plus économique mais elle n’a pas retenu la solution appropriée la plus économique ainsi que le prévoit l’article 4 du règlement.

[27]           Compte tenu de ce qui précède, c’est l’article 6 du règlement qui doit s’appliquer.

[28]           Comme le travailleur ne pouvait conduire son véhicule personnel, ainsi que le confirme le certificat médical du docteur Anctil, il lui restait le taxi comme solution.

[29]           Concernant l’autorisation de la CSST mentionnée à l’article 6, la soussignée souscrit à la jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles selon laquelle le règlement n’exige pas une autorisation préalable à l’utilisation d’un véhicule-taxi, celle-ci pouvant être accordée au moment de la demande de remboursement[3].

[30]           La Commission des lésions professionnelles en vient donc à la conclusion que le travailleur a droit au remboursement des frais de transport en véhicule-taxi engagés pour ses visites médicales des 3 et 24 novembre 2004.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête du travailleur, monsieur Mario Leroux;

INFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 3 février 2005 à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que le travailleur a droit au remboursement de ses frais de transport en taxi pour les visites médicales des 3 et 24 novembre 2004.

 

 

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Me Micheline Allard

 

Commissaire

 

 

 

 

Me Michel Letreiz

F.I.P.O.E.

Représentant de la partie requérante

 

 

 



[1]          L.R.Q., c. A-3.001.

[2]          c. A-3.001, r. 0.4.1.

[3]          Lemieux et Ministère des Transports, C.L.P., 118805-02-9906, 6 mars 2000, P. Simard; Bellavance et Entreprises Julien Bernier inc., C.L.P. 147786-01A-0009, 28 novembre 2001, R. Arseneau; Turcotte et Hydro-Québec, C.L.P. 229559-04B-0403, 6 janvier 2005, D. Lajoie.

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