Davidson et Institut de cardiologie de Montréal | 2023 QCTAT 3845 |
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU TRAVAIL | |||
(Division de la santé et de la sécurité du travail) | |||
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Montréal | |||
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Dossier : | 1208840-71-2012 | ||
Dossier CNESST : | 507350817 | ||
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Sylvie Verrette, médecin | |||
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Montréal, | le 21 août 2023 | ||
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Jean-Sébastien Noiseux | |||
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Institut de cardiologie de Montréal |
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Partie mise en cause |
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Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail |
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Partie intervenante |
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[1] La travailleuse occupe un emploi d’infirmière depuis 1985 pour l’employeur, l’Institut de cardiologie de Montréal. Elle dépose, en octobre 2019, une réclamation à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail par laquelle elle allègue être victime d’une lésion professionnelle de nature psychologique qu’elle relie à des actions de son employeur.
[2] La Commission refuse cette réclamation[1] et ce refus est confirmé à la suite d’une révision administrative[2]. La travailleuse dépose, à l’encontre de cette décision, un acte introductif au Tribunal[3]. Il s’agit du litige.
[3] À l’audience, la travailleuse soutient que son trouble d’adaptation ayant évolué en une dépression majeure est survenu en raison du harcèlement psychologique qu’elle a vécu au travail. De ce fait, elle allègue qu’elle est victime d’une lésion professionnelle le 21 août 2019. Elle associe sa condition psychologique à différentes rencontres ayant eu lieu les 17 mai, 14 juin et 21 août 2019 ainsi qu’au contexte général qui précède et suit celles-ci. Quant à l’employeur, il affirme avoir rencontré à ces différentes dates la travailleuse en raison de plaintes à son sujet pour des incivilités. Il considère qu’il a exercé correctement son droit de gérance et que la condition psychique de la travailleuse relève plutôt de sa personnalité et de sa perception de la situation.
[4] En raison des faits au dossier, de la décision contestée et des prétentions des parties, le Tribunal doit déterminer si la travailleuse est victime d’une lésion professionnelle.
[5] Pour les motifs qui suivent, le Tribunal conclut que la travailleuse ne démontre pas la présence d’un événement imprévu et soudain au sens de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[4], la Loi, et par conséquent n’est pas victime d’une lésion professionnelle.
[6] Une lésion professionnelle est « une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l’occasion d’un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, rechute ou aggravation »[5].
[7] Il est maintenant acquis qu’au sens de la Loi, une lésion professionnelle peut être de nature physique ou psychique[6].
[8] Il est également acquis que les diagnostics de nature psychologique ne donnent pas lieu à l’application de la présomption de lésion professionnelle, puisqu’ils ne sont pas considérés comme une blessure au sens de la Loi, mais plutôt comme une maladie[7]. Par conséquent, la travailleuse doit démontrer, par prépondérance de preuve, les éléments constitutifs de l’accident du travail, soit, « un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause, survenant à une personne par le fait ou à l’occasion de son travail et qui entraîne pour elle une lésion professionnelle »[8].
[9] S’il est aisé de concevoir l’événement imprévu et soudain en présence d’un stress aigu, telle une agression armée, le Tribunal, par sa jurisprudence, a également considéré comme un événement imprévu et soudain les situations reliées à des faits échelonnés sur une plus grande période, à une série d’événements[9].
[10] La Loi, et cela se retrouve dans la jurisprudence du Tribunal, ne fait pas de différence entre le fardeau de preuve nécessaire pour démontrer l’événement imprévu et soudain causant une lésion physique et celui nécessaire pour une lésion psychologique[10] :
[18] La loi ne fait aucune distinction entre les lésions physiques et psychiques. Le travailleur a donc le même fardeau de preuve soit celui de démontrer, par une preuve prépondérante, la survenance d'un événement imprévu et soudain, par le fait ou à l'occasion de son travail, et l'existence d'un lien de causalité entre cet événement et la maladie diagnostiquée. Ce concept d’événement imprévu et soudain a toutefois été conçu initialement pour des lésions physiques et son interprétation en matière de lésions psychiques n’est pas un exercice facile compte tenu notamment du caractère subjectif et du caractère multifactoriel de ce type de lésions. Cela laisse place à l’appréciation des faits et des circonstances propres à chaque réclamation.
[11] La première démarche relativement à l’analyse d’une réclamation pour lésion professionnelle est la détermination du diagnostic, la précision de la condition médicale de la travailleuse.
[12] Le 22 août 2019, la travailleuse communique avec son médecin, le docteur Delaney, qui prescrit un arrêt de travail. Le 27 août, elle consulte ce même médecin qui pose les diagnostics de trouble de l’adaptation et de dépression. Au cours des consultations subséquentes, le docteur Delaney précise le diagnostic et ajoute la composante « majeure » à la dépression, délaisse celui de trouble de l’adaptation et indique la présence d’un syndrome de stress post-traumatique et d’« anxiety disorder ». La travailleuse demande uniquement la reconnaissance de la dépression majeure.
[13] Le docteur Delaney est le professionnel de la santé qui a charge. Conformément à l’article 224 de la Loi, la Commission est liée par le diagnostic établi par ce professionnel. Par l’effet du deuxième alinéa de l’article 358 de cette même Loi, ni l’employeur ni la travailleuse ne peuvent « demander la révision d’une question d’ordre médical sur laquelle la Commission est liée en vertu de l’article 224 ». Autrement dit, le diagnostic de dépression majeure est celui qui légalement doit être considéré aux fins de l’analyse.
[14] Également, Le Tribunal note que la preuve médicale démontre que ce diagnostic est celui retenu par le docteur Chamberland, psychiatre expert retenu par la travailleuse, et que l’employeur ne le remet pas en question.
[15] La question est de déterminer si la dépression majeure est une lésion professionnelle. En d’autres mots, si les événements survenus au travail sont un accident du travail, ou plus précisément, s’il y a présence d’un événement imprévu et soudain?
[16] La représentante de la travailleuse soutient qu’une série d’événements qui, pris isolément, peuvent sembler anodins, sont en l’espèce l’équivalent d’un événement imprévu et soudain. Sinon, elle allègue que la rencontre du 21 août à elle seule constitue un événement suffisamment grave, et doit être reconnue à titre d’accident du travail.
[17] Au-delà des définitions de lésion professionnelle et d’accident du travail mentionnées précédemment, en considérant la particularité du « caractère subjectif et du caractère multifactoriel de ce type de lésion »[11], la difficulté en semblable réclamation réside dans la détermination de ce qu’est un événement imprévu et soudain.
[18] Le Tribunal souscrit à la position développée dans l’affaire Preure et Centre de services scolaire de Montréal[12], dans laquelle il est précisé qu’en « matière de lésion professionnelle de nature psychique, l’événement imprévu et soudain réside dans la singularité des situations vécues par le travailleur au sein de son milieu de travail ».
[19] Dans cette décision, le juge administratif écarte, dans la détermination de l’événement imprévu et soudain, la recherche du caractère objectivement traumatisant de l’événement, puisqu’il « fait reposer sur les épaules du travailleur un fardeau de preuve plus élevé que la balance des probabilités ».
[20] Plus récemment, et en considérant cette prémisse, dans Hénault et Institut de cardiologie de Montréal[13], il est mentionné que « les termes « particulier », « anormal », « inhabituel » ou « singulier » pour décrire l’événement imprévu et soudain sont donc plus appropriés ». [Notes omises]
[21] Il doit donc survenir un événement singulier, anormal ou inhabituel, ce qui n’empêche pas que les faits allégués par la travailleuse « doivent présenter un caractère objectif, et dépasser la perception, les attentes ou les exigences personnelles du travailleur »[14].
[22] Par ailleurs, il est reconnu par une jurisprudence constante[15] que les événements donnant lieu à une lésion professionnelle de nature psychologique doivent déborder du cadre normal ou usuel du travail ou, pour reprendre les propos du juge administratif dans l’affaire Tremblay et Hydro-Québec[16], « les problèmes normaux de relations du travail ou administratifs auxquels doit faire face tout travailleur » :
[26] La Commission des lésions professionnelles est d’avis qu’il faut généralement exclure du champ d’une lésion professionnelle les problèmes normaux de relations du travail ou administratifs auxquels doit faire face tout travailleur. Le statut de salarié implique forcément certaines contraintes et il apparaîtrait quelque peu abusif d’assimiler à une lésion professionnelle la non-adaptation d’un travailleur à celles-ci. De même, certains gestes posés par l’employeur dans le cours normal de sa gestion sauraient difficilement être invoqués comme pouvant avoir des effets négatifs sur le psychique [sic] d’un travailleur au point qu’il faille l’associer à une lésion professionnelle si tels [sic] gestes ne revêtent qu’un caractère administratif. À titre d’exemple, il apparaîtrait difficile de reconnaître à titre de lésion professionnelle la réaction négative d’un travailleur à l’annonce de la faillite de son employeur et, par conséquent, à la perte de son emploi.
[23] Ainsi, selon cette jurisprudence, les événements survenant dans le cadre des relations de travail ou du droit de gérance ne sont généralement pas considérés comme des événements singuliers, anormaux ou inhabituels, puisqu’ils surviennent dans un cadre normal ou usuel du travail.
[24] Sur ce dernier point, lors de l’argumentation des parties, l’une et l’autre des représentantes ont commenté la décision récente Patenaude et Centre de service scolaire des Hautes-Rives[17], dans laquelle il est proposé un nouveau cadre d’analyse lors de la détermination de l’existence ou non d’un événement imprévu et soudain. Dans cette décision, en plus d’écarter le concept de l’événement « objectivement traumatisant », il est décidé qu’il en est de même pour « l’exigence voulant qu’un événement « déborde du cadre normal et habituel du travail » pour être qualifié d’imprévu et soudain ».
[25] Selon cette décision, quoiqu’il « puisse être pertinent d’établir qu’un événement « dépasse du cadre normal et habituel de travail » afin de démontrer qu’il est « imprévu et soudain », il ne devrait pas s’agir d’un critère impératif à la reconnaissance d’un événement imprévu et soudain ». L’événement imprévu et soudain ne doit donc pas se rattacher au « cadre normal et habituel du travail ». Ainsi, toujours selon cette décision, les seuls éléments à considérer sont : un événement qui est un fait identifiable qui se matérialise, ou une série de tels faits; que cet événement soit à la fois imprévu, c’est-à-dire qu’il survient à un moment auquel la travailleuse ne s’attend pas ou d’une façon inattendue; et soudain, donc qu’il survient dans un court laps de temps, bien qu’il puisse perdurer par la suite.
[26] Toujours selon cette décision, une interprétation contraire à ce qui précède mène « à deux erreurs difficilement réconciliables avec le texte de la Loi et les principes applicables en la matière » en ce qu’une telle interprétation sous-entend que, pour être imprévu et soudain, un événement doit être « suffisamment grave » pour sortir du champ des situations jugées « normales », « habituelles » ou « communes » dans un milieu de travail. Et, cette interprétation revient à substituer implicitement le terme « imprévu » retrouvé à la Loi pour celui d’« imprévisible » qui n’y est pas.
[27] En tout respect, le soussigné ne souscrit pas à ce nouveau cadre d’analyse alternatif.
[28] Le concept de « cadre normal et habituel de travail » ne substitue pas le terme « imprévisible » à celui d’imprévu ni n’exige une preuve de la travailleuse allant au-delà de la prépondérance de preuve. Au contraire, ce concept écarte la recherche de l’élément imprévisible, n’impose aucun fardeau de preuve supplémentaire à la travailleuse et permet la recherche de l’événement imprévu et soudain pour ce qu’il doit être, c’est-à-dire un événement singulier, anormal ou inhabituel. Tout ce qui survient au travail n’est pas nécessairement un accident du travail, comme un conflit de personnalités avec sa supérieure, un avis disciplinaire verbal ou écrit, une rencontre avec un supérieur pour discuter de productivité, de manquement au travail et de comportement problématique ou encore, un licenciement ou un congédiement.
[29] Dès 2008, dans la décision Claveau et CSSS Chicoutimi – CHSLD Chicoutimi[18], le Tribunal a écarté les critères du risque inhérent et de prévisibilité au bénéfice de l’analyse des « circonstances particulières de l’événement en tenant compte de la nature du travail effectué et du contexte dans lequel il s’effectue ». Pour le juge administratif, dans cette affaire, le concept de prévisibilité ajoute à la Loi, ou la modifie, « puisque à peu près tout ce qui survient au travail est prévisible d’une façon ou d’une autre et certainement possible puisque la survenance d’un événement constitue la preuve indéniable de la possibilité qu’il avait de survenir ». Un événement peut survenir au travail, même s’il est prévisible et « demeurer imprévu dans sa réalisation et tout aussi soudain dans sa survenance ». Ainsi, la prévisibilité ou non de l’événement ne doit pas être considérée dans l’analyse de son caractère imprévu et soudain[19].
[30] Toujours selon cette décision, une mesure disciplinaire n’est pas un événement imprévu et soudain, « pas tellement parce qu’elle était prévisible, mais plutôt parce qu’il s’agit d’une situation normale dans un milieu de travail donné et dans le cadre de relation de travail normal ». Ainsi, le terme « imprévisible » ne peut faire référence à celui du « cadre normal de travail », bien au contraire, comme l’énonce d’ailleurs la juge administrative dans l’affaire Dupré et Commission scolaire des Grandes-Seigneuries[20] qui précise que le caractère de prévisibilité n’est plus retenu et « que pour qualifier les événements allégués d’« événement imprévu et soudain », il faut regarder si ces événements sortent du cadre normal et habituel du travail plutôt que de les examiner sous l’angle de leur prévisibilité ».
[31] Le Tribunal retient donc, conformément à la jurisprudence constante, qu’un événement qui survient dans le « cadre normal et habituel du travail » n’est pas un événement imprévu et soudain surtout lorsque celui-ci relève du droit de gérance ou de direction de l’employeur.
[32] La représentante de la travailleuse soutient que l’employeur n’a pas raisonnablement exercé son droit de gérance, qu’il n’a pas agi en bon père de famille à l’égard de celle-ci, qu’il n’a pas pris les précautions nécessaires à son endroit et a ainsi abusé de son droit de gérance. L’employeur soutient quant à lui que les événements allégués s’inscrivent objectivement dans le cadre de l’usage normal du droit de gérance de l’employeur.
[33] Pour le Tribunal, les rencontres des 17 mai, 14 juin et 21 août 2019 s’inscrivent dans le cadre du droit de gérance ou de direction de l’employeur. De même, la preuve démontre que l’employeur n’a pas exercé ce droit de façon déraisonnable, abusive ou discriminatoire. Quant aux autres événements, sans les minimiser, il y a lieu de les contextualiser. Pour ces raisons, la travailleuse n’a pas démontré la présence d’un événement imprévu et soudain et, par conséquent, elle n’est pas victime d’une lésion professionnelle.
[34] Selon une jurisprudence constante du Tribunal[21], avalisée par les tribunaux supérieurs[22], l’exercice normal du droit de gérance ne constitue pas un événement imprévu et soudain et par conséquent, la condition psychologique découlant d’un tel exercice n’est pas une lésion professionnelle. Dans la décision S.B. et Compagnie A[23], la juge administrative donne des exemples de situations relevant de l’exercice normal du droit de gérance :
Le conflit de personnalités avec le supérieur immédiat; l’ordre d’un supérieur auquel un travailleur refuse d’obtempérer; les avis disciplinaires verbaux ou écrits de l’employeur; la rencontre disciplinaire avec l’employeur portant sur les absences répétées du travailleur, son indiscipline ou son manque de productivité; l’évaluation du travailleur ou une surveillance accrue; la menace de mesures disciplinaires et la répartition des tâches de travail13.
Le fait pour un nouveau gestionnaire d’introduire une approche différente dans la gestion du personnel, d’imposer des modifications à la répartition des tâches et de réorganiser le travail14.
[Notes omises]
[35] Dans la décision Cadieux et Agences des Services Frontaliers du Canada[24], d’autres exemples sont donnés :
[28] En règle générale, ne seront pas considérés comme circonstances exceptionnelles, parce que prévisibles dans un milieu normal de travail et relevant de l’exercice du droit de gérance de l’employeur, les circonstances suivantes : le conflit de personnalité avec le supérieur immédiat; l’ordre d’un supérieur immédiat auquel le travailleur refuse d’obtempérer; les avis disciplinaires écrits et verbaux de l’employeur; la rencontre disciplinaire avec l’employeur portant sur les absences répétées du travailleur; son indiscipline face aux directives de son superviseur; son manque de productivité ou encore son rendement qui ne correspond pas aux exigences du poste; l’évaluation du travailleur ou une surveillance accrue; la menace de mesures disciplinaires .
[36] Cette position s’arrime avec la définition de travailleur prévu à l’article 2 de la Loi et son nécessaire lien de subordination prévu au contrat de travail[25]. Sur ce point, le Tribunal s’exprime comme suit dans la décision Hallée et RRSSS Montérégie[26] :
[143] Lorsqu’en effet une personne se présente sur le marché du travail, elle doit s’attendre à ce que l’employeur qui l’embauche exerce sur elle un droit de gérance qui comprend des exigences d’efficacité, de rendement, de discipline et d’encadrement, et à ce que leur non-respect devienne susceptible de mesures qui peuvent être appliquées à l’égard du travailleur, sans que celui-ci puisse s’en surprendre, si elles sont prises dans le respect des droits du travailleur et des lois et conventions en vigueur dans le milieu de travail concerné.
[37] Cependant, cet énoncé général souffre d’une exception : lorsque l’exercice du droit de gérance est exercé de façon déraisonnable, abusive ou discriminatoire. Pour déterminer si ce pouvoir est convenablement utilisé, le Tribunal se réfère au cadre d’analyse développé dans la décision S.B. et Compagnie A[27] :
[18] Il se dégage de la jurisprudence certains principes à considérer afin de déterminer si un employeur a exercé convenablement ou non son droit de gérance. Ces principes se résument comme suit :
Le droit de gérance est un pouvoir de nature discrétionnaire qui implique une liberté d’action large et étendue à l’employeur, notamment dans l’imposition de règles et de procédures de travail, dans l’évaluation du rendement des employés et le contrôle de la qualité du travail qu’ils accomplissent. Ce n’est qu’en cas d’exercice déraisonnable du droit de direction que l’on peut parler d’abus de droit16.
Pour déterminer si l’employeur a exercé de façon déraisonnable, abusive ou discriminatoire son droit de gérance, le Tribunal doit apprécier si les gestes ou actes posés par celui-ci :
Il y a abus lorsque l’employeur use de son droit de gérance de façon malicieuse ou à l’encontre des règles de la bonne foi, lorsque ses agissements ne sont pas animés par des motifs liés au bon fonctionnement de l’entreprise et lorsqu’un employeur qui dirige son entreprise avec bon sens et dans le respect de l’équité n’aurait, de toute évidence, pas agi de la même façon18.
Un employeur peut exercer son droit de gérance avec fermeté et commettre des erreurs, dans la mesure où cet exercice n’est ni abusif ni déraisonnable19.
Il n’est pas nécessaire de démontrer la faute ou l’intention de nuire de la part de l’employeur, puisque seul l’exercice déraisonnable constitue un abus de droit. Il suffit que l’employeur agisse sans prendre les précautions nécessaires à l’exercice normal d’un droit ou excède la mesure ordinaire de son droit, et ceci, même en étant de bonne foi.20
Le comportement et l’attitude du travailleur sont des éléments à considérer pour apprécier si les gestes ou actes posés par l’employeur correspondent à la conduite de celui-ci21.
[Notes omises]
[38] Ainsi, ce n’est que lorsque l’exercice du droit de gérance s’avère déraisonnable, abusif ou discriminatoire dans un contexte de relation de travail que l’on considère qu’il y a débordement du cadre normal de travail donc, qu’il y a un événement imprévu et soudain.
[39] Il s’agit de l’essence du présent litige : l’employeur a-t-il correctement exercé son droit de gérance? Les argumentations des représentantes de la travailleuse et de l’employeur ont porté sur ce point. Évidemment, l’une et l’autre soumettent une vision diamétralement opposée de la situation. Cependant, au-delà de ces divergences, la preuve révèle certains éléments qui ne font pas débat :
[40] Le Tribunal retient que les rencontres des 17 mai et 21 août 2019 découlent de plaintes d’incivilité à l’encontre de la travailleuse. Pour la rencontre du 17 mai, une assistante de soir aux soins intensifs a déposé une plainte en raison d’une incivilité de la part de la travailleuse à son endroit. Quant à la rencontre du 21 août, différentes personnes ont dénoncé le comportement de la travailleuse tant par son attitude, son comportement ou son langage. Chaque fois, il est question d’allégations d’incivilités. À aucun moment, la compétence, la disponibilité ou l’engagement de la travailleuse ne sont remis en question par l’employeur.
[41] Pour le Tribunal, l’employeur, en raison des plaintes ou des allégations, se devait de convoquer la travailleuse pour obtenir sa version des faits.
[42] Une grande partie de l’audience a porté sur le bien-fondé ou non des plaintes. La travailleuse les conteste. Pour elle, ces plaintes sont infondées et les impacts disproportionnés. Cependant, et c’est essentiel, le Tribunal, aux fins du présent litige, n’a pas à déterminer si les plaintes sont fondées ni même si la sanction donnée par l’employeur le 17 juin est adéquate. Cette compétence est dévolue à l’arbitre de grief. Le Tribunal ne doit pas vérifier si le fondement d’une dénonciation est juste, mais s’il y a une dénonciation et si l’employeur a exercé de façon déraisonnable, abusive ou discriminatoire son droit de gérance.
[43] Une convocation à une rencontre avec les ressources humaines a justement comme but d’obtenir la version de la travailleuse. Par la suite, l’employeur peut ou non poursuivre son enquête, et en vertu de son droit de gérance, imposer une sanction ou une mesure si nécessaire. La travailleuse, conformément à sa convention collective, peut déposer un grief à l’encontre de celle-ci et le tout sera entendu par un arbitre qui confirmera, infirmera ou modifiera cette mesure. Le Tribunal ne doit et ne peut se substituer à l’arbitre de grief. C’est ainsi que le Tribunal saisi d’un litige sur l’admissibilité d’une lésion professionnelle, dans le cadre de sa compétence, doit vérifier uniquement comment l’employeur a exercé son droit de gérance. À ce sujet, le Tribunal se réfère à l’affaire Verville et Messagerie ADP inc.[29] :
[97] Les événements invoqués par le travailleur comme étant à l’origine de sa lésion psychologique relèvent des relations de travail, ne dépassent pas le cadre normal du travail et plusieurs de ces événements sont une manifestation du droit de gérance de l’employeur qui utilise les recours disciplinaires que la convention collective met à sa disposition. La Commission des lésions professionnelles n’a pas à déterminer si toutes les mesures prises par l’employeur étaient fondées, son rôle n’étant pas de déterminer le bien fondé des griefs pris par le travailleur à cet effet, ce qui fait partie de la compétence de l’arbitre de grief. La compétence de la Commission des lésions professionnelles est plutôt d’analyser les événements invoqués par le travailleur pour éventuellement décider si ceux-ci, pris dans leur ensemble, constituent un événement imprévu et soudain.
[Notre soulignement]
[44] Qu’en est-il du droit de gérance?
[45] Le droit de gérance est une composante du lien de subordination qui se rattache au contrat de travail, il fait partie de la relation employeur – travailleur. Dans la décision Hallée et RRSSS Montérégie[30], le Tribunal précise ce qui suit :
[143] Lorsqu’en effet une personne se présente sur le marché du travail, elle doit s’attendre à ce que l’employeur qui l’embauche exerce sur elle un droit de gérance qui comprend des exigences d’efficacité, de rendement, de discipline et d’encadrement, et à ce que leur non-respect devienne susceptible de mesures qui peuvent être appliquées à l’égard du travailleur, sans que celui-ci puisse s’en surprendre, si elles sont prises dans le respect des droits du travailleur et des lois et conventions en vigueur dans le milieu de travail concerné.
[46] Pour circonscrire le droit de gérance, le Tribunal se réfère à la décision Centre hospitalier régional de Trois-Rivières et Syndicat des infirmiers et infirmières de Trois‑Rivières[31] citée par notre Tribunal, entre autres, dans l’affaire Théroux et Sécurité des incendies de Montréal[32] :
[249] Rappelons que le traditionnel droit de direction de l'employeur, qui lui confère le pouvoir de diriger et de contrôler les activités de son entreprise, est un pouvoir de nature discrétionnaire et qu'à ce titre, la doctrine et la jurisprudence reconnaissent une liberté d'action assez large à l'employeur qui inclut le droit à l'erreur à la condition que celle-ci ne soit pas abusive ou déraisonnable.
[250] C'est ainsi que dans la direction et le contrôle de son personnel, l'employeur possède une discrétion étendue lorsqu'il s'agit d'établir et de faire respecter les procédures de travail, les règles et les usages du milieu de travail, d'évaluer le rendement des salariés et de contrôler la qualité du travail qu'ils accomplissent : tout cela fait partie de l'exercice normal du droit de direction et il est entendu qu'il peut en résulter du stress et des désagréments. Tout cela fait partie de la normalité des choses. Ce n'est donc qu'en cas d'exercice déraisonnable du droit de direction que l'on peut parler d'abus de droit.
[Notre soulignement]
[47] Les auteurs Béchard et Lavoie décrivent l’abus de droit « lorsque l’employeur abuse de son droit de gérance de façon malicieuse, déraisonnable ou à l’encontre des règles de la bonne foi8, lorsque ses agissements ne sont pas animés par des motifs liés au fonctionnement de l’entreprise ou lorsqu’un employeur compétent, qui dirige son entreprise avec bon sens et dans le respect de l’équité, n’aurait de toute évidence pas agi de la même façon9 »[33]. [Notes omises]
[48] Plus près en matière de lésion professionnelle, le Tribunal, dans Sukara et Station Mont-Tremblant (Hôtel)[34], résume comme ceci la juxtaposition entre le droit de gérance et l’abus de droit :
[20] Il faut se demander si le comportement de l’employeur constitue un abus de son droit de gérance et ceci, que ce soit intentionnel ou non, qu’il y ait eu faute ou intention de nuire ou non, puisque le seul exercice déraisonnable d’un droit constitue un abus de droit17. Il suffit que l’employeur ou le détenteur de l’autorité agisse sans prendre les précautions nécessaires à l’exercice normal d’un droit ou excède la mesure ordinaire de son droit, et ceci, même en étant de bonne foi18.
[…]
[23] Ceci dit, le droit de gérance confère un pouvoir de nature discrétionnaire à l’employeur dans la direction et le contrôle des activités de l’entreprise, ce qui lui permet une liberté d’action assez large. Cette liberté inclut le droit à l’erreur tant que celle-ci n’est pas abusive ou déraisonnable. Elle implique aussi une discrétion étendue dans l’imposition de règles, de procédures de travail, et l’évaluation du rendement des employés et le contrôle de la qualité du travail qu’ils accomplissent. Ce n’est qu’en cas d’exercice déraisonnable du droit de direction qu’on peut parler d’abus de droit22 :
[Notes omises]
[49] Qu’en est-il maintenant de la gestion de ces rencontres? Comment celles-ci se sont-elles déroulées? Ou encore, autrement dit, y a-t-il présence d’abus de droit?
[50] Le Tribunal retient de la preuve que lors de ces rencontres, soit celles des 17 mai, 14 juin et 21 août 2019, le ton de la responsable des ressources humaines et de la gestionnaire de la travailleuse est, selon les dires de la responsable du syndicat, madame Élise Champoux, « normal », « pas inhabituel ». Ce témoin, qui témoigne à la demande de la travailleuse, est, pour le Tribunal, hautement crédible. Elle a assisté aux trois rencontres et a exposé, sans faux-fuyant, ce qui s’est passé. De même, son témoignage, pour l’essentiel, est corroboré par celui d’autres personnes qui ont participé à ces rencontres, soit madame Perron, la gestionnaire de la travailleuse, et madame Rolland, responsable des ressources humaines.
[51] Madame Champoux explique que lors de la première rencontre du 17 mai, la représentante de l’employeur demande à la travailleuse de commenter certains faits décrits par une assistante-cheffe. La travailleuse rejette les affirmations de l’assistante‑cheffe. Elle précise que la travailleuse est « sous le choc » d’être convoquée pour un « TOP-5 », mais collabore très bien. Après cette rencontre, elle discute seule avec la travailleuse. Celle-ci est bouleversée et elle pleure. Elle ne comprend pas ce qui s’est passé.
[52] La rencontre du 14 juin est courte et se passe « normalement ». La représentante des ressources humaines fait la lecture de l’avis disciplinaire. La rencontre dure, selon la représentante syndicale, approximativement cinq minutes. Le ton des participants est « très correct, normal » et la travailleuse, à la fin, prend la lettre et dit qu’elle fera attention. Ce témoignage est corroboré par celui de madame Rolland, responsable des ressources humaines, qui précise que le ton de cette rencontre est respectueux.
[53] Lors de cette rencontre, madame Escaffre remplace madame Perron. La travailleuse, lors de l’audience, explique que sa présence est aberrante, puisqu’en 2012, elle a déposé une plainte contre elle. Cette plainte n’est pas retenue, mais la travailleuse s’absente en maladie de son travail quelque temps. Le Tribunal retient que la travailleuse n’a rien dit sur cette situation lors de la rencontre du 14 juin, elle ne l’a pas dénoncée. De même, madame Escaffre était à ce moment la remplaçante de la gestionnaire de la travailleuse depuis deux semaines en raison des vacances de madame Perron. Madame Rolland témoigne qu’elle ne connaissait pas, au moment de cette rencontre, l’ancien conflit entre ces deux personnes, il en est de même pour la représentante syndicale. Le Tribunal retient que la rencontre dure cinq minutes et que selon le témoignage de la représentante syndicale, madame Escaffre n’a pas parlé. Ainsi, elle est présente, puisque la gestionnaire de la travailleuse se doit de l’être, mais ne participe pas à la réunion. La présence de madame Escaffre, quoique pouvant être désagréable, n’a donc pas l’importance que lui accorde aujourd’hui la travailleuse et ne s’assimile pas un à événement imprévu et soudain ni même à une composante d’une série de petits événements.
[54] La représentante syndicale témoigne que lors de la rencontre du 21 août, la représentante des ressources humaines introduit les situations problématiques dénoncées par différents intervenants. Pendant cette rencontre, la représentante syndicale explique que la travailleuse est chamboulée, qu’elle n’avait jamais remarqué que les jeunes avaient peur d’elle, puisqu’ils sont ses amis. Madame Champoux dit que la travailleuse est en pleurs qu’elle a des soubresauts lorsqu’elle parle. La réunion dure approximativement 15 minutes et, selon le témoin, le ton des intervenants est « normal ». À une question posée par le Tribunal, la représentante syndicale indique que personne n’a utilisé une gestuelle, un ton ou un propos agressifs. En fait, elle dira que cela s’est passé normalement, comme lors d’autres rencontres avec d’autres salariés.
[55] La travailleuse, qui devait débuter son quart de travail, est retournée, avec l’autorisation des responsables sur place, chez elle. Dans les faits, elle n’a jamais repris son emploi.
[56] Les témoignages de madame Champoux et de madame Rolland ne corroborent pas certains propos de la travailleuse comme lorsqu’elle mentionne au docteur Chamberland que lors de la rencontre du 21 août « la représentante des ressources humaines était colérique et qu’elle l’a « blastée ». Madame dit que pendant ce temps, Mme Perron souriait bizarrement ». Ce n’est pas que la travailleuse ne soit pas crédible, loin de là. Seulement, sa version des faits semble teintée de subjectivité issue à la fois d’un ressenti et d’une d’analyse a posteriori des faits.
[57] Quoique le Tribunal croit la travailleuse dans son ressenti, il existe une démarcation entre celui-ci, la manière dont elle a perçu les événements, et ce qui s’est passé. Ainsi, la travailleuse est crédible et de bonne foi, mais son témoignage n’est pas fiable, car il ne représente pas, selon la preuve probante, le déroulement des événements.
[58] En effet, la travailleuse a indiqué, dans le cadre de son témoignage, penser beaucoup à ce qui s’est passé, chercher à comprendre. Au docteur Martin, elle dira qu’elle « passe toutes ses journées, à temps plein, à se concentrer pour monter un dossier de contestation ». Plus loin, il ajoute, « elle passe quatorze heures par jour, sept jours par semaine, à préparer sa cause. Elle y pense tout le temps. Elle a rédigé soixante-quinze pages de faits ».
[59] De même, dans le cadre de son témoignage, la travailleuse explique différents événements qui précèdent la réunion du 21 août 2019. Sans revenir sur l’ensemble de ces événements, notons, à titre d’exemple, qu’elle s’est sentie contrainte de signer un document sur sa renonciation à sa période d’initiation et d’essai; qu’elle mentionne qu’au début du mois de juin, elle a vécu une problématique liée à une absence lors d’un quart du soir et que sa gestionnaire aurait eu des propos désobligeants; qu’elle explique qu’à cette époque, elle vit un surcroît de travail; qu’elle consulte son médecin en urgence le 4 juin 2019 et lui aurait parlé de harcèlement au travail et de surcharge au travail; et que son employeur tente de se débarrasser d’elle en lui proposant de prendre sa retraite.
[60] Ces éléments, dans le cadre de la réclamation de la travailleuse, sont pour la majorité d’entre eux nouveaux. C’est dire qu’ils n’ont pas été soumis aux différents experts, à l’agente d’indemnisation de la Commission ou à la réviseure administrative. Ils apparaissent tardivement et se doivent d’être relativisés.
[61] Par exemple, la travailleuse témoigne qu’elle a consulté son médecin le 4 juin 2019 en raison de harcèlement au travail et de surcroît de travail. Dans ses notes cliniques, le médecin rapporte : « patient presents today for a f/u. Px c/o ++ work stress. She is an ICU nurse. She has not yet seen rheumatology for elevated CRP and Rheumatoid Factor. […] » et, sous la section « Physical exam », « Patient well, in no apparent distress ». Néanmoins, le médecin reproduit le diagnostic de dépression majeure qu’il avait posé lors des consultations précédentes de novembre 2013, juillet 2014, avril et juin 2015, juin 2016, février, mai et juin 2017, février et juin 2018 et réintroduit une médication antidépressive cessée par la travailleuse en 2018.
[62] Lors de la consultation suivante, le 16 juillet, le médecin indique, sous la section « History of present illness », un suivi en lien avec différents examens médicaux sans lien avec le travail et sous la section « Physical exam » « Patient well, in no apparent distress ». Le médecin n’indique aucun suivi avec un stress au travail, mais reproduit le diagnostic de dépression majeure. Ainsi, et c’est la preuve prépondérante, la consultation médicale ne porte pas principalement sur une problématique au travail.
[63] Pour le Tribunal, en regard de la preuve testimoniale et de la preuve médicale, le déclencheur de manière contemporaine de la condition psychologique de la travailleuse ou plus précisément de l’aggravation de cette condition est la convocation à la rencontre du 21 août 2019 ainsi que cette rencontre elle-même. C’est d’ailleurs ce que la travailleuse nomme comme événement dans un courriel du 18 octobre 2019 et lorsqu’elle dépose sa réclamation à la Commission le 14 octobre 2019 :
Rencontre avec RH et on m’accuse d’être la terreur de soir aux soins intensifs, je suis infirmière clinicienne depuis 1985, ayant toujours travaillé aux soins intensifs de chirurgie depuis.
Vu par mon médecin et un psychiatre qui m’a recommandé un avocat du travail, je suis en choc sous médicament depuis ce jour.
[64] La preuve médicale et le témoignage même de la travailleuse vont en ce sens, soit l’effet de la rencontre du 21 août 2019 sur elle. Sur ce point, le témoignage de la travailleuse est fiable et crédible puisque constant et corroboré par la preuve au dossier ainsi que par d’autres témoins.
[65] Elle témoigne que, le 4 août, elle demande un congé pour la fin de semaine qui approche, soit du 9 au 11 août, ce qui lui est accordé. Il est déjà prévu qu’elle soit en vacances du 12 au 15 août. La veille de son départ, le 8 août, la travailleuse témoigne que madame Perron lui téléphone pour l’informer que sa candidature n’est pas retenue pour remplacer l’assistante sur le quart du soir et qu’elle doit être rencontrée par les ressources humaines au sujet de quatre situations. Elle s’absente du travail ce 8 août. Pendant cette période de congé et de vacances, la travailleuse mentionne dormir beaucoup.
[66] Après ses vacances, elle assiste, accompagnée de sa déléguée syndicale, à une rencontre avec les ressources humaines et sa supérieure. L’employeur reproche à la travailleuse quatre situations. Sans écarter les différents événements qui précèdent cette rencontre, la preuve révèle, et c’est le témoignage de la travailleuse, que ce qui se passe le 21 août 2019 est déterminant.
[67] Elle dit, dans le cadre de son témoignage, que lors de cette rencontre, sa supérieure l’a persécutée. Elle s’est sentie dénigrée, sans reconnaissance, trahie, violée et abusée. Pourquoi ont-ils accepté son transfert à un autre poste si les gestionnaires savaient qu’elle n’était pas aimée par les gens à cet autre poste? Pourquoi lui ont-ils demandé de renoncer à la période d’essai? La travailleuse ne comprend pas pourquoi ils ne considèrent pas ce qu’elle a fait dans le passé, toutes les heures travaillées, la qualité de son travail, son expérience et son expertise. Elle a eu tellement mal, qu’elle s’est sentie déconnectée, comme si son âme était partie elle parle d’un « voyage astral ». À la sortie de cette réunion, elle communique avec son médecin et lui dit : « je suis trahi [sic], j’ai besoin d’aide, SOS » et ne sait pas comment elle est rentrée à la maison.
[68] La travailleuse témoigne qu’après cette rencontre, elle perçoit qu’aux yeux de son employeur elle ne vaut rien, que son expertise ne vaut rien et qu’elle est un monstre.
[69] Elle explique que le lendemain, le syndicat communique avec elle pour lui faire une offre de retraite. Cette offre, pour elle, est de trop. L’employeur veut se débarrasser d’elle, lui faire quitter sa profession qu’elle aime. Elle dira qu’elle a tout donné à son employeur et qu’elle a l’impression qu’il la poignarde dans le dos.
[70] À des questions posées par sa représentante, elle dit qu’elle fait des cauchemars depuis le 21 août, qu’elle a une anhédonie depuis cette journée et une perte d’énergie à partir du 8 août.
[71] Pour le Tribunal, le déclencheur de sa condition psychologique ou l’aggravation de cette condition est la convocation à la réunion ainsi que cette réunion elle-même. Et c’est également ce que la preuve médicale révèle.
[72] Le Tribunal a bénéficié du témoignage des psychiatres Chamberland, à la demande de la travailleuse, et Tremblay, à la demande de l’employeur. Sans être du même avis sur la sévérité de la dépression et la présence et l’impact d’une condition personnelle, tous deux s’entendent sur le fait que la travailleuse, lors de cette rencontre, a vécu une blessure narcissique.
[73] Dans son témoignage, le docteur Chamberland indique que la travailleuse a vécu la rencontre du 21 août comme quelque chose de massif. Il ajoute que pour la travailleuse, elle ne fait rien de bon, le monde est contre elle, elle vit de la persécution. Il ajoute que la travailleuse lui a indiqué qu’elle n’a pas eu d’indice que tout allait mal avant la rencontre. Dans son expertise du 20 janvier 2022, le docteur Chamberland associe la condition psychologique de la travailleuse à cette rencontre :
Il ne nous appartient évidemment pas de déterminer si au niveau administratif ou légal les symptômes dont a souffert Madame sont reliés aux événements vécus à son travail.
Toutefois, au niveau médical, ce lien ne fait aucun doute. En effet, Madame ne présentait pratiquement aucun symptôme avant la rencontre administrative. Au contraire, Madame explique qu’elle n’a jamais vu venir ce qui lui est arrivé.
[74] Il précise, toujours dans son expertise, que pour la travailleuse, son travail « constitue non seulement son identité, mais sa fierté ». C’est ainsi, selon le docteur Chamberland, que le fait pour la travailleuse de se sentir rejetée de son travail a eu un effet important sur elle :
On doit cependant souligner le fait que madame investissait beaucoup son travail. Compte tenu de sa situation particulière, son travail représentait, à ses yeux, son identité et sa fierté. Une partie du temps qu’elle aurait pu consacrer à ses loisirs était consacrée au travail. Une partie de son réseau social était constituée des personnes qu’elle fréquentait à son travail. Pour Madame, le travail était donc très investi et constituait aussi une partie de ses loisirs et de son réseau social. Le fait qu’elle se soit sentie rejetée massivement et unanimement de son travail a eu chez elle un impact proportionnel à l’investissement qu’elle y avait mis.
[75] Le docteur Chamberland, dans le cadre de son témoignage, ajoute que la travailleuse se valorise par son travail et qu’être infirmière est son identité. Lorsqu’elle se fait annoncer que son employeur ne veut plus d’elle, tout s’effondre. Son identité, son estime personnelle et ses loisirs lui sont retirés. Pour cette raison, selon le docteur Chamberland, la travailleuse qui a été blessée lors de la rencontre du 21 août 2019 a développé un mécanisme de défense.
[76] Pour le docteur Chamberland, la rencontre du 21 août est donc le moment charnière, là où tout bascule. C’est là que la travailleuse développe sa dépression majeure. Le docteur Chamberland explique, dans le cadre de son témoignage, que la travailleuse aurait développé sa condition quelque temps avant, soit au début janvier, lorsqu’elle demande de remplacer l’assistant-chef et que cette demande est refusée. Ce qu’il n’écrit pas dans son expertise. Il importe de se rappeler qu’au même moment, la travailleuse est convoquée à la rencontre du 21 août.
[77] Quant à lui, le docteur Tremblay explique, dans le cadre de son témoignage, qu’avoir une rencontre disciplinaire est un stress objectif. Si l’impact de la rencontre de mai est mineur, celle d’août est majeure. La travailleuse est sortie de cette rencontre en se sentant humiliée. Pour le docteur Tremblay, la travailleuse a vécu un stress lors de cette rencontre. Dans le cadre de son expertise écrite, il ajoute ce qui suit :
Madame est actuellement dans une lutte pour rétablir les torts perçus à sa réputation, et en combat pour ce qu’elle considère comme un congédiement déguisé. Cela est beaucoup plus en relation avec ses perceptions et son caractère qu’un quelconque événement survenu spécifiquement dans le cadre du travail.
L’ensemble du problème néanmoins découle des critiques sur sa performance et son comportement, lesquels sont tributaires, à mon avis, d’un excès de travail qui entraîne une bonne dose d’irritabilité ou d’intolérance.
[78] Le docteur Tremblay témoigne sur l’interférence d’éléments personnels sur la composante psychologique actuelle. La présence d’une condition personnelle explique‑t‑elle une partie de la réaction de la travailleuse? Peut-être. Cependant, le Tribunal n’a pas, aux fins du présent litige, à se prononcer sur cette question puisqu’il doit d’abord déterminer la présence ou non d’un événement imprévu et soudain. Par ailleurs, ce qui est déterminant pour l’un et l’autre des experts entendus est l’effet de la rencontre du 21 août 2019 sur la travailleuse. Cette conclusion est d’ailleurs reprise par d’autres médecins.
[79] La travailleuse rencontre le docteur Desrosiers le 19 octobre 2019, à la demande de l’employeur. Sous la rubrique « Causes probables de son état », il indique ceci :
12 août 2019 [NDL 21 août 2019], madame est convoquée à une rencontre avec les ressources humaines et sa chef de service, qui devait avoir lieu avant le début de son quart de travail, pour lui faire part que ses collègues plus jeunes se seraient plaints de son attitude envers eux. On ne lui aurait laissé que quelques minutes pour se préparer à cette rencontre, alors qu’elle débutait son quart de travail. Au cours de la rencontre, madame était perturbée, pleurait, et n’aurait pu donner sa version des faits. On lui aurait suggéré une retraite précoce à compter du 1er décembre 2019 ainsi qu’un congé avec solde d’ici là. Après la rencontre, madame était perturbée, car ne s’attendait pas à ce type de reproches. Elle a dû quitter son travail par la suite. Elle aurait logé un grief contre son employeur et sa chef de service, ayant l’impression d’avoir été trahie par elle.
[80] Le docteur Legault, psychiatre, rencontre la travailleuse en janvier 2021 pour la production d’un rapport d’arbitrage médical. Il conclut, tout comme le médecin de famille, que la travailleuse, à cette date, est inapte. Il note ce qui suit sous la rubrique « RÉSUMÉ DES FAITS » :
Au 1er chef madame estime avoir été pendant 13 ans isolée par son travail. Comme prise dans une secte. Sinon comme assujettie dans la culture particulière de son milieu de travail.
Madame affirme dernièrement avoir demandé de prendre sa retraite. Allègue que l’Institut aurait refusé. Puis qu’elle s’est fait [sic] à l’idée. Consultera son avocat et un procureur. Madame allègue qu’elle ne serait jamais partie de l’Institut. Ne se voyait pas retraitée. Madame aimait trop son travail. Une belle profession, une belle équipe et comme sa famille adoptive. Même qu’après son divorce, s’était investie comme la « mère d’un peu tout le monde » à l’institut. La rassembleuse. À 2 pôles en somme, soit surinvestie ou soit isolée.
Au sortir d’une rencontre en août 2019, madame s’est sentie jugée, évaluée et violée (dans ses propres termes). Se serait fait dire qu’elle était la « terreur » depuis 2017. Pas aimé [sic] des plus jeunes. Reconnait qu’elle était dans une période de grande fatigue et qu’elle faisait trop de temps supplémentaire. Allègue une trahison par une chef de service.
Madame prétend qu’on lui fait signer sous pression une renonciation de son poste. Qu’elle n’a pas eu pleine et entière information. Allègue qu’on a surveillé ses dossiers et qu’on lui manquait de reconnaissance après 36 ans de loyaux services. Elle en parle comme d’un choc. Qu’elle était défaite et vidée au sortir de cette rencontre administrative.
[Notre soulignement]
[81] Ainsi, pour le Tribunal, cette rencontre du 21 août 2019 ainsi que la convocation à celle-ci sont, pour la travailleuse, déterminantes.
[82] En aucune façon, le Tribunal n’écarte le ressenti de la travailleuse en regard de ces événements et principalement de la dernière rencontre. Elle s’est sentie trahie, mise de côté. Comme si son employeur ne prenait pas en compte tout ce qu’elle a fait. Comme si une seule faute ou quelques fautes mineures selon la travailleuse pouvaient effacer ses années de travail, tout le temps qu’elle a donné à l’employeur. Il s’agit du ressenti de la travailleuse que le Tribunal ne minimise pas, loin de là, et qui est clairement démontré tant par son témoignage que par la preuve médicale.
[83] Cependant, la preuve démontre que l’employeur n’a jamais indiqué que la travailleuse ne vaut rien et que son expertise ne vaut rien. La preuve révèle que lors de ces réunions, les représentants de l’employeur ont conservé un ton correct et que, pour reprendre le témoignage de la représentante syndicale, cela s’est passé normalement, comme lors d’autres rencontres avec d’autres salariés.
[84] Lors de la rencontre du 21 août 2019, il est question de prise de retraite par la travailleuse. Est-ce la travailleuse qui a demandé à l’employeur de trouver une solution ou encore la représentante des ressources humaines qui propose cette avenue d’elle-même? Sur ce point, la preuve est contradictoire. La preuve démontre par contre qu’après la rencontre, il est question de retraite lors d’une conversation entre la responsable des ressources humaines et la représentante du syndicat. L’offre d’une entente avec la travailleuse est refusée par cette dernière. Le Tribunal retient de la preuve que l’employeur a fait une proposition à la travailleuse et que celle-ci s’est sentie attaquée. Il s’agit, une fois encore, de la perception de la travailleuse et qui n’est pas, en l’espèce, un événement imprévu et soudain ni un élément à considérer.
[85] Pour le Tribunal, la travailleuse devait démontrer, par prépondérance de preuve que l’employeur n’a pas correctement exercé son droit de gérance, ce qu’elle n’a pas fait en ce que :
[86] La rencontre du 21 août 2019, ainsi que celles du 17 mai et 14 juin 2019, sont en en lien et sont justifiées avec le fonctionnement de l’entreprise, elles sont justes et équitables, compte tenu des circonstances et un employeur raisonnable et compétent aurait agi de la même façon comme l’explique le Tribunal dans l’affaire S.W. et Centre A[35] :
[128] En l’absence d’un exercice déraisonnable du droit de gérance, les événements qui s’inscrivent dans le cadre des relations de travail ne peuvent constituer un événement imprévu et soudain, et ce, conformément à la jurisprudence constante55 du Tribunal.
[…]
[133] Comme expliqué dans Gatineau (Ville de) et Lacasse67, la contrariété vécue par un travailleur en regard de son supérieur, issue de perceptions subjectives ne constitue pas un événement imprévu et soudain :
[74] Le travailleur se devait de démontrer que des événements particuliers survenus dans le cadre de son travail constituaient des éléments déterminants, de par leur cumul, permettant de conclure à l’existence d’un événement imprévu et soudain et par voie de conséquence, à un accident du travail. Or, les situations mises en relief par le travailleur visent surtout des problèmes de relations de travail avec ses supérieurs. En effet, malgré que le travailleur allègue que sa charge de travail est lourde et que le dossier spécial qui lui a été assigné accapare presque tout son temps au printemps 2007, ce qui apparaît le plus signifiant des propos du travailleur est une accumulation de frustration face à l’attitude de son supérieur immédiat en regard de ses demandes de soutien et le fait que ce dernier semble manquer de respect et de considération envers lui. Le travailleur n’accepte pas, à tort ou à raison, les critiques de son employeur quant à son rendement au travail et particulièrement en regard de ses méthodes de travail qui, selon son supérieur immédiat, sont possiblement responsables de la surcharge alléguée.
[75] Or, ces situations conflictuelles, par ailleurs déterminantes pour le travailleur, relèvent dans le présent cas, de prime abord, d’une perception subjective de faits spécifiques relevés par ce dernier, plutôt que de faits objectifs pouvant mettre en lumière des incidents pouvant être qualifiés d’événements imprévus et soudains, qui, jumelés à une charge de travail importante, auraient pu fonder la source de la lésion professionnelle alléguée.
[Notes Omises]
[87] Il en est de même dans la décision Meunier et SAQ Montérégie[36].
[44] La travailleuse a été décrite par son employeur comme étant une employée qui prend son travail très à cœur, qui a le souci du détail et qui souhaite performer. En revanche, il estime qu’elle se met beaucoup de pression et de stress. C’est aussi ce qu’a pu percevoir le Tribunal lors du témoignage de la travailleuse. À ce chapitre, il est exact, comme l’a mentionné la procureure de la travailleuse que cette dernière doit être prise dans l’état où elle se trouve. Ainsi, une prédisposition à développer une lésion psychologique ne doit pas faire échec à la reconnaissance d’une lésion professionnelle. Il faut toutefois que la preuve démontre véritablement l’existence d’une lésion professionnelle. En l’occurrence, la travailleuse doit faire la preuve d’un événement ou d’une série d’événements ayant un caractère objectivement traumatisant pouvant être assimilés à un événement imprévu et soudain. Or, le Tribunal considère que tel n’est pas le cas. La personnalité de la travailleuse peut expliquer sa perception des événements et sa réaction face à ceux-ci.
[45] Les éléments factuels décrits par la travailleuse s’inscrivent dans l’exercice raisonnable du droit de gérance de l’employeur et relèvent plutôt des relations de travail. Or, dans un tel cas, ils ne peuvent constituer un événement imprévu et soudain au sens de l’article 2 de la Loi. Peut-être la travailleuse a-t-elle raison de considérer que le personnel est insuffisant ou que la formation est déficiente. Cependant, le Tribunal ne peut s’immiscer dans la gestion de l’employeur dans la mesure où elle n’est ni abusive ni déraisonnable. D’autant plus qu’il est établi que, dans le cadre de l’exercice de son droit de gérance, un employeur peut commettre des erreurs5.
[Note omise]
[88] En terminant, le Tribunal tient à souligner que l’objet en litige est de déterminer si la travailleuse a démontré par prépondérance de preuve l’existence d’un accident du travail et, plus particulièrement, d’un événement imprévu et soudain. En aucune façon dans la présente décision, le Tribunal ne minimise le ressenti de la travailleuse. Celui-ci est réel. Manifestement, la travailleuse est blessée par ce qui s’est passé au travail. Elle a appris des choses, lors de la dernière réunion, qui lui ont fait mal, qui l’ont remise en question.
[89] Cependant, l’employeur, lors des différentes rencontres, a exercé, selon la jurisprudence du Tribunal, son droit de gérance de manière raisonnable et sans en abuser. Dernièrement, le Tribunal, dans la décision Leclerc et Minganie Équipement inc.[37], précise : « la réaction du travailleur à de telles démarches ou mesures disciplinaires n’est généralement pas considérée comme fondement à la reconnaissance d’une lésion professionnelle ». Cette conclusion est la même qu’en l’espèce.
[90] Pour ces motifs, le Tribunal conclut que la travailleuse n’a pas démontré l’existence d’« un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause, survenant à une personne par le fait ou à l’occasion de son travail et qui entraîne pour elle une lésion professionnelle ». Par conséquent, il rejette sa contestation.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU TRAVAIL :
REJETTE la contestation de la travailleuse, madame Lynda Davidson;
CONFIRME la décision rendue le 2 décembre 2020 par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que la travailleuse n’a pas subi de lésion professionnelle le 21 août 2019 et qu’elle n’a pas droit aux prestations prévues par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.
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| Jean-Sébastien Noiseux |
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Me Josée Lavallée | |
MELANÇON MARCEAU GRENIER COHEN S.E.N.C. | |
Pour la partie demanderesse | |
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Me Anne-Marie Bertrand Me Frédérique Forget | |
MONETTE BARAKETT, S.E.N.C. | |
Pour la partie mise en cause | |
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Me Gabrielle Cohen | |
PINEAULT AVOCATS CNESST | |
Pour la partie intervenante | |
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[1] La Commission refuse la réclamation dans une décision le 13 mars 2020.
[2] Décision rendue le 2 décembre 2020.
[3] L’acte introductif est déposé au Tribunal le 10 décembre 2020.
[4] RLRQ, c. A-3.001.
[5] Article 2 de la Loi.
[6] Emballages Mitchell Lincoln ltée et Fuoco, [2005] C.L.P. 1587, par. 18-19; F.C. et Compagnie A, 2016 QCTAT 1268, par. 22.
[7] Boies et C.S.S.S. Québec-Nord, [2011] C.L.P. 42; H.M. et Compagnie A, 2016 QCTAT 7024; S.G. et Centre A, 2020 QCTAT 4566; Beaubien et Société de transport de Montréal (Réseau des autobus — Entretien), 2020 QCTAT 4972; Mendez et Service correctionnel Canada, 2021 QCTAT 108; Laporte et Logistec Arrimage inc., 2021 QCTAT 337; Centre de services scolaire de la Région-de-Sherbrooke et Guimond, 2021 QCTAT 414; Vallerand et Conseil des Atikamekw de Manawan, 2023 QCTAT 2409.
[8] Article 2 de la Loi.
[9] Lanteigne-Dubé et Centre Recherches Agroalimentaires, C.L.P. 294712-62B-0607, 15 octobre 2008, C. Racine.
[10] Emballages Mitchell Lincoln ltée et Fuoco, précitée, note 6; voir également : Théroux et Sécurité des incendies de Montréal, 2011 QCCLP 540; Oualou et Centre de la petite enfance de l’Université de Montréal, 2017 QCTAT 2763; Mendez et Service correctionnel Canada, précitée, note 7; Bélanger-Pelland et Résidence Marie-Clothilde, 2021 QCTAT 912.
[11] Lelièvre et Société de transport de Montréal, C.L.P. 219149-61-0310, 9 février 2005, L. Nadeau.
[12] 2022 QCTAT 253. Voir également : Charron et Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal - Centre hospitalier de Verdun, 2022 QCTAT 4663; Hernandez et Boulangerie Canada Bread ltée, 2022 QCTAT 5068; Hénault et Institut de cardiologie de Montréal, 2022 QCTAT 5193; Annab et Société canadienne des postes, 2022 QCTAT 5562; Zaldivar Valladares et CHSLD Vigi Mont-Royal, 2023 QCTAT 387.
[13] Précitée, note 12.
[14] Charron et Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal - Centre hospitalier de Verdun, précitée note 12; St-Gelais et Haute-Côte-Nord-Manicouagan CH-CHSLD, 2023 QCTAT 2214.
[15] Voir à titre indicatif : Roy et Commission scolaire des Chênes, 2013 QCCLP 2234; Lafontaine et Centre Jean Bosco de Maniwaki inc., 2018 QCTAT 5755; Compagnie A et P.B., 2021 QCTAT 1977; J.B. et Centre A, 2021 QCTAT 1693; Leclerc et Minganie Équipement inc., 2023 QCTAT 2281.
[16] C.L.P. 101447-32-9806, J.G. Roy, 11 juin 1999.
[17] 2023 QCTAT 2384, requête en révision demandée.
[18] [2008] C.L.P. 224. Voir également au même sujet : A et CISSS de la Montérégie-Est, 2022 QCTAT 1263; Hénault et Institut de cardiologie de Montréal, précitée, note 12; Annab et Société canadienne des postes, précitée, note 12.
[19] Langlois et Sécurité — Policiers, 2011 QCCLP 7468; Compagnie A et G.L., 2016 QCTAT 2788; R.B. et Centre de services scolaire A, 2021 QCTAT 4238.
[20] 2015 QCCLP 2659.
[21] V.A. et N.G., C.L.P. 300103-63-0610, 7 février 2008, J.P. Arsenault, par. 53-62; Sukara et Station Mont-Tremblant (Hôtel), 2011 QCCLP 6514, par. 26; F.C. et Compagnie A, précitée, note 6, par. 26-27; Gagnon et Produits Plastitel inc., 2017 QCTAT 3149; M.B. et Compagnie A, 2020 QCTAT 202, par. 49-58, révision rejetée, 2021 QCTAT 5115; Chevrette et Société canadienne des postes, 2022 QCTAT 278, par. 9-10; St-Gelais et Haute-Côte-Nord-Manicouagan CH-CHSLD, 2023 QCTAT 2214, par. 15-16.
[22] Hôpital du Sacré-Coeur de Montréal c. Commission des lésions professionnelles, 2011 QCCS 501; Blouin Sirois c. Ambulance Sacré-Coeur, 2021 QCCA 151, par. 12.
[23] 2019 QCTAT 2444.
[24] C.L.P. 300883-71-0610, 15 janvier 2009, M. Zigby.
[25] Article 2085 du Code civil du Québec, RLRQ, c. CCQ-1991.
[26] [2006] C.L.P. 378.
[27] Précitée, note 23. Voir aussi : Pierre et Centre hospitalier de Verdun, 2016 QCTAT 2451, par. 57-64.
[28] Ici, seule l’existence de la rencontre ainsi que les sujets de celle-ci ne font pas débat. La travailleuse conteste plusieurs des allégations de l’employeur.
[29] C.L.P. 176751-72-0201, 13 juin 2003, Anne Vaillancourt
[30] Précitée, note 26.
[31] T.A., [2006] R.J.D.T., p. 397.
[32] 2011 QCCLP 540, voir également : Vincent et Sûreté du Québec, 2015 QCCLP 2341; Allaire et Service correctionnel Canada, 2022 QCTAT 2932.
[33] Anne-Marie BÉCHARD, Linda LAVOIE, « L’abus de droit en milieu syndiqué : évolution jurisprudentielle », dans BARREAU DU QUÉBEC, SERVICE DE LA FORMATION CONTINUE, Développements récents en droit du travail, Montréal, Édition Yvon Blais, 2017, pp. 139 à 160.
[34] Précitée, note 21.
[35] 2021 QCTAT 2247.
[36] 2019 QCTAT 751.
[37] 2023 QCTAT 2281.
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